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Fabien Roussel
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BIOGRAPHIE

Fabien Roussel est un journaliste et homme politique français. Il est le candidat du Parti communiste français à l’élection présidentielle de 2022.


Né en 1969, il est diplômé du Centre de formation et de perfectionnement des journalistes et devient journaliste reporter d’image chez France Télévision.

Il entre au Mouvement des jeunes communistes de France au lycée. De 1977 à 2001, il est conseiller communication auprès de la Secrétaire d’État Michelle Demessine et attaché parlementaire du député communiste Alain Bocquet de 1993 à 2007. En 2014, il est élu conseiller municipal de Saint-Amand-les-Eaux et il est réélu en 2020.

Depuis 2017, il est député de la 20e circonscription du Nord et depuis 2018, il succède à Pierre Laurent au poste de Secrétaire national du Parti communiste français.

En mars 2021, il annonce sa candidature à l’élection présidentielle de 2022.
Site de campagne

Restaurer la retraite à 60 ans à taux plein, porter la pension à 75 % du revenu net des dix meilleures années pour le public et le privé

« Une loi rétablira la retraite à 60 ans, à taux plein. […] La pension atteindra 75 % du revenu net d’activité, dans le secteur public comme dans le secteur privé. […] Aucune pension ne pourra être inférieure à 1 200 euros net. »

Source : Programme de Fabien Roussel

Estimation
Coût par an
Par l'Institut Montaigne
87,7 Md€
54,8 Md€ estimation basse
176,6 Md€ estimation haute
Précision
Par le candidat
30 à 40 Md€
Cette réforme nécessite une disposition législative.

Dans son programme, Fabien Roussel prévoit de revenir à un âge d’ouverture des droits fixé à 60 ans, soit la situation antérieure à la réforme de 2010. Il précise que ce départ à taux plein sera garanti pour une carrière complète « allant de 18 à 60 ans » : les règles de durée d’assurance pourraient être maintenues ou revenir en arrière, autour d’un retour à 40 années – soit 160 trimestres cotisés. La mesure proposée s’accompagne d’une revalorisation de la pension à hauteur de 75 % du revenu net d’activité dans le secteur public comme dans le secteur privé, sur la base d’un calcul des dix meilleures années, tandis qu’aucune pension ne pourra être inférieure à 1200€ net. Des mécanismes de départs anticipés à la retraite pour les personnes exerçant des métiers pénibles ou ayant des carrières longues complètent le projet du candidat, sans précisions supplémentaires.

Fabien Roussel propose de revenir sur les dispositions des réformes des retraites en matière d’âge d’ouverture des droits – sans précision spécifique sur les règles d’assurance ni sur l’âge d’obtention du taux plein. Il est fait ainsi l’hypothèse, le candidat indiquant que le taux plein serait obtenu « pour une carrière complète allant de 18 à 60 ans » que celui-ci revient également sur les mesures de durée nécessaire à l’obtention du taux plein (ramenée à 160 trimestres – ou 40 annuités) tandis que l’âge d’obtention du taux plein serait ramené à 62 ans.

La mesure s’accompagne également d’une revalorisation des pensions, désormais fixées à 75 % du revenu net d’activité sur la base des dix meilleures années. Le candidat prévoit également qu’aucune pension ne pourra être inférieure à 1200 euros net – sans précision si ce plafond concerne les seules carrières complètes ou également les carrières incomplètes.

Le coût de la mesure présenté ici est celui pour les régimes des retraites uniquement, sans chiffrage du report sur les autres régimes (maladie, chômage, invalidité). Le report de l’âge légal a en effet concerné, non seulement des salariés, mais aussi des individus au chômage ou en inactivité.

