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BIOGRAPHIE

Bloquer les prix des produits de première nécessité

Nouvelle Union Populaire Écologique et Sociale (LFI-PCF-PS-EELV)

« Le gouvernement publie un décret pour bloquer les prix des biens de première nécessité, sur tout le territoire, y compris les territoires ultra-marins ».

Source : Programme Mélenchon 2022

Estimation
Coût par an
Par l'Institut Montaigne
20 Md€
18 Md€ estimation basse
31 Md€ estimation haute
Précision
Par Nouvelle Union Populaire Écologique et Sociale (LFI-PCF-PS-EELV)
Négatif.
Risque d’illégalité en cas de recours à un décret et de non compatibilité avec les règles de l’UE ; risque de contentieux des entreprises de l’énergie en cas de suppression des compensations actuelles.

La mesure consisterait à bloquer les prix de nombreux produits. La mesure n’étant pas compensée pour les producteurs ou les distributeurs, elle serait neutre pour les finances publiques. Cependant, dans ces conditions, elle risque d’être contre-productive en aggravant le déséquilibre entre offre et demande à l’origine de l’inflation.

En outre, sur le marché de l’énergie le dispositif spécifique de régulation en vigueur prévoit aujourd’hui une compensation du blocage ou de la régulation des prix. Le coût budgétaire estimé au total pour 2022 est compris entre 18 et 31 Md€. L’estimation médiane du coût potentiel d’une telle mesure pour les finances publiques est de l’ordre de 20 Md€/an.

Impact macroéconomique / sur le pouvoir d’achat

Du côté de l’offre, les producteurs nationaux pourraient réduire leur production afin de réduire leurs pertes. Les producteurs étrangers pourraient réorienter leur offre vers d’autres pays, de même pour les distributeurs ayant un réseau international.

Du côté de la demande, en l’absence de signal-prix, les consommateurs risquent de ne pas modifier substantiellement leur comportement, maintenant les quantités demandées et différant l’investissement dans des mesures d’efficacité énergétique ou d’autonomie.

En outre, la mesure n’étant pas ciblée, elle bénéficiera aux ménages à proportion de leur niveau de consommation, d’où un gain plus élevé pour les ménages les plus aisés que pour les ménages les plus pauvres. L’étude du cabinet Asterès (mai 2022) estime que le gain pour les 10 % des ménages les plus riches serait de 821€ par an mais de seulement 368€ pour les 10 % des ménages les plus modestes. Une mesure plus ciblée sur les ménages les plus modestes, via la fiscalité ou un chèque alimentaire, serait plus efficiente.

Le maintien du niveau de consommation, notamment d’énergies fossiles, combiné à l’absence d’incitation à investir dans l’efficacité énergétique, aura un impact environnemental négatif.

La mesure dans le détail :

Produits à prix bloqué Niveau
Panier de 5 fruits et légumes décidé en concertation avec les producteurs
Série de biens de consommations courantes dont les prix ont augmenté (pâtes, maïs, habillement) décidé en concertation avec les producteurs
Tarifs réglementés du gaz Ramenés au niveau de 2017 (en-dessous de 0,0735€ le kWh en base et base 0, en-dessous de 0,0524€ le kWh au niveau maximum de B1 et B2i) 
Tarifs réglementés de l’électricité Ramenés au niveau de début 2021 (en-dessous de 0,17€ le KWh maximal)
Prix du carburant Bloqué au niveau de début 2021 (1,3€ pour le gazole, 1,4€ pour le Super 95).

Une subvention à l’achat de carburant a été mise en place au 1er avril, pour quatre mois. Le coût pour le budget de l’État est estimé à 3 Md€.

Les tarifs réglementés du gaz sont bloqués depuis octobre 2021. Ce blocage fait l’objet d’une compensation pour les fournisseurs. Le coût de cette dernière pour le budget de l’État est évalué à 10 Md€ du 1er novembre 2021 au 31 décembre 2022.

Le plafonnement de la hausse des tarifs de l’électricité par les arrêtés du 31 janvier 2022 représente un coût direct pour le budget de l’État de 8 Md€ en pertes de recettes fiscales du fait de l’abaissement, à son plancher européen, de la taxe intérieure sur la consommation finale d’électricité (TICFE). De plus, la loi de finances pour 2022 prévoit que tous les fournisseurs bénéficient d’une compensation en 2022 par l’État des charges qu’induisent pour eux le plafonnement des prix, à concurrence de l’effet du plafonnement appliqué aux tarifs réglementés.

En janvier 2022, le Gouvernement a décidé l’augmentation du volume d’accès régulé à l’électricité nucléaire historique (Arenh) qui sera livré en 2022. Cette mesure permet de faire baisser les prix des concurrents d’EDF mais représente un coût pour cette entreprise. Ce dernier est estimé à 10 Md€ en 2022. Le 12 mai 2022, le président-directeur général d’EDF a adressé un recours gracieux contre cette décision, ouvrant la voie à un éventuel recours contentieux, qui pourrait avoir des conséquences sur le budget de l’État. À court terme, le budget de l’État a déjà été mis à contribution à travers une augmentation du capital d’EDF de 2,5 Md€ décidée en février 2022. Même si cette décision n’est pas spécifiquement liée à l’augmentation du volume d’accès régulé à l’électricité nucléaire, cette dernière a aggravé la situation financière d’EDF.

