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Marine Le Pen
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BIOGRAPHIE

Marine Le Pen est une avocate et femme politique française. Elle est la candidate du Rassemblement national à l’élection présidentielle de 2022.


Née en 1968, elle est diplômée d’une maîtrise de droit et d’un DEA de droit pénal de l’Université Panthéon-Assas. Elle devient avocate au barreau de Paris en 1992. En 1998, elle pilote la création du service juridique du Front national, parti fondé par son père Jean-Marie Le Pen.

Elle est élue conseillère régionale de la région Nord-Pas-de-Calais et occupe ce poste de 1998 à 2004 puis de 2010 à 2015. Elle est également élue conseillère régionale d’Île-de-France entre 2004 et 2010, puis conseillère régionale des Hauts-de-France de 2016 à 2021. Elle est députée de la circonscription du Pas-de-Calais depuis 2017. En 2004, elle est élue députée européenne puis réélue en 2009 et en 2014.

En 2007, elle prend en charge la direction stratégique de la campagne à l’élection présidentielle de Jean-Marie Le Pen  et en 2011, elle lui succède à la direction du parti. Elle se présente à l’élection présidentielle d’abord en 2012, puis en 2017 où elle atteint le second tour face à Emmanuel Macron. En 2018, le Front national devient le Rassemblement national.

En janvier 2020, elle annonce sa candidature à l’élection présidentielle de 2022 et renonce en juillet 2021 à la direction du parti pour se consacrer à sa campagne.
Site de campagne

Renationaliser les concessions d'autoroutes

« Renationaliser les autoroutes pour baisser de 15 % les péages ».

Source : Programme Le Pen 2022

Estimation
Coût en une fois
Par l'Institut Montaigne
40 Md€
Précision
Par la candidate
Neutre si maintien des tarifs, potentiellement négatif si baisse des tarifs.
Faisable.

Chiffrage de l’Institut Montaigne :

  • Coût d’environ 40 Md€ en une fois
  • Recettes annuelles de 3,5 Md€

La renationalisation des autoroutes conduirait à mettre fin de manière anticipée aux contrats de concessions conclus avec les sociétés d’autoroutes ; dont la fin est prévue entre 2031 et 2036 pour les principales concessions. Au regard de la lettre des contrats, le coût devrait compenser l’ensemble des revenus futurs pour les actionnaires et devrait comprendre une reprise de la dette existante. En contrepartie, l’État reprendrait alors ses droits sur les revenus de ces entreprises.

L’impact financier de la mesure est donc triple :

  • L’État pourrait devoir indemniser les sociétés concessionnaires d’autoroutes pour le manque à gagner au titre des années restant à courir sur les contrats. Cette compensation est évaluée entre 39,5 Md€ et 42,1 Md€ selon la méthode retenue.
  • En sens inverse, l’État récupèrera des recettes budgétaires issues des péages, minorées des charges et dépenses d’investissement. Le gain pour l’État serait de l’ordre de 4,5 Md€ par an, à tarifs et structure de charges inchangés. Il serait d’environ 3,5 Md€ si les tarifs sont abaissés de 15 %.
  • Enfin, l’État devra reprendre la dette des sociétés autoroutières, qui s’élève à 31,6 Md€ au 31 décembre 2020. En fonction du taux d’endettement retenu, la charge de la dette pourrait atteindre jusqu’à 0,6 Md€ par an. Par ailleurs, quasiment la moitié de la dette (14,0 Md€) est de maturité courte (moins de 5 ans) et devra donc être remboursée rapidement. De fait, si les tarifs sont diminués, le remboursement de la dette des autoroutes pourrait prendre entre 5 et 10 années supplémentaires.

Cependant, compte tenu du fait d’une part que les revenus de ces entreprises s’apparentent à une rente comme le mentionne de multiples rapports d’institutions indépendantes sur le sujet allant dans le même sens (Cour des comptes, autorité de la concurrence, Sénat….) et d’autre part de la très grande rentabilité passée des coûts d’acquisition pour les actionnaires, la nationalisation de ces entreprises pourrait correspondre à un coût plus limité pour l’État. Ce coût pourrait par exemple être limité aux seules reprises de dette (31,6 Md€ à fin 2020, probablement de l’ordre de 30 Md€ à fin 2021 au regard de la trajectoire de désendettement prévisible d’ici la fin des concessions).

L’impact de cette mesure aura un effet sur la dette publique à hauteur de la dette reprise et de l’indemnisation retenue pour les actionnaires. Cette accroissement de dette pourrait représenter plus de 70 Md€ (soit près de 3 points de PIB).