En l’absence de précisions sur des réformes annexes, par exemple sur les retraites complémentaires, plusieurs scénarios peuvent donc être avancés :

  • Un scénario médian correspond au cumul de quelques hypothèses : un retour sur toutes les mesures d’âges depuis 1993 – hors passage de 37,5 à 40 annuités – ainsi que les règles de calcul de la pension versée sur les 10 meilleures années, en considérant une revalorisation de toutes les pensions à hauteur de 1200€ minimal. Le coût de la mesure est estimé à 87,7 Md€ en 2027 dans ce scénario médian, qui considère que l’effet de la mesure portant la pension versée à 75 % est nul – puisque le COR calcule le taux de remplacement actuel à 74,7 % une fois la pension nette totale versée ;
  • Un scénario haut ajoute à ce chiffrage la mesure de l’augmentation du taux de la pension versée à 75 % contre 50 % – en considérant celui-ci comme un calcul sur la seule retraite de base, sans prise en compte de l’amélioration obtenue par la retraite complémentaire. En y associant également le retour sur les réformes en matière de retraites complémentaires qui ont suivi ces réformes pour les retraites de base – soit une augmentation de plus de 10 Md€ – le coût total estimé est de 176,6 Md€ pour un scénario haut. La forte hausse de ce scénario s’explique par l’augmentation mécanique de 50% des montants versés par le passage de 50 % à 75 % du salaire moyen constaté (1). Ce scénario demeure peu probable car il risquerait de conduire à des taux de remplacements élevés.
  • Enfin, un scénario bas correspondant à une interprétation à minima de la mesure, qui reviendrait uniquement sur le recul de l’âge de la retraite et les règles de calcul de la pension versée sur les 10 meilleures années tout en considérant que la revalorisation à hauteur de 1 200€ minimal de pension nette totale (direct, dérivé et de réversion) ne concerne que les retraités ayant eu une carrière complète, amènerait le chiffrage à un niveau de 54,8 Md€.

Ainsi en 2027, le coût pourrait être de 54,8 Md€ jusqu’à 176,6 Md€, avec une ligne médiane à 87,7 Md€ par an.

Impact macroéconomique

L’impact macroéconomique de la mesure serait probablement négatif.

D’une part, du point de vue de l’offre, la mesure réduit la population active et augmente la population inactive. Elle réduit donc le potentiel de l’économie. En pratique, ceci se traduirait par une forte désorganisation des entreprises qui verraient leurs salariés expérimentés partir plus rapidement qu’anticipé pour transmettre de manière efficace leurs connaissances et compétences aux générations plus jeunes. Ceci pourrait conduire à une pénurie de main d’œuvre forte à court terme.

D’autre part, du point de vue de la demande, la mesure pourrait être amenée à réduire le revenu disponible des ménages avec la substitution de pensions de retraites inférieures aux revenus de l’activité. Cet impact peut être très partiellement tempéré par l’augmentation des pensions les plus modestes.

(1) Aujourd’hui, la retraite de base de la Cnav est calculée comme : Revenu annuel moyen x Taux de la pension (50 % maximum) x (Durée d’assurance au régime général limitée à la durée d’assurance pour obtenir une pension taux plein (selon votre année de naissance) / Durée d’assurance pour obtenir une pension à taux plein). Il est donc considéré dans ce scénario que le candidat porte le taux de la pension (50 % si vous avez une carrière complète ou atteint l’âge permettant de bénéficier du taux plein automatique) à 75 %. La revalorisation dans le secteur public serait alors considérée comme équivalente à celle des assurés du secteur privé.

La mesure du candidat revient sur une grande partie des dispositions votées depuis 2003  : 

  • D’une part, le candidat propose de revenir sur la plupart des réformes obtenues depuis 2003  : l’âge légal est ramené de 62 à 60 ans (réforme des retraites de 2010) et la réduction de la durée d’affiliation requise pour l’obtention du taux plein (réformes de 2014 et de 2003). Il est également supposé que la candidate revienne également sur l’âge d’obtention automatique du taux plein de 67 à 65 ans (réforme des retraites de 2010). En 2017, l’Institut Montaigne avait chiffré à 27 Md€ le coût engendré par ce retour sur les réformes 2003 à 2014.
  • Enfin, le candidat a annoncé une modalité de calcul de la pension plus favorable  : dans le secteur public comme privé, la pension sera fixé à 75 % du revenu net d’activité. Il sera calculé sur la base des dix meilleures années dans le privé ; dans le public, il existera un droit d’option la plus favorable entre les dix meilleures années de salaires avec les primes, ou les six derniers mois de traitement indiciaire. Cette mesure revient sur la réforme de 1993 (prise en compte des 10 meilleures années au lieu des 25 pour le calcul du salaire de référence).