Mesure  Coût potentiel pour les finances publiques au titre de l’année 2022 (Md€)
Subvention à l’achat de carburant 3
Blocage du tarif du gaz 10
Baisse de la taxe sur la consommation d’électricité 8
Augmentation du volume d’électricité nucléaire pour les concurrents d’EDF 10
Total 31

La mesure de blocage des prix proposée par la Nouvelle Union populaire écologique et sociale (NUPES) ne semble pas intégrer de coût pour le budget de l’État du fait du blocage des prix. Toutefois, au moins dans le secteur de l’énergie, le maintien de certains dispositifs en vigueur durant toute l’année 2022 aura bien un coût sauf à les modifier par la loi. Dans ce cas, si les compensations aux producteurs et distributeurs d’énergies étaient supprimées, on ne peut écarter le risque d’un contentieux contre l’État visant à maintenir ces compensations ou de perturbations dans l’offre. De plus, l’État détenant 84 % du capital d’EDF, toute mesure de blocage des prix en dessous de ses coûts de production ou d’acquisition d’énergie diminue la valeur d’un actif parapublic et augmente le besoin de recapitalisation qui pèsera sur les finances publiques.

En dehors de l’énergie, le blocage des prix se ferait en imposant un prix plafond tout en garantissant un prix plancher pour les producteurs, finançant la mesure par une réduction des marges des distributeurs. À court terme, cette intervention pourrait se faire sans coût pour les finances publiques. À moyen terme, si l’État ne compense pas les pertes des producteurs et des distributeurs, une réduction des quantités produites et distribuées est à craindre.

Historique de la mesure

Dérogation à la liberté des prix en cas de crise :

L’article L.210-2 du code de commerce prévoit que « dans les secteurs ou les zones où la concurrence par les prix est limitée en raison soit de situations de monopole ou de difficultés durables d’approvisionnement, soit de dispositions législatives ou réglementaires, un décret en Conseil d’État peut réglementer les prix après consultation de l’Autorité de la concurrence. […] Il précise sa durée de validité qui ne peut excéder six mois« . Cette disposition a été utilisée lors de la crise du Covid-19 sur une liste très circonscrite de produits (gel hydroalcoolique et masques) et limitée dans le temps (mars 2020 – juin 2021). Sur les 21 386 établissements contrôlés par la DGCCRF, 3 609 présentaient une anomalie dans la mise en œuvre de la réglementation, soit 17 %.

Bouclier qualité prix outre-mer :

Outre-mer, l’article L.410-5 du code de commerce institue la négociation annuelle d’un accord de modération du prix global d’une liste de produits de consommation courante. Il est issu de la loi du 20 novembre 2012 relative à la régulation économique outre-mer et portant diverses dispositions relatives aux outre-mer. Si le dispositif est reconduit chaque année depuis 2013, les produits les plus souvent en rupture de stock ont dû être retirés de la liste des produits concernés. La liste des produits ajoutés s’allonge d’année en année au point d’inclure des produits transformés et souvent importés très spécifiques dont le caractère de première nécessité n’est pas toujours parfaitement évident (1).

Benchmark

Au Royaume-Uni, le Gouvernement a engagé en mars 2022 une faible baisse des taxes sur l’essence de 5 pence par litre (6 centimes d’euro), décidée en mars 2022. En Espagne, le gouvernement a accordé fin mars 2022 une remise de 20 centimes sur chaque litre de carburant jusqu’au 30 juin. Elle sera financée à hauteur de 15 centimes d’euros par l’État et de 5 centimes par les compagnies pétrolières. En Allemagne, en 2022, la taxe sur les carburants est réduite pendant trois mois de 30 centimes par litre pour l’essence et de 14 centimes par litre pour le diesel.

En France, la subvention à la consommation de carburant, décidée en mars 2022, est de 15 centimes par litre, durant quatre mois.

Mise en œuvre

La mesure supposerait une loi, la base légale actuelle risquant d’être insuffisante pour permettre la mise en œuvre d’un dispositif aussi important. La précédente utilisation de l’actuel article L.210-2 du code de commerce était plus ciblée, elle concernait le prix des masques et du gel hydroalcoolique durant la crise du Covid-19, entre mars 2020 et juin 2021.

Le Conseil d’État estime que « ces mesures portent ponctuellement atteinte à la liberté d’entreprendre. Mais elles restent légales, car elles respectent un certain nombre de conditions : elles sont limitées dans le temps, circonscrites à une catégorie précise de produits et, surtout, proportionnées à la gravité de la situation« .

Une telle mesure pourrait se heurter aux traités relatifs à l’Union européenne. Elle devrait faire au préalable l’objet d’une discussion avec la Commission européenne afin de déterminer si son impact sur la concurrence et le marché intérieur sont compatibles avec les règles de l’Union européenne.

La mise en place d’une telle mesure supposerait des contrôles. Ces derniers seraient du ressort de la DGCCRF, administration dont la baisse des effectifs a été importante au cours des dix dernières années. La capacité de l’administration à mener des contrôles dans les nombreuses entreprises concernées par la mesure n’est pas assurée, en tout cas à court terme.

(1) Ainsi, pour l’île de la Réunion : frites, glaces en cône, cassoulet, sauce d’huître, …

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