L’impact sur le déficit public devrait être examiné avec attention compte tenu de la complexité de la mesure. Conformément à la lettre et à l’esprit de l’article 38 des contrats, il est fait l’hypothèse ici que l’opération ne serait qu’une opération en capital / patrimoniale. De ce fait, l’impact sur le déficit serait nul.

Impact macroéconomique / sur le pouvoir d’achat

La Cour des comptes mentionne que les sociétés d’autoroutes surinvestissent vraisemblablement sur leurs réseaux tandis que des sous-investissements importants apparaissent sur le territoire (1). Ces hétérogénéités de financement nuisent à l’allocation la plus optimale des besoins.

(1) Référé n° S2018-4023 du 23 janvier 2019 relatif au plan de relance autoroutier : « dans une logique de relance de l’économie, les plans autoroutiers comprennent de plus en plus des « enveloppes » financières correspondant à une catégorie générique de travaux, dont la consistance exacte n’est précisée que postérieurement à la modification du cahier des charges. On court ainsi le risque d’y inscrire des investissements dont le caractère prioritaire n’est pas avéré, et d’accentuer une forme de surinvestissement sur le réseau concédé qui contraste avec le sous-investissement constaté sur le réseau non concédé« .

NB : Le chiffrage se fonde sur les données 2019, l’année 2020 (dernières données disponibles) n’étant pas représentative du fait de la crise sanitaire. L’essentiel des données provient de l’Autorité de régulation des transports.

État actuel

L’essentiel des revenus (plus de 97 %) provient des péages : en 2019, le chiffre d’affaire des sociétés concessionnaires d’autoroutes s’élevait à 10,8 Md€, dont 10,5 Md€ de recettes de péages. La crise sanitaire a toutefois occasionné une baisse de 17,6 % des produits de péages en 2020 ; ces derniers, évalués hors taxes, atteignant 8,6 Md€ (2). Environ 40 % du montant des péages est constitué d’impôts et taxes (notamment la TVA, à hauteur de 20 %).

La mesure aurait plusieurs impacts :

Compensation aux sociétés d’autoroute du manque à gagner

La plupart des estimations concluent à une compensation comprise entre 20 et 50 Md€. Le 6 mai 2021, lors du débat au Sénat sur les conclusions du rapport d’information de la commission d’enquête sur le contrôle, la régulation et l’évolution des concessions autoroutières, le Secrétaire d’État aux transports a avancé un chiffre de 47 Md€.

La compensation aux sociétés mères des sociétés autoroutières (ces dernières étant détenues à 100 %) peut être calculée à partir des dividendes qui devraient être versés sur la durée de contrat restant à courir (c’est ce mode de calcul qui a été retenu pour la cession des concessions en 2005).

On retient pour le calcul le montant des dividendes versés en 2019, qui sont équivalents à la moyenne des 5 années précédentes (3) :

Dividendes 2019 (M€) Fin du contrat (au 31/12) Dividendes restant à verser au 1/1/2023
SANEF-SAPN 515,9 2031 4 643,1
ASF-ESCOTA 1 173,4 2036 16 427,6
COFIROUTE 586,6 2034 7 039,2
APRR-AREA 751,1 2035 9 772,1
ATLANDES 9,4 2051 282
Viaduc de Millau 22,7 2079 1 293,9
TOTAL 3 059,7 39 457,9

Selon cette formule, la compensation atteindrait donc 39,5 Md€.
À noter que toutes les sociétés d’autoroute ne distribuent pas de dividendes, notamment les plus petites d’entre elles.

Une autre valorisation pourrait prendre en compte les flux de trésorerie futurs générés par l’activité.

En reprenant les données de 2019, ce flux de trésorerie est calculé comme suit :

Chiffre d’affaires (recettes de péages) 10,5 Md€
Charges d’exploitation (entretien, personnel…) 2,8 Md€
EBITDA 7,7 Md€
Dépenses d’investissement  1,7 Md€
EBIT 6,0 Md€
Impôt sur les sociétés (25  %) 1,5 Md€
Flux de trésorerie  4,5 Md€

Pour calculer les flux futurs, il est retenu un taux de croissance de 1,5 %, qui correspond à la moyenne de l’inflation sur la période 2018-2022.

Le taux d’actualisation retenu est égal à la moyenne des coûts moyens pondérés du capital (CMPC) sur la période 2005-2020, soit 4,02 % (4). Si ce taux est supérieur au CMPC constaté sur les 5 dernières années (2,28 %), il reste inférieur au taux retenu par l’État lors de la cession des contrats de concession en 2005 (5,9 %).

