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BIOGRAPHIE

Réserver le bénéfice du RSA et des prestations de solidarités aux étrangers ayant travaillé au moins 5 ans en France

Rassemblement National

Marine Le Pen propose de réserver le bénéfice du RSA et des prestations de solidarités aux étrangers ayant au moins 5 ans d‘équivalent temps plein travaillé en France. Selon la candidate, cette mesure serait susceptible de générer 21,9 Md€ d’économie sur la durée du quinquennat.

Source : Le Figaro

Estimation
Économie par an
Par l'Institut Montaigne
2,5 Md€
0,6 Md€ estimation basse
2,6 Md€ estimation haute
Précision
Par Rassemblement National
5,4 Md€
Forte complexité juridique, politique et diplomatique.

Selon les calculs de l’Institut Montaigne, les économies estimées de cette mesure sont surévaluées. Les économies associées à la mise en œuvre de la mesure se situent entre 2 et 10 Md€ sur la durée du quinquennat, correspondant à un montant de 0,6 Md€ à 2,6 Md€ par an. L’économie médiane s’établirait à 2,5 Md€.

La mise en œuvre de cette mesure sera d’une grande complexité juridique, politique et diplomatique. En effet, cette mesure s’oppose à des principes d’égalité de traitement entre nationaux et étrangers s’agissant des droits sociaux consacrés par le Conseil constitutionnel et plusieurs textes internationaux tels que la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

Pour cette raison, la candidate envisage de soumettre un projet de loi mêlant dispositions constitutionnelles et législatives au référendum. Face au risque contentieux, il apparaît également que l’application de cette mesure passerait par la dénonciation de conventions internationales avec un impact politique et diplomatique fort.

Commentaires de l’équipe de campagne

Cette proposition de Marine Le Pen a été chiffrée dans le cadre de l’opération Présidentielle 2022. A cet égard, l’équipe de campagne avait expliqué ne pas partager l’hypothèse retenue de 45 % des étrangers rendus inéligibles. Elle estime au contraire que presque tous les étrangers seraient rendus inéligibles. ce qui augmenterait de près du double les économies potentielles générées par une telle mesure.

En effet, selon l’équipe de campagne, l’économie réalisée par une telle mesure est estimée à 21,9 Md€ sur le quinquennat, soit 5,38 Md€ par an. Le chiffrage de la candidate a été établi sur 4 années pour tenir compte d’un délai de mise en œuvre estimé à une année.

Impact macroéconomique / sur le pouvoir d’achat

Bien qu’il soit difficile d’estimer l’impact macroéconomique du retrait du RSA et des prestations de solidarités aux étrangers ayant moins de 5 ans d‘équivalent temps plein travaillé en France, il est possible que ce retrait ait un léger impact économique négatif sur la consommation. En effet, les étrangers concernés se situent dans les tranches de revenu les plus basses au sein desquelles la part d’épargne est faible.

Pour estimer le montant dont bénéficient les étrangers en France pour ces prestations sociales, l’Institut Montaigne s’appuie sur :

  • Le montant total de la dépense consacré à ces allocations et du nombre global d’allocataires publié par la CNAF (1);
  • Une estimation du nombre d’allocataires d’étrangers, basée sur le nombre d’immigrés en France et leur niveau de vie moyen.

Le recensement relève 5,1 millions d’étrangers en France (y compris les étrangers européens), soit 7,6% de la population. La décomposition du revenu des ménages de l’ensemble de la population et des immigrés par l’Insee montre que les prestations sociales représentent une part plus importante des niveaux de vie des immigrés : 2 380€ par contre 1 550€ pour l’ensemble de la population soit 54 % de plus. Une proportion d’aides de 50 % supérieure à celle de l’ensemble de la population constitue donc une hypothèse robuste pour le chiffrage.

Au total, la part des allocations versée à la population étrangère en France peut être estimée à 7,6 %, majoré de 50 % (soit 11,4 %).