Chiffrage des différentes mesures présentées

Selon les micro-simulations réalisées par l’Insee en 2014 (2), intégrées dans l’étude d’impact du projet de loi de réforme des retraites en 2019 (3) et conservées par le COR dans son rapport de 2021, les bénéfices des réformes de retraites sont de deux ordres.

  • Les bénéfices liés aux évolutions des règles d’indexation  : les revalorisations des salaires passées pour le calcul de la première pension et de revalorisation de la pension servie chaque année étaient initialement indexées sur l’évolution des salaires ; depuis 1993, l’indexation se fait désormais sur l’évolution des prix dans les deux cas ;
  • Les bénéfices liés aux évolutions des règles portant sur l’âge (hausse de l’âge légal, hausse de l’âge d’obtention du taux plein, hausse de la durée d’affiliation requise) et sur le nombre d’années prises en compte pour le calcul du salaire de référence d’autre part.

Les micro-simulations réalisées par l’INSEE estiment qu’à horizon 2060, l’effet sur la réduction des dépenses de retraites grâce aux réformes d’indexation sur les prix est 1,5 fois supérieur à l’effet obtenu par les mesures d’âges. Au sein des mesures d’âges, l’effet des règles de proratisation de la retraite (nombre des « meilleures années » prises en compte pour le calcul du salaire de référence) est plus important que celui de l’augmentation du nombre de trimestres cotisés : 75 % des gains de la réforme Balladur de 1993 proviennent du nouveau calcul de la retraite versée (passage des 10 meilleures années aux 25 meilleures années, qui a occasionné une baisse de la prestation versée) et environ 25 % des gains proviennent de la hausse du nombre de trimestres (de 150 à 160 trimestres) (4).

L’hypothèse est que le candidat propose donc un retour à la situation avant 1993 – à l’exception du retour à 150 trimestres au lieu de 160 – soit a minima les mesures d’âges et la réforme du nombre d’années prises en compte pour le calcul du salaire de référence. Le scénario 1 estime le coût  :

  • Du recul des âges (suppression des réformes 2010)  : recul de l’âge d’ouverture des droits de 62 à 60 ans et de l’âge d’obtention automatique du taux plein de 67 à 65 ans ;
  • Du recul de la durée de cotisation, hors réforme Balladur (réforme 2003 et 2014)  : durée d’affiliation requise passant de 172 à 160 trimestres (5) ;
  • De la proratisation sur 10 ans au lieu de 25 (annulation partielle de la réforme de 1993).

Pour calculer l’impact du retour à la situation antérieure des mesures d’âges, le COR estimait la part des dépenses des réformes de retraite de 13,5 % du PIB en 2021 dans son dernier rapport (6). Dans le scénario C (1,3 % de croissance annuelle de la productivité du travail et taux de chômage de long-terme à 7 %) qu’il présente comme son scénario central, le COR estime que la totalité des mesures d’âges ont permis de réduire la part des retraites dans les dépenses de 2,7 points de PIB d’ici 2030.

Selon la DREES en 2016, pour les seules mesures d’âges entre 2010 et 2015, l’impact dans les dépenses a été très important  : pour les masses de pensions de droit direct, celles-ci atteignent 30 Md€ en 2027 et 31,9 Md€ en 2030 soit 9 % des montants servis pour les retraites (7).

