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Bordeaux

256 045 habitants
Maire sortant Nicolas Florian (LR)
Urbanisme et logement

Rendre la flotte des bennes à ordures propre d’ici à 2026 (la moitié alimentée à l’hydrogène)

Bordeaux, ville autonome en énergie : développer la filière hydrogène pour équiper toute la flotte de transports en commun et les véhicules de collecte des déchets.

 

Coût
ESTIMATION INSTITUT MONTAIGNE
63 M€
ESTIMATION DU CANDIDAT
Estimation
du candidat
non disponible
Détail
HYPOTHÈSE BASSE
50,4 M€
HYPOTHÈSE HAUTE
75,6 M€
Répartition du coût
Cofinancement possible de la commune, la métropole, la Région, l'Etat, l'Europe (possibilité de subvention de fonds climat)
Temporalité
Coût annuel cumulé sur la durée du mandat

Que faut-il en retenir ?

La mesure proposée par le maire sortant de Bordeaux consiste à “verdir” la flotte de bennes à ordures (BOM) de la Métropole de Bordeaux d’ici la fin de son prochain mandat dans le cas d’une réélection. Pour cela, le candidat propose de choisir la technologie hydrogène comme l’ont déjà fait d’autre villes pour leurs services publics. 

Selon nos chiffrages, cette mesure coûterait chaque année entre 8,4 M€ et 12,6 M€, en fonction de l’estimation du prix des bennes à ordures à hydrogène (entre 310 000 € et 500 000 € pièce) ainsi que du prix du carburant (de 6 à 10 €/kg). 

Si l’effet sur les émissions de CO2 est certain (division par 10 des émissions lors de la collecte des déchets), son ampleur reste à modérer en termes d’économie d’émissions mis au regard des coûts. Ce montant pourrait toutefois être financé grâce aux économies substantielles réalisées au travers du nouveau contrat signé pour la valorisation et le traitement de déchet et placerait la ville à l’avant-garde de la collecte verte des déchets. 

L’équipe de campagne du candidat, contactée, aboutit à une estimation inférieure. 

Détail du chiffrage

Contexte de la mesure

A Bordeaux, la collecte des déchets ménagers, une des prérogatives de la Métropole, est réalisée par une régie publique (l’hypercentre bordelais faisant exception, ayant été confié à Suez par la Métropole) tandis que leur valorisation et leur traitement ont fait l’objet d’un contrat de délégation de service public entre Bordeaux Métropole et Veolia le 5 septembre 2019 pour une durée avoisinant huit ans. Ce service est financé en majeure partie par la TEOM (taxe d’enlèvement des ordures ménagères) payée par les propriétaires assujettis à la taxe foncière dont les biens sont situés dans une zone où les déchets ménagers sont collectés, la redevance spéciale (3 % des recettes), la vente de produits recyclables (3 % des recettes) et les subventions versées par l’Etat.

En France, les bennes à ordures ménagères sont le plus souvent gérées par des structures de coopération intercommunale dont certaines se sont déjà engagées dans des opérations de “verdissement” de leur flotte. Ainsi à Courbevoie, la première benne à ordures ménagères électrique est entrée en service en mai 2011. Nicolas Florian veut, quant à lui, privilégier l’hydrogène comme solution technologique pour sa flotte de bennes. Ce choix a été fait par la Métropole de Dijon qui a décidé de constituer une flotte de huit bennes à ordures ménagères (et six véhicules utilitaires légers) roulant à l’hydrogène. La Métropole a pour cela pris la décision de se doter de sa propre unité de production d’hydrogène d’origine renouvelable (par électrolyse de l’eau). Le projet représente un budget total de 6,5 M€ dont une partie (1,8 M€) sera financé par l’ADEME. La Métropole a annoncé vouloir également changer sa flotte de bus pour des véhicules roulant, eux aussi, à l’hydrogène. Une décision partagée par d’autres communes pour ce qui est des transports en commun comme la ville de Pau avec le lancement de Fébus.

La solution hydrogène est particulièrement intéressante car elle n’émet aucun CO2 pourvu que l’hydrogène qu’elle utilise soit fabriqué via électrolyse de l’eau (en effet, celle-ci permet de recourir à de l’électricité d’origine décarbonée à 90 % en France). De plus, les véhicules roulant à l’hydrogène ont à la fois une autonomie plus longue que ceux disposant uniquement d’une batterie électrique, mais aussi une vitesse de rechargement plus rapide. Enfin, les émissions de particules fines et NOx sont fortement réduites. Notons cependant que le réseau hydrogène n’est pas encore très développé, ce qui restreint cette technologie aux flottes captives (comme les bus ou les bennes à ordures) et renchérit la maintenance. Il faut noter qu’une autre solution technologique a été retenue dans des régions comme l’Ile-de-France : les bus à GNV (Gaz Naturel pour Véhicule). Cette solution permet de réduire les émissions de particules fines et NOx également. Cependant, seul le recours à du BioGNV permet de diminuer significativement les émissions CO2 de telles flottes.