Montant total de l’allocation (en M€) Nombre total d’allocataires Nombre d’allocataires étrangers avec : 7,6 % x 1,5 Montant des allocations pour les étrangers avec : 7,6 % x 1,5 Estimation médiane de l’économie (en M€) : 45 % des étrangers rendus inéligibles Estimation basse de l’économie (en M€) : 10 % des étrangers rendus inéligibles
RSA 11 784 1 866 340 212 763 1 343 604 134
Prime d’activité 9 950 4 385 700 499 970 1 134 510 113
AAH 11 241 1 136 846 129 600 1 281 577 128
Aides au logement 16 618 6 171 957 703 603 1 894 852 189
Économie : 2 544 565

Source : Institut Montaigne

Pour estimer le montant de l’économie, il convient d’estimer le nombre d’étrangers concernés par la proposition de Marine Le Pen. En effet, les allocations seraient réservées à ceux ayant au moins 5 ans d’équivalent temps plein travaillé en France.

Le nombre d’étrangers réunissant cette condition n’est pas public. Il peut être fait l’hypothèse que la mesure ne s’appliquerait qu’à un nombre d’étrangers correspondant à la part inactive ou en situation de chômage de cette population (45 %). Il s’agit d’une hypothèse médiane, car certains actifs ne seront pas effectivement éligibles à cette allocation (en raison d’une période de travail trop brève), tandis que certains retraités et chômeurs resteront éligibles s’ils ont atteint la durée de cotisation. Selon cette hypothèse, l’économie médiane serait donc de 2,5 Md€ par an.

Pour le nombre d’allocataires étrangers bénéficiant du RSA, le nombre de 232 000 issu d’une proposition de loi déposée en juin 2020 sera utilisé.

Une hypothèse basse du gain peut être évaluée à 0,57 Md€ par an. En effet, compte tenu des principes de non rétroactivité et de droits acquis, la mesure ne s’appliquera vraisemblablement qu’aux nouveaux entrants (2). Il convient donc de retenir le nombre de nouveaux titres de séjour délivrés chaque année par rapport au nombre de titres de séjour valide soit environ 10 %.

Enfin, une estimation légèrement supérieure à l’estimation médiane peut être considérée en prenant un nombre d’allocataires étrangers bénéficiant au RSA plus élevé. Cette variante conduirait à une estimation haute d’économie de 2,6 Md€ par an au total.

Historique de la proposition

Cette proposition rejoint une proposition de loi du groupe Les Républicains de juin 2020.

La proposition à l’étranger

La candidate revendique une paternité, non démontrée, entre sa proposition et le mécanisme de la « Green Card » à l’américaine.

Mise en œuvre

La candidate propose de recourir au référendum prévu par l’article 11 de la Constitution de la Vème République pour mettre en œuvre ses réformes concernant l’immigration par un projet de loi global comprenant des dispositions constitutionnelles et législatives. Elle estime ainsi que cette méthode offrira un bouclier juridique permettant aux juges français d’écarter toute règle de droit international ou communautaire qui lui serait contraire.

Si l’article 11 de la Constitution a été utilisé à deux reprises, 1962 et 1969, pour modifier la Constitution, les constitutionnalistes estiment que la révision de la Constitution doit être réalisée selon la procédure idoine prévue par l’article 89. Si le Conseil constitutionnel s’était déclaré incompétent en 1962 pour connaître des projets de loi adoptés par référendum, l’office du juge a évolué depuis cette période. Ainsi, un recours en annulation du décret soumettant au référendum pourrait aboutir à forcer la candidate à utiliser l’article 89 de la Constitution, plus contraignant.

La dénonciation de certains textes internationaux, tels que la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (CEDH) mais également des traités bilatéraux pourrait tout de même être nécessaire (3). En effet, si le juge français peut écarter certaines normes internationales, le juge européen continuera d’en faire application et pourrait alors condamner la France.

(1) Sauf pour la prime d’activité pour laquelle le chiffre provient des documents budgétaires de l’État.

(2) À titre d’exemple, il convient de rappeler que RSA est versé sans limitation de durée tant que les ressources du foyer ne dépassent pas un seuil réglementaire.

(3) Exemples : convention avec le Mali (voir CCAS, 30 septembre 2014, n°130157) ou avec le Sénégal (voir CCAS, 30 septembre 2014, n°130156).

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