Comparer avec

Paris

2 228 409 habitants
Maire sortant Anne Hidalgo (PS)
Urbanisme et logement

Déléguer l’intégralité de la collecte des ordures ménagères au secteur privé

La propreté est devenue l’une des premières préoccupations des Parisiens, tout simplement parce que la ville est sale : trottoirs souillés, dépôts sauvages d’ordures, vieux matelas à même le sol, odeur d’urine dans les rues, rats dans les jardins et les parcs, punaises de lit, etc. Nous spécialiserons les agents de la Ville sur le nettoyage des rues, en déléguant l’intégralité de la collecte des ordures ménagères au secteur privé. Cela devrait permettre de redéployer 600 à 700 agents sur le nettoyage.

Source : programme d’Agnès Buzyn

Coût
ESTIMATION INSTITUT MONTAIGNE
7,1 M€
ESTIMATION DU CANDIDAT
20 M€
Détail
HYPOTHÈSE BASSE
6,6 M€
HYPOTHÈSE HAUTE
7,7 M€
Répartition du coût
100 % ville de Paris
Temporalité
Coût annuel

Que faut-il en retenir ?

La proposition de la candidate vise à confier à des entreprises privées la gestion de la collecte des ordures ménagères dans les dix arrondissements actuellement en régie directe. Cette mesure vise notamment à dégager du temps pour les agents chargés du nettoyage des rues, dont la situation actuelle est jugée “épuisante et inefficace”. Il s’agit également de pouvoir disposer d’une organisation cohérente de la collecte des ordures ménagères à Paris et de mettre fin à un “découpage archaïque et inefficace”. Enfin, le programme indique que cette mesure permettra de réaliser des économies qui devraient compenser en partie la réaffectation des agents de la collecte sur la seule activité de nettoyage des rues.

Les agents de la ville, qui partagent leur temps entre la collecte des ordures et le balayage des rues, seraient alors affectés à plein temps au balayage. Le surcroît de masse salariale pour la ville représente selon nos estimations un montant annuel de l’ordre de 7,1 M€.

Ce montant peut être intégré dans les dépenses de la Ville par des efforts de gestion ou par une augmentation de 6,6 % de la taxe de balayage, dont les premiers contributeurs sont les administrations publiques et les grandes entreprises, qui disposent d’un patrimoine immobilier important et, par conséquent, présentent un linéaire de trottoir plus important, imposable à la taxe de balayage.

Contactée, l’équipe de la candidate considère que les 700 agents évoqués sont en réalité affectés à 100 % à la collecte des ordures ménagères, d’où un coût estimé à 20 M€. Le programme de la candidate indique que les coûts supplémentaires liés au redéploiement d’agents de la propreté sur le terrain seront intégralement compensés par des économies de gestion. 

Détail du chiffrage

Contexte de la mesure

A Paris, comme dans les autres agglomérations, la responsabilité de la collecte des ordures ménagères revient à la Ville. Elle peut choisir d’exercer elle-même cette compétence en régie directe ou de l’accorder à un opérateur privé par le biais d’un marché ou d’une délégation de service public. En moyenne, 3 000 tonnes de déchets ont été collectées chaque jour en 2019 sous la responsabilité de la mairie de Paris, qui a fait le choix de confier la collecte dans la moitié des arrondissements à des opérateurs privés.

Si la Ville de Paris a pour obligation de collecter les déchets des particuliers, les professionnels et les associations, quant à eux, sont responsables de l’élimination de leurs déchets. Ils peuvent recourir à un prestataire de leur choix (services de la ville ou entreprise privée).

À Paris, l’organisation de la collecte des déchets des ménages et assimilés relève de la Direction de la propreté et de l’eau (DPE). Les services municipaux assurent en régie directe la collecte dans dix arrondissements : les 2e, 5e, 6e, 8e, 9e, 12e, 14e, 16e, 17e, et 20e. La collecte des dix autres arrondissements est réalisée par des entreprises privées :

  • dans les 1e, 3e, 4e, 7e, la société Derichebourg Polysotis ;

  • dans les 10e et 18e, la société Derichebourg Polyvera ;

  • dans les 11e et 19e, la société Veolia Otalia ;

  • dans le 15e, la société Pizzorno Propolys ;

  • et dans le 13e, la société Urbaser.