Les chiffrages publiés par la DREES dans son rapport concernent principalement l’horizon 2030. Néanmoins, lorsque l’on regarde en détail les tableaux de chiffres transmis par la DREES, les évolutions entre 2027 et 2030 sont minimes (lorsqu’il s’agit des grandeurs en points de PIB).

Ainsi, pour 2030, la DREES a décomposé les différents impacts des réformes. Elle estime d’une part les impacts de chaque modification réglementaire sur les pensions versées ainsi  :

  • Le relèvement de l’âge d’ouverture des droits de 60 à 62 est de 0,43 points de PIB
  • Le relèvement de l’âge d’obtention du taux plein de 65 à 67 ans est de 0,18 points de PIB
  • L’augmentation de la durée d’assurance requise est de 0,16 points de PIB.
  • Les accords nationaux interprofessionnels représentent 0,25 points de PIB
  • Les autres modifications réglementaires (réforme de l’Ircantec, écrêtement du MICO) sont de 0,12 points de PIB.
  • À l’inverse, le dispositif de départs anticipés devrait pratiquement plus avoir d’impact avec cette mesure. Les économies associées représenteraient 0,06 point de PIB.

Par ailleurs, sur le même horizon, la DREES considère que la variation des cotisations prélevées est positive à hauteur de 0,6 points de PIB supplémentaires. Dans le détail  :

  • Le relèvement de l’âge d’ouverture des droits de 60 à 62 est de 0,14 points de PIB ;
  • Le relèvement de l’âge d’obtention du taux plein de 65 à 67 ans est de 0,03 points de PIB ;
  • L’augmentation de la durée d’assurance requise est de 0,02 points de PIB.
  • Les autres modifications réglementaires (réforme de l’Ircantec, écrêtement du MICO (8)…) sont de 0,02 points de PIB ;
  • Par ailleurs, les différentes hausses des taux de cotisation (Agirc-Arrco, régimes alignés) ont permis d’obtenir 0,41 points de PIB.

Ainsi, dans le détail, un premier volet des réformes de 2010 à 2015 (relèvement des âges d’ouverture des droits et de l’âge d’obtention du taux plein, augmentation de la durée d’assurance requise) a eu un impact sur les prestations versées et sur les cotisations reçues de 0,96 points de PIB. Le retour sur les réformes des différents ANI (9) (moindre prestation, hausse des taux spécifiques à l’Agirc-Arrco) est de 0,37 point de PIB.

Enfin, la réforme de 2014 porte la durée de 166 trimestres pour la génération de 1958 à 172 trimestres pour la génération de 1973. La hausse de la durée d’assurance liée à cette réforme occasionnerait un âge moyen de départ en hausse de 4 mois pour la génération de 1980. À terme, son effet a une ampleur analogue à celui du relèvement programmé par la réforme de 2003 (de 160 à 166 trimestres). Comme l’effet de cette disposition est déjà acquis, on considère que l’annuler abaisserait l’âge moyen de départ de 4 mois supplémentaires. La masse des pensions à verser serait accrue de 0,30 point de PIB supplémentaire – le même effet que celui calculé pour la réforme de 2014 à horizon 2040.

Pour calculer l’impact combiné du changement de la proratisation (un passage de 25 à 10 ans de référence pour le calcul des meilleurs salaires) et le nouveau mode de calcul de la pension versée (un passage de 50 à 75 % du revenu net d’activité), il doit être noté que  :