Sur une durée moyenne de 12 ans restant à courir, la somme des flux de trésorerie futurs actualisés, qui correspond à la valeur des concessions, est ainsi égale à 46,2 Md€. Dans l’hypothèse où le CMPC se maintiendrait à son niveau actuel, le coût de la compensation dépasserait les 50 Md€.

Gain de recettes pour l’État

En renationalisant les autoroutes, l’État récupèrerait chaque année au budget le montant des péages, minoré des charges (personnel, entretien du réseau et taxes à verser aux autorités locales) et des dépenses d’investissement. La TVA et l’impôt sur les sociétés sont quant à eux neutres pour le budget de l’État.

En se fondant sur les données 2019, le gain annuel pour l’État serait de 6,0 Md€ par an (5) :

Recettes de péage 10,5 Md€
  • Charges (entretien, personnel…)
2,8 Md€
  • Dépenses d’investissement 
1,7 Md€
Flux de cash positif de ces entreprises alors renationalisées 6,0 Md€
  • Impôt sur les sociétés (correspondant à une recette de l’État déjà prise en compte aujourd’hui)
1,5 Md€
Gain budgétaire réel 4,5 Md€

Ce résultat est toutefois calculé à structure de charges constante et à tarifs de péages inchangés. Or, la renationalisation des autoroutes pourrait occasionner une baisse des tarifs. Dans le cas d’une baisse de 15 % de ces derniers comme évoqué par la candidate, le gain de recettes de l’État serait de 3,8 Md€ par an (les charges étant considérées comme fixes). L’État perdrait alors par ailleurs d’autres ressources fiscales (TVA, redevances…) à hauteur de 0,7 Md€.

Endettement supplémentaire

L’État devrait en outre reprendre la dette des sociétés d’autoroute, qui s’élève à 31,6 Md€ à fin 2020 (6). En principe, cet endettement devrait avoir en grande disparu au moment de la fin des contrats de concession. De fait, une diminution des tarifs diminuerait les revenus accumulés pour rembourser la dette et conduirait donc mécaniquement à faire reculer l’échéance de remboursement de la dette des autoroutes de 5 à 10 ans (7).

Par ailleurs, une partie de cette dette est de maturité courte et devrait faire l’objet d’un remboursement rapide : 14,0 Md€ de dette (42,1 % de la dette globale) dont la maturité est inférieure à 5 ans. Le secteur a ainsi dû rembourser 2,8 Md€ en 2021 et devra rembourser 11,2 Md€ entre 2022 et 2026.

Cet endettement viendrait augmenter la charge de la dette de l’État, de façon plus ou moins significative suivant le taux :

  • Si l’endettement est maintenu au coût moyen de la dette des sociétés d’autoroute (2,1 %), la charge annuelle s’élèverait à 2,1 % * (31,6-2,8) soit 0,6 Md€ pour les premières années (l’encours diminuant après 2026), en ôtant la dette remboursée à fin 2021 ;
  • Si on considère que l’État refinance cette dette à ses conditions habituelles (taux négatifs sur les titres d’État de maturité inférieure à 10 ans ; 0,7 % à 20 ans(8)), le surcoût de la dette serait quasiment nul.

Une diminution de 15 % des tarifs conduirait vraisemblablement à des rémissions de dettes dans les années à venir afin d’étaler les échéances de remboursement. Ce rééchelonnement de la dette pourrait nécessiter, afin de limiter son coût, que l’État accorde sa garantie à cette opération.

Impact en comptabilité nationale

L’impact de cette mesure aura un effet sur la dette publique à hauteur de la dette reprise et de l’indemnisation retenue pour les actionnaires. Cette accroissement de dette pourrait représenter soit 30 Md€ – dans l’hypothèse d’une seule reprise des dettes passées comme compensation de cette renationalisation – à plus de 70 Md€ (soit près de 3 points de PIB) – si l’on retient l’hypothèse d’un respect de la lettre des contrats.

L’impact sur le déficit public devrait être examiné avec attention compte tenu de la complexité de la mesure. Conformément à la lettre et à l’esprit de l’article 38 des contrats, il est fait l’hypothèse ici que l’opération ne serait qu’une opération en capital / patrimoniale. En effet, en comptabilité nationale (comme dans la plupart des systèmes comptables), les opérations de nature purement patrimoniale sont neutres. Or ce sont les décisions à caractère juridique qui arrêtent ce qu’est la neutralité patrimoniale. Ainsi, la décision juridique conduisant à définir le degré de compensation de cette renationalisation caractériserait la neutralité patrimoniale de l’opération. De ce fait, l’impact sur le déficit serait vraisemblablement nul.