Coût budgétaire

Le service public des déchets est financé par l’impôt ou par une redevance. Cette dernière tarification peut être une incitation à la réduction et un tri des déchets. Dans la capitale, le choix a été fait d’un financement par l’impôt, via une taxe d’enlèvement des ordures ménagères (TEOM), qui est prélevée en même temps que la taxe foncière. A Paris, son taux est de 6,21 % en 2019, inchangé depuis 2010, dont le montant s’élève à 479 M€. D’autres recettes viennent s’ajouter pour un montant de 24 M€, soit un total de 503 M€.

On pose l’hypothèse de court terme que la mise en concurrence d’entreprises privées pour réaliser cette mission de service public a pour objectif d’aboutir à un service de meilleure qualité, à coût constant ou à moindre coût, grâce à l’efficience de la gestion du prestataire. C’est en effet ce qui ressort du programme de la candidate qui estime que ce nouveau dispositif permettra même à la ville de faire des économies même si ce n’est pas l’objectif premier avancé. L’équipe de la candidate indique attendre 15 à 20 M€ de d’économies de fonctionnement de la privatisation de la collecte. On peut toutefois retenir qu’à long terme, cette hypothèse n’est pas toujours vérifiée.

En revanche, la gestion en comptabilité analytique des agents de la ville de Paris (“600 à 700 agents” selon la candidate) actuellement chargés de la collecte des ordures ménagères et du nettoyage des rues est amenée à évoluer. En effet, ceux-ci relèveront désormais exclusivement du balayage des rues. Le coût de cette proposition est donc moins lié au changement de prestataire pour la collecte des ordures qu’au coût lié à l’affectation intégrale de ces agents au balayage des rues. Selon l’avis de recrutement des éboueurs publiés par la Ville de Paris, ainsi que l’annonce publiée par Pôle Emploi, la rémunération brute d’un nouvel agent s’effectue sur la base de la grille statutaire des ouvriers qualifiés (P1, P2), soit environ 1 537,02 € brut par mois, soit un brut annuel de l’ordre de 18,5 k€ et un coût total employeur annuel par agent estimé à 22,1 k€. Si on pose que ces agents consacrent 50 % de leur temps à la collecte des ordures et 50 % de leur temps au balayage des rues, c’est 50 % de cette masse salariale qui devra être affectée en comptabilité analytique au balayage des rues. Pour 600 agents, cela représente un coût total de 6,6 M€. Pour 700 agents, cela représente 7,7 M€. Cela représente donc un coût total moyen supplémentaire de 7,1 M€ à verser dans l’enveloppe dédiée au balayage des rues de la ville de Paris. Contactée, l’équipe de la candidate considère que les 700 agents évoqués sont en réalité affectés à 100 % à la collecte des ordures ménagères, d’où un coût estimé à 20 M€.

Cela pose la question du mode de financement de ce service. En application de l’article L. 2333-97 du Code Général des Collectivités Territoriales (CGCT), les communes peuvent, sur délibération du conseil municipal, instituer une taxe de balayage, dont le produit ne peut excéder les dépenses occasionnées par le balayage de la superficie des voies livrées à la circulation publique, telles que constatées dans le dernier compte administratif de la commune. Il ne s’agit pas d’un impôt mais d’une redevance pour service rendu. À Paris, le tarif unitaire institué est de 9,22 €/m². Son produit était en 2017 de 104 M€.

La future équipe municipale aura donc deux possibilités. La première est de financer ce surcoût sans augmentation de cette redevance. C’est ce qu’avait indiqué Pierre-Yves Bournazel, aujourd’hui candidat dans le 18e arrondissement lorsqu’il menait sa propre campagne avant de rejoindre Agnès Buzyn. Il estimait ainsi que les “moyens supplémentaires [alloués] à la propreté seront compensés par le non-remplacement des fonctionnaires”. C’est aussi ce qu’on comprend du programme de la candidate.

La seconde possibilité est de financer ce surcoût de 7,1 M€ par une augmentation de la taxe de balayage. Cela porterait cette taxe à 9,83 € par mètre carré, soit une augmentation de 0,61 € par mètre carré. Ce qui correspond à une progression de 6,6 %.

Effets sur l’environnement

Cette proposition a un impact sur l’environnement puisqu’elle a vocation à permettre de redéployer 600 à 700 agents sur le nettoyage et donc à améliorer le cadre de vie des habitants.

Sources