Lignes Catégorie d’âge Revenu salarial Salaire annuel moyen en EQTP Volume de travail annuel moyen en EQTP
(en euros)
a Moins de 25 ans 7 570 17 680 0,43
b De 25 à 39 ans 19 420 25 010 0,78
C De 40 à 49 ans 25 310 30 260 0,84
D De 50 à 54 ans 26 370 31 220 0,84
E 55 ans ou plus 25 120 33 180 0,76
Hypothèse d’âge de départ 63 ans
Nombre d’année entre 55 et 63 ans 8
f=(8e+2d)/10 Salaire moyen sur les 10 meilleures années 32 788
g=(8e+5d+10c+2b)/25 Salaire moyen sur les 25 meilleures années 30 966
f2=0,75*f Pension annuelle versée après réforme (75 % du salaire moyen des 10 meilleures années) 24 591
g2=0,5*g Pension annuelle versée avant réforme (50 % du salaire moyen des 25 meilleures années) 15 483
f2/g2-1, en % Accroissement entre les 2 (12) :   59 %
Pensions totales en France (en point de PIB) 13,5
Dont pensions totales versées par les retraites de base (en Md€) 246,1
Dont pensions versées par les régimes alignés de base (en Md€) 141,6
Dont pensions totales versées par les retraites de base (en pts de PIB) 5,8
Impact d’une revalorisation sur les dépenses de pensions (en point de PIB) 3,4
Impact d’une revalorisation sur les dépenses de pensions (en Md€ de 2022) 87,9

Source : calcul des auteurs à partir de données Insee (haut du tableau, lignes a à e, https://www.insee.fr/fr/statistiques/4503068?sommaire=4504425), CCSS 2021 (p. 99), RESF 2022 (p. 212) pour le PIB 2022

Ce calcul estime qu’il y aurait un rattrapage pour tous les retraités, sans pour autant qu’il y ait de rattrapage sur les toutes les pensions versées jusqu’alors  : la mesure ne concernerait que les pensions versées à partir de la mise en œuvre de la mesure.

Cette augmentation de 59 % est importante  : elle ne se justifie que si le calcul ne prend pas en compte le niveau de vie de retraités une fois prise en compte la retraite complémentaire. Or comme le montre le COR, une fois pris en compte la pension nette perçue dans sa totalité (pension de base, complémentaire), le taux de remplacement médian de la génération 1950 (retraité en 2016) a atteint 74,7 % (13). Dès lors, on peut considérer que la mesure du candidat, pourrait ne pas occasionner la hausse attendue de 59 % des pensions de retraite.

Enfin, pour calculer la mesure  : « aucune pension nette en dessous de 1 200€« , il convient de se reporter à la répartition de la retraite par niveau de vie. La DREES a mis en place un outil de visualisation de la distribution des pensions pour les retraités de l’échantillon interrégimes de retraités de 2016 (14). Ainsi, 37,4 % des retraités (carrières complètes et incomplètes) en 2016 gagnent moins de 1 200€ net par mois – la pension moyenne était quant à elle de 1 515€. Sans détail supplémentaire de la mesure du candidat, on peut envisager un scénario médian améliorant uniquement la retraite des carrières complètes et un scénario haut améliorant toutes les pensions des carrières incomplètes.

  • Dans le scénario bas, 24,4 % des pensionnés touchent moins de 1 200€ net par mois (droit direct, droit dérivé et pension de réversion compris). En multipliant chaque tranche par le montant moyen nécessaire pour obtenir 1 200€ net par mois, on obtient un coût de 7,81 Md€. En prenant en compte l’évolution des pensions totales nettes par an sur les 10 dernières années (de 2010 à 2019, l’évolution a été de 1,09 % par an selon la DREES (15)) alors après 5 ans de hausse moyenne des pensions de 1,09 % (soit une hausse totale de 5,6 %) le coût serait réduit à 7,38 Md€ en 2027 ;
  • Dans le scénario médian et dans le scénario haut, 37,4 % des pensionnés touchent moins de 1 200€ net par mois (droit direct, droit dérivé et pension de réversion compris). En multipliant chaque tranche par le montant moyen nécessaire pour obtenir 1 200€ net par mois, on obtient 29,3 Md€ supplémentaire – réduit à horizon 2027 à 27,64 Md€ en prenant en compte l’augmentation annuelle des retraites de 1,09 % (cf. supra).

