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BIOGRAPHIE

Faire du RSA un revenu d'activité et le conditionner à 15 à 20 heures d'activité par semaine en vue d'une insertion professionnelle

Ensemble ! (Majorité présidentielle)

« Il y aura dans cette réforme l’obligation de consacrer 15 à 20 heures par semaine pour une activité permettant d’aller vers l’insertion professionnelle, soit de formation en insertion soit d’emploi »

Source : BFM TV

Estimation
Coût par an
Par l'Institut Montaigne
2 Md€
1,5 Md€ estimation basse
2,6 Md€ estimation haute
Précision
Par Ensemble ! (Majorité présidentielle)
Cette réforme suppose une modification du code de l'action sociale et des familles.

Cette proposition d’Emmanuel Macron a été chiffrée dans le cadre de l’opération Présidentielle 2022 et est incluse dans le programme d’Ensemble ! pour les législatives de 2022.

Cette réforme vient conditionner l’attribution du revenu de solidarité active à la réalisation d’un parcours d’insertion, en y consacrant 15 à 20 heures par semaine. À l’instar du contrat engagement jeunesse, ce parcours pourrait comprendre un bilan personnalisé, des immersions en entreprise, de la formation professionnelle, etc (1). Les acteurs de la politique d’insertion (Pôle Emploi, missions locales, etc.) seraient en charge de la mise en œuvre opérationnelle.

La réforme du RSA proposée par Emmanuel Macron conduirait à accroître les dépenses d’insertion que ce soit au travers de l’augmentation des besoins des structures d’insertion (missions locales, etc.) ou des actions à financer (formation, immersion, etc.).

Cette proposition de réforme du RSA est fortement inspirée du contrat engagement jeunesse, notamment dans les formes que doivent prendre les 15 à 20 heures d’activités hebdomadaires. On fait donc l’hypothèse que les dépenses d’insertion par allocataire du RSA s’alignent sur ceux prévus pour les jeunes engagés en CEJ.

Toutefois, l’ensemble des allocataires du RSA n’a pas vocation à participer à un tel parcours d’insertion. En premier lieu certains allocataires travaillent, et en second lieu certains allocataires ne sont pas dans la situation de s’engager dans un tel parcours d’insertion. Elisabeth Borne a ainsi expliqué que le dispositif ne concernera pas « les personnes qui font face à de graves problèmes de santé ou d’addiction, à des problèmes psychiques, à des difficultés de garde d’enfants » (2).

Le chiffrage de la mesure est entouré d’incertitudes : le coût pourrait être plus élevé si le recours au RSA était accru, plus faible si les mécanismes contraignants poussaient des personnes éligibles à y renoncer. L’impact sur l’employabilité s’apprécie sur la durée.

Impact macroéconomique

Si le revenu de solidarité active remplit son rôle en matière de lutte contre la très grande pauvreté, il ne contribue que très peu à l’insertion professionnelle des bénéficiaires. Seuls 34 % des bénéficiaires sont sortis du RSA en emploi au bout d’une période de 7 ans, selon une analyse de la Cour des comptes portant sur une cohorte de nouveaux entrants au RSA (3). En conséquence, l’ancienneté des bénéficiaires dans le dispositif est élevée : 36 % d’entre eux sont au RSA depuis plus de 5 ans.

Le renforcement de l’accompagnement vise à activer les dépenses sociales en mettant en place des actions d’insertion susceptibles d’accroître l’employabilité des bénéficiaires. La réforme est donc susceptible de réduire le taux de chômage et son halo (certains bénéficiaires du RSA ont renoncé à chercher un emploi et ne sont donc pas comptabilisés dans les chiffres du chômage), même si cet effet mettra sans doute du temps à se manifester. À terme, l’accroissement du taux d’emploi, le cas échéant, contribuerait positivement à la consommation et à la croissance, et à l’équilibre des comptes publics.

Dans un scénario moins favorable, si les conditions posées à l’attribution du RSA poussaient des personnes éligibles à y renoncer, la mesure pourrait contribuer à augmenter le taux de pauvreté.