Le rapport déposé le 16 septembre 2020 par la commission d’enquête « Concessions autoroutières » (9)du Sénat relève la difficulté d’estimer la valeur du patrimoine autoroutier devant revenir à l’État à l’issue des contrats de concession. En effet, contrairement à ce qui était prévu dans les contrats de concession, aucun inventaire n’a été réalisé.

Le rapport du Sénat préconise de réaliser ce travail au plus tôt et de distinguer entre biens de retour (qui reviennent de plein droit et gratuitement à l’autorité concédante à l’expiration de la concession, soit les terrains, bâtiments, ouvrages, installations et objets mobiliers nécessaires à l’exploitation de la concession), les biens de reprise (qui peuvent éventuellement être repris par l’État en fin de concession si celui-ci estime qu’ils sont utiles à l’exploitation de la concession ; la reprise étant assortie d’un droit à compensation) et les biens propres (qui appartiennent à la société concessionnaire et n’ont pas à être remis au concédant).

Historique de la mesure

Dans le cadre d’une stratégie de désendettement de l’État, le gouvernement a décidé de privatiser les sociétés concessionnaires d’autoroutes historiques en 2006. Cette privatisation avait été précédée par l’ouverture du capital des trois groupes autoroutiers aux investisseurs privés, entre 2002 et 2005. La vente de ses participations dans le capital des sociétés d’autoroute a permis à l’État de dégager 14,8 Md€. Dans le rapport public annuel de 2009 (10), la Cour des Comptes estimait que ce prix était trop bas, évaluant plutôt la valeur de ces participations à 24 Md€.

Les concessions ont par la suite été prolongées en échange de l’engagement des sociétés concessionnaires de prendre en charge de nouveaux investissements non prévus dans les contrats initiaux. Ces investissements ont été réalisés dans le cadre du « paquet vert », du plan de relance autoroutier (3,2 Md€) de 2015 et, plus récemment, du PIA. Dans un référé de 2019, la Cour des Comptes émettait des réserves sur cette formule, notant que la succession rapide et régulière de plans « comporte l’inconvénient de repousser sans cesse, par des allongements à répétition, la remise en concurrence des concessions« . Elle relève également que le financement de travaux à une échéance lointaine fait supporter un coût à l’usager futur et peut occasionner un renchérissement des tarifs. Cette formule s’avère également très favorable aux concessionnaires : si le plan de relance autoroutier leur a coûté 3,2 Md€, l’allongement de leurs concessions devrait leur rapporter une quinzaine de milliards d’euros de recettes supplémentaires.

Benchmark

Les deux principaux cadres possibles de gestion des autoroutes sont la gestion publique en régie (par une entreprise publique) et la gestion par un partenaire privé dans le cadre d’un contrat de concession. Plusieurs modèles de gestion des autoroutes coexistent en Europe, comme le montre le tableau ci-dessous, extrait d’une étude réalisée à la demande de l’Autorité de régulation des transports (ART) par le cabinet Norton Rose Fulbright.

Gestion par une entreprise publique / marchés publics Concessions avec paiement des usagers PPP avec paiements par une entité publique
France Oui Oui
Italie Oui Oui
Allemagne Oui Oui
Royaume-Uni Oui Oui
Espagne Oui Oui
Portugal Oui Oui

En pratique, ces 3 de modalités de gestion diffèrent :

La gestion par une entreprise publique fait porter à l’État in fine les différents gains et coûts de l’opération. En France, cette modalité n’est aujourd’hui que peu utilisée, mais correspond globalement à la modalité de gestion retenue avant la privatisation des sociétés d’autoroute.

La gestion par PPP (partenariat public privé), dont les modalités sont très variables, en fonction du contrat, mais qui correspondent souvent à la prise en charge par l’État du risque de fréquentation des infrastructures et qui correspondent donc globalement à une modalité de financement et de réalisation de travaux publics.

La gestion par voie de concession, qui délègue aux délégataires l’ensemble des risques, qu’ils soient financiers, de travaux ou de fréquentation.

Le rapport note que, quelques années avant la France (de 1997 à 2003), l’Italie, le Portugal et l’Espagne ont aussi privatisé une partie de leurs concessions autoroutières. Dans ces trois cas, des réformes importantes ont eu lieu au cours des années 2010, notamment suite à la crise financière (liquidation des sociétés en Espagne, renégociation lourde des contrats de concession au Portugal sous contrainte conjointe FMI-BCE-Commission, mise en place d’une autorité de régulation en Italie et au Portugal…). À l’inverse, au Royaume-Uni et en Allemagne, l’orientation des politiques autoroutières s’est plutôt fait à la faveur d’une centralisation des compétences au profit d’une entité publique nationale unique, dont l’objet est notamment de concevoir une politique d’investissement à long terme.