À l’horizon du quinquennat, dans le scénario médian, l’effet serait donc  :

  • Pour les réformes d’âge annulées depuis 2003, de 1,2 point de PIB ;
  • Pour l’évolution des règles de proratisation sur le passage de 25 à 10 ans du salaire moyen, de 0,8 point de PIB ;
  • Le scénario médian équivaut donc à 2 points de PIB, soit 60 Md€ à horizon 2027. En y ajoutant la revalorisation des pensions inférieures à 1200€ toutes les carrières (complètes et incomplètes), la mesure atteint 87,7 Md€.

Un scénario haut aurait un effet supplémentaire  :

  • pour le changement des règles de proratisation combine le passage des 25 aux 10 meilleures années et un taux de remplacement de la pension de base de 50 % à 75 % du salaire moyen versé, un hausse de 3,4 points de PIB ;
  • pour les réformes d’âge annulées, de 1,2 point de PIB ;
  • pour les réformes AGIRC-ARCCO, de 0,37 point de PIB ;
  • Le scénario haut équivaut donc à 5 points de PIB, soit 149 Md€ à horizon 2027. En y ajoutant la revalorisation des pensions inférieures à 1200€ pour les carrières complètes et incomplètes, la mesure atteint 176,6 Md€.

Enfin, un scénario bas, où seuls les effets des réformes de 2010 (relèvement des âges pour 0,78 point de PIB) sont annulés, l’évolution des règles de proratisation sur le passage de 25 à 10 ans du salaire moyen (0,8 point de PIB) ainsi que la revalorisation des pensions inférieures à 1200€ pour les seules carrières complètes, aurait un coût estimé à 54,8 Md€ en 2027. Dans ce cas, aucune mesure de réduction de trimestre ne serait mise en œuvre.

Intitulé de la variable 2027/2030
Part dépense retraites dans le PIB 13,6
dont part de dépenses retraites des régimes alignés de base dans le PIB 5,8
Annulation de la réforme en 2010 0,78
Relèvement de 60 à 62 ans de l’âge d’ouverture des droits 0,57
dont hausse des pensions versées 0,43
dont baisse des cotisations 0,14
Relèvement de 65 à 67 de l’âge d’annulation de la décote 0,21
dont hausse des pensions versées 0,18
dont baisse des cotisations 0,03
Annulation de la réforme de 2014 0,18
Augmentation de la durée d’assurance requise pour l’obtention du taux plein 0,18
dont hausse des pensions versées 0,16
dont baisse des cotisations 0,02
Annulation partielle de la réforme de 2003 0,30
Annulation des accords AGIRC-ARRCO 0,37
dont hausse des pensions versées 0,25
dont baisse des cotisations 0,12
Neutralisation de l’effet des départs anticipés carrières longues -0,06
   
Total des dépenses retraites en cas d’annulation de réformes 1,20
Scénario médian : Effet de la proratisation (passage de 25 aux 10 meilleures années) 5,9%
Scénario haut : Effet proratisation + passage des 75% au 50% du salaire moyen 58,8%
Scénario bas : Relèvement de la pension à 1200€ net (carrières complètes seules) 7,38
Scénario médian et haut : Relèvement de la pension à 1200€ net (carrières complètes et incomplètes) 27,64
PIB estimé (en Md€) 2999
   
Coût (en Md€) du scénario médian : réformes âge et proratisation (scénario 1) 87,7
Coût (en Md€) du scénario haut : réformes âges + AGIRC-ARCCO + proratisation (scénario 2) 176,6
Coût (en Md€) du scénario bas : réformes âge partielles + proratisation (scénario 1) 54,8

Source : calculs des auteurs à partir de données Insee (16) et DREES (17)

Fiabilité du chiffrage

Les effets des réformes des retraites sont bien documentés, au sein des études d’impacts des lois adoptées par le Parlement, ou les simulations réalisées par le Conseil d’orientation des retraites (COR), de la CNAV et de la DREES.

Le chiffrage documente ici uniquement le coût de la mesure pour les régimes de retraite, sans s’intéresser aux effets de substitution avec d’autres régimes. Ainsi, selon la DREES, la situation principale d’activité au cours de l’année précédant la liquidation des droits à retraite pour la génération 1946 est de 58 % en emploi, 3 % en préretraite, 7 % en maladie ou invalidité et 19 % au chômage – 13 % étaient déjà inactifs (18).