Coût budgétaire

Nous formulons l’hypothèse que, pour rendre sa flotte de bennes à ordures propre, Nicolas Florian en convertirait la moitié à l’hydrogène (conformément à son annonce) et qu’il ferait le choix du BioGNV pour le reste de la flotte (comme l’ont fait d’autres villes). De plus, il a été supposé que cette mesure s’appliquerait à l’ensemble de la flotte des 21 communes gérée par la Régie commune, c’est à dire 167 bennes qui assurent la collecte des ordures ménagères résiduelles et la collecte sélective en porte-à-porte.

Le coût des infrastructures s’est basé sur les chiffres trouvés dans la littérature. Ainsi, plusieurs sources concordent pour estimer la valeur des bennes à hydrogène installées à Dijon comme étant supérieure de 150 000 € à celles roulant au gasoil (chiffrées, elles, à 160 000 €), menant à un prix bas de 310 000 €. Cette estimation s’oppose à une fourchette haute à 500 000 € donnée par Symbio lors d’un colloque en 2018. Le coût de la station à hydrogène a été estimé en faisant la moyenne des coûts disponibles pour les stations de Dijon, Pau et du Nord Pas-de-Calais, soit 6 M€. Enfin, c’est le surcoût donné par Suez en 2019 de 40 000 € qui a été utilisé pour calculer le coûts des bennes fonctionnant au BioGNV.

Concernant les consommations par type de benne, la consommation en gasoil a été chiffrée à 68 L/100km en se basant sur des chiffres de l’ADEME, à 80 kg/100km pour le biogaz (Suez, 2019) et à 13 kg/100km pour l’hydrogène en assimilant la consommation d’une benne à celle d’un bus. En prenant une distance moyenne de parcours à 2 000 km par benne par mois grâce à des données d’autres régions, le besoin d’hydrogène a été estimé à 724 kg par jour pour une flotte de 167 bennes ( 167 bennes x 50 % de bennes à hydrogène x 13 kg/100km de consommation x 2 000 km par mois / 30 jours par mois / 100 km = 724 kg de consommation par jour). La station à hydrogène de Pau produisant 500 kg par jour, il a ainsi fallu prévoir un investissement dans 2 stations de production à hydrogène.

Ainsi, la fourniture en équipements seule est estimée entre 11,7 M€ par an en fourchette haute (2 stations à hydrogène x 6 000 000 € pour une station + 167 bennes x 50 % à hydrogène x 500 000 € + 167 bennes x 50 % à BioGNV x 200 000 € = 70,2 M€ répartis sur 6 ans) et 9,1 M€ en fourchette basse.

Le chiffrage fin de cette mesure nécessiterait de prendre en compte plusieurs facteurs qui n’ont pas été retenus dans la méthodologie proposée ci-dessous, en raison de leur caractère trop incertain (notamment le prix de la maintenance des véhicules, le montant de la formation pour les employés responsables de la collecte, la chute du prix des véhicules avec le temps…).

Enfin, les économies ou surcoûts de carburant ont été chiffrées par rapport aux dépenses actuelles de fuel. Pour cela, le coût de l’hydrogène a été estimé entre 6 €/kg (fourchette basse) et 10 €/kg (fourchette haute), celui du BioGNV entre 0,9 €/kg et 1,3 €/kg (coût du GNV rehaussé de 15 % du fait de son origine bio, d’après les données de Suez) et le gasoil à 1,4 €/L. Suivant le prix du kg d’hydrogène,  le carburant est à l’origine : soit d’un surcoût de 738 000 € (= (10 €/kg de coût hydrogène x 13 kg/100 km de consommation – 1,4 €/L de coût de gasoil x 68 L/100 km) x 2000 km par mois parcourus x 12 mois dans une année / 100 km x 167 bennes x 50% à hydrogène), soit d’une économie de 304 000 €. Suivant le même raisonnement, le BioGNV peut être à l’origine d’un surcoût de 161 000€ ou d’une économie de 400 000€.

Ainsi, en ajoutant les fourchettes hautes pour les infrastructures (investissement lissé sur 6 ans) et de consommation du carburant, nous arrivons à un coût complet (estimation haute) de 12,6 M€ par an. En additionnant les estimations basses, le projet coûte 8,4 M€ par an.

L’équipe de campagne nous a indiqué des hypothèses de calcul aboutissant à un coût moindre, du fait d’une diminution des coûts explicable par des éléments techniques (choix de types de stations à hydrogène moins coûteux) ou commerciaux (coût unitaire moindre du fait d’une négociation avec le fournisseur) ou encore par un coût de l’hydrogène correspondant à notre estimation basse. Les estimations de l’équipe de campagne tendraient ainsi davantage vers notre hypothèse basse mais, en l’absence de sources utilisables, les trois hypothèses (basse, haute et moyenne) sont ici conservées. 

Effets sur l’environnement

Les effets sur l’environnement sont multiples :

  • diminution de la pollution sonore grâce aux véhicules à hydrogène qui émettent simplement un sifflement et sont beaucoup moins bruyants que des véhicules à gasoil

  • réduction drastique des émissions de particules fines et autres polluants comme les NOx

  • division par 10 des émissions de CO2 avec les hypothèses d’une réduction des émissions de 80 % par du biogaz (vs gasoil) et de 100 % par de l’hydrogène produit par électrolyse de l’eau.

Sources