(1) Nouvel Obs, Élisabeth Borne précise le projet RSA du candidat Macron

(2) Le Monde, « Des formations ou des immersions en entreprise » : Élisabeth Borne précise la proposition d’Emmanuel Macron sur les contreparties au RSA

(3) Cour des comptes, Le revenu de solidarité active

Le coût de ce RSA réformé dépend :

  • de l’allocation versée aux bénéficiaires ;
  • du coût de l’accompagnement ;
  • du nombre d’allocataires (en distinguant ceux qui seront exemptés de l’obligation de consacrer 15 à 20 heures par semaine à des activités d’insertion).

L’allocation :
Le candidat ne propose pas de faire évoluer le montant de l’allocation. En l’absence d’enfant à charge, il restera donc de 565 euros pour une personne seule et de 848 euros pour un couple. En 2019, les versements monétaires ont représenté 12,5 milliards d’euros sur un total de 15 milliards de dépense de RSA (soit 80%).

L’accompagnement des bénéficiaires :
Le revenu de solidarité active n’est aujourd’hui que relativement peu accompagné d’actions destinées à accroître l’employabilité des bénéficiaires et à favoriser leur insertion. Il est bien prévu que le Département conclut un contrat d’engagement réciproque avec chaque bénéficiaire et qu’il l’oriente vers un accompagnement professionnel ou social. Mais la Cour des comptes relève dans son rapport sur le RSA que les délais d’orientation sont longs, que la contractualisation n’est que partielle et que l’intensité de l’accompagnement est faible (moins de 4 entretiens par an en moyenne). Les dépenses d’insertion du RSA se sont élevées à 2,3 milliards d’euros en 2019, soit 1 200 euros par bénéficiaire.

Puisque Emmanuel Macron s’inspire de la garantie jeune pour son projet de réforme du RSA, on va faire l’hypothèse que le coût de l’accompagnement sera égal à celui prévu pour la garantie jeune. Le Gouvernement prévoit que le coût total du dispositif de garantie jeune s’élève à 2,6 milliards en 2022, pour 400 000 jeunes (4). Compte tenu du fait que le coût unitaire moyen de l’allocation s’élève à 302 euros par mois (5), cela signifie que la dépense totale d’allocation devrait s’élever 1,45 milliards, ce qui laisse 1,15 milliard en action d’accompagnement, soit 2 900 euros par bénéficiaire.

Deux catégories de bénéficiaires du RSA ne seront pas concernés par l’accompagnement renforcé :

  • les 20 % des bénéficiaires du revenu de solidarité active qui le cumulent avec la prime d’activité, indiquant que ceux-ci travaillent, même de manière très partielle et intermittente.
  • les 16 % des allocataires du RSA qui se déclarent en mauvais ou très mauvais état de santé contre 5 % de la population. Ainsi la ministre du travail a affirmé que “les personnes qui font face à de graves problèmes de santé ou d’addiction, à des problèmes psychiques, à des difficultés de garde d’enfants” (6) ne seraient pas concernées par le dispositif.

On fera donc l’hypothèse que seuls les deux tiers des bénéficiaires du RSA seront concernés par l’obligation de consacrer 15 à 20 heures à des activités d’insertion.

Le nombre de bénéficiaires du RSA en accompagnement renforcé :
L’obligation de consacrer 15 à 20 heures à des activités d’insertion pourrait décider certaines personnes éligibles au revenu de solidarité active à y renoncer, notamment des femmes seules avec charge de famille, des personnes très éloignées de l’emploi ou des individus engagés dans l’économie informelle. Au contraire, la perspective de bénéficier de plus d’accompagnement vers l’emploi pourrait attirer certains individus éligibles au RSA mais qui aujourd’hui n’en ont pas fait la demande (le taux de non-recours est estimé à 30 %) (7). On fait l’hypothèse que la réforme n’a pas d’impact sur le nombre de bénéficiaires. Dans notre hypothèse basse, la réduction est de 5 %. Dans l’hypothèse haute, le nombre de bénéficiaires augmente de 5 %.