Selon la DREES en 2016, les gains estimés étaient de 14 milliards d’euros d’économies attendues sur les dépenses des régimes de retraite à l’horizon 2017-2020. En revanche, cette même réforme représentait déjà un surcoût d’environ 1,2 à 1,5 milliard d’euros pour les régimes gestionnaires des pensions d’invalidité et devait également se traduire par une augmentation des dépenses d’allocation de minima sociaux de 600 millions d’euros par an (19).

Difficulté du chiffrage

Une des difficultés tient à la globalité de la réforme des retraites proposée par la candidate. Le chiffrage porte sur l’abaissement de l’âge légal (60 ans), l’âge d’obtention du taux plein (réduction de 2 ans), la durée d’affiliation (40 ans – soit 160 trimestres requis pour l’obtention du taux plein), ainsi que le calcul du salaire de référence sur les 10 meilleures années et la mise en place d’un taux de remplacement fixé à 75 % du revenu net d’activité.

N’a pas été calculé le coût des potentielles réformes annexes notamment en cas de remise en cause des réformes des régimes complémentaires (accords AGIRC-ARRCO-AGFF relatifs aux retraites complémentaires de 2011, 2013 et 2015). D’autres aspects envisagés, liés notamment aux régimes spéciaux, n’ont pas été intégrés.

Historique 

L’âge légal de départ à la retraite a été fixé à 65 ans à partir de 1945, date de la fondation du système de retraite par répartition. Il a été ensuite abaissé à 60 ans en 1982.

Les principales réformes des retraites depuis la réforme Balladur de 1993 :

La loi du 22 juillet 1993, dite réforme Balladur, a réformé les retraites du secteur privé en instaurant la revalorisation des pensions en fonction des prix et non plus des salaires, en relevant la durée d’assurance pour ouvrir droit à pension à taux plein de 150 à 160 trimestres et en modifiant les années prises en compte pour le calcul du salaire de référence (passage des 10 aux 25 meilleures années). Le plan Juppé en 1995 ainsi que la réforme Fillon (ci-après) aligneront les règles de la fonction publique sur celles du secteur privé.

La loi du 21 août 2003, dite réforme Fillon, a procédé à l’alignement de la durée de cotisation des fonctionnaires sur celle des salariés du privé  : de 37,5 années de cotisation à 40 ans en 2008. Elle programme l’allongement de la durée de cotisation pour tous au-delà de 40 ans pour la porter à 41 ans (164 trimestres) en 2012. Des rendez-vous sont prévus tous les 4 ans (2012, 2016) pour examiner l’opportunité d’allonger encore la durée de cotisation, en fonction de l’évolution de l’espérance de vie.

La loi du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites a relevé progressivement l’âge légal de départ à la retraite de 60 à 62 ans et l’âge d’obtention automatique du taux plein de 65 à 67 ans de 2011 à 2018. Le relèvement progressif de ces âges s’effectue selon l’année de naissance à raison de quatre mois par génération entre 1951 et 1956. Cette évolution concerne tous les salariés, du public comme du privé ainsi que les régimes spéciaux, mais avec des calendriers de mise en œuvre différents. L’étude d’impact de la loi estimait l’économie annuelle tous régimes des mesures d’âge à 20,2 Md€ en 2020.

La loi du 21 décembre 2011 de financement de la sécurité sociale pour 2012 (article 88) prévoit l’accélération de la réforme des retraites de 2010  : l’âge légal de départ à la retraite et l’âge d’obtention automatique de la retraite à taux plein passent respectivement à 62 et 67 ans dès 2017, au lieu de 2018.

La loi du 20 janvier 2014 garantissant l’avenir et la justice du système de retraite procède à un allongement de la durée requise pour le taux plein à partir de la génération