Mise en œuvre

Au regard de la lettre des contrats, en leur article 38 (11), les possibilités de rachat par l’État sont larges : « l‘État pourra, dans un motif d’intérêt général, racheter la concession par arrêté conjoint du ministre chargé de la voirie nationale, du ministre chargé de l’économie et du ministre chargé du budget. Ce rachat ne pourra s’exécuter qu’au 1er janvier de chaque année, moyennant un préavis d’un an dûment notifié à la société concessionnaire ». Mais le deuxième aliéna de ces articles 38 précise les modalités de calculs de l’indemnisation en cas de reprise par l’État du contrat de concession (12).

La résiliation anticipée des contrats de concession pose deux questions du point de vue de l’État :

  • S’agissant du droit de propriété des entreprises concessionnaires, la nationalisation est possible car l’État peut faire valoir des raisons d’intérêt général à la nationalisation. Cette dernière peut notamment être justifiée par le déséquilibre manifeste des contrats au bénéfice des sociétés concessionnaires : dès 2014, l’Autorité de la concurrence alertait sur le fait que la « rentabilité nette exceptionnelle » des sociétés concessionnaires « n’apparaît justifiée ni par leurs coûts ni par les risques auxquels elles sont exposées« . Par ailleurs, les contrats de concession eux-mêmes comportent une clause rappelant cette faculté de résiliation unilatérale par l’État, laquelle existe pour tout contrat liant une administration à une entreprise et portant sur un service public.
  • Cette renationalisation devrait donner lieu à indemnisation des sociétés concessionnaires, comme l’a rappelé le Conseil Constitutionnel (13) dans sa décision relative à la loi de nationalisation du 11 février 1982 (14).

Toutefois, certains considèrent que la nationalisation pourrait se faire à indemnisation nulle pour les sociétés concessionnaires, au nom de la règle constitutionnelle qui interdit aux personnes publiques de consentir des libéralités : les bénéfices engrangés par les sociétés concessionnaires depuis le début des années 2000 seraient à ce point importants qu’il n’y aurait pas de nécessité à indemniser. L’avis n° 389520 rendu le 5 février 2015 par la section des travaux publics du Conseil d’État relatif aux marges dont dispose l’État pour assurer une meilleure prise en compte de l’intérêt public dans l’équilibre des concessions autoroutières indique en effet, à propos d’une résiliation anticipée de ces concessions, que « si les investissements étaient amortis et si aucun manque à gagner n’était constaté, une indemnisation ne serait pas nécessaire« .

(2) Autorité de Régulation des Transports, Synthèse des comptes des concessions autoroutières.

(3) Autorité de Régulation des Transports, Synthèse des comptes des concessions autoroutières, page 44 pour l’ensemble des dividendes et tableaux par entreprise en fin de document.

(4) Rapport de la commission d’enquête du Sénat précité.

(5) Par analogie avec la comptabilité budgétaire, on retient les flux de trésorerie potentiels générés par l’activité (EBITDA) et non le résultat comptable.

(6) Autorité de régulation des Transports, précité.

(7) Estimation rapide liée à la diminution de l’ordre d’un tiers des résultats (post-charges courante) consécutifs à la diminution de 15 % des tarifs et donc d’un relèvement de l’ordre d’un tiers de l’échéance de remboursement de la dette.

(8) Agence France Trésor.

(9) Concessions autoroutières : des profits futurs à partager équitablement avec l’État et les usagers.

(10) Cour des Comptes, Rapport public annuel 2009, p. 202, chapitre « L’AFITF : une agence de financement aux ambitions limitées, privée de ses moyens, désormais inutile », page 297.

(11) Cf. notamment la liste des contrats sur le site du ministère.

(12) « En cas de rachat, la société concessionnaire aura droit à une indemnité correspondant au préjudice subi par elle du fait de la résiliation et dont le montant net d’impôt dû au titre de sa perception et après prise en compte de toutes charges déductibles sera égal à la juste valeur de la concession reprise, estimée selon la méthode d’actualisation des flux de trésorerie disponibles, ces derniers étant pris après impôts« .

(13) Décision n° 81−132 DC du 16 janvier 1982.

(14) Loi n° 82-155 du 11 février 1982 de nationalisation.

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