Hypothèse basse Hypothèse moyenne Hypothèse haute
Dépense par bénéficiaire – dispositif inchangé 7700 7700 7700
Dépense par bénéficiaire – accompagnement renforcé 9400 9400 9400
Nombre de bénéficiaires – dispositif inchangé 633 000 633 000 633 000
Nombre de bénéficiaires – accompagnement renforcé 1 217 000 1 267 000 1 317 000
Frais de gestion par bénéficiaire 250 300 350
Dépense totale 16,5 milliards 17,0  milliards 17,6 milliards
Dépense nette 1,5 milliard 2 milliards 2,6 milliards

Le chiffrage est entouré de plusieurs aléas :

  • le coût du dispositif par bénéficiaire pourrait être plus élevé ou plus faible, selon les services effectivement proposés, non encore connus, et les modalités de gestion ;
  • le coût pourrait être réduit en cas de succès rapide et significatif dans l’insertion des bénéficiaires, ce qui ne pourra s’apprécier que sur la durée ;
  • à l’inverse, un mauvais calibrage des mécanismes d’incitation ou de contrainte pourrait à terme induire des coûts (notamment s’il contribuait à augmenter la pauvreté).

Historique de la mesure

Le contrat d’engagement jeunesse, créé par la loi de finances pour 2022 s’adresse aux jeunes de 16 à 25 ans sans emploi, et qui ne sont ni en train de suivre des études ou une formation (NEET). Il leur propose :

  • une allocation de 500 euros maximum par mois ;
  • un accompagnement par les missions locales ;
  • 15 à 20 heures par semaine consacrées à une formation, un service civique, des stages et immersions en entreprises ou une alternance ;
  • pendant 12 à 18 mois.

Le Gouvernement prévoit que 400 000 jeunes bénéficient du Contrat d’engagement en 2022, pour un budget total de 2,6 milliards d’euros prévu en 2022 (8).

Benchmark

En Italie, le revenu citoyen (Reddito di Cittadinanza) a été introduit sous le gouvernement Conte par le décret loi No 4/2019. L’allocation de 500 euros mensuelle pour une personne seule sans enfant à charge (9) est accordée pour 18 mois, renouvelables.

Le bénéficiaire doit :

  • signer un pacte de travail avec le service public de l’emploi ;
  • accepter au moins une offre d’emploi sur 3 offres “convenables” ;
  • s’engager à réaliser jusqu’à 8 heures de travail socialement utile ;
  • signer un pacte social d’inclusion qui peut prévoir des actions de formation, etc.

Mise en œuvre

La réforme du revenu de solidarité activé proposée par Emmanuel Macron suppose une modification du code de l’action sociale et des familles (article L 262-2 et suivants) (10). Il s’agit d’y introduire l’obligation de suivre un parcours d’insertion. Puisque le RSA réformé proposé par Emmanuel Macron s’inspire fortement du contrat engagement jeunesse (11), les dispositions pourront s’inspirer des articles 5131-1 et suivants du code du travail, relatifs à l’accompagnement personnalisé vers l’emploi.

La mise en application d’un tel dispositif nécessitera de développer fortement les capacités d’accompagnement des missions locales et de Pôle Emploi – qu’Emmanuel Macron propose de réformer en vue de créer “France Travail” – afin d’être en mesure de construire et de soutenir les parcours d’insertion d’un public très large. En effet, la France compte aujourd’hui plus de 1,91 millions de foyers bénéficiaires du RSA en à la fin septembre 2021 (12).

(4) Sénat, Rapport général n°163

(5) Direction du budget, PAP Programme 102, PLF 2022

(6) Le Monde, « Des formations ou des immersions en entreprise » : Élisabeth Borne précise la proposition d’Emmanuel Macron sur les contreparties au RSA

(7) Cour des comptes, Le revenu de solidarité active

(8) Commission des affaires sociales du Sénat, 2021

(9) Matteo Jessoula, Marcello Natili et Michele Raitano, Italy: Implementing the new minimum income scheme, ESPN Flash Report 2019/35

(10) Légifrance

(11) Nouvel Obs, Élisabeth Borne précise le projet RSA du candidat Macron

(12) Caisse d’allocation familiale, RSA, conjoncture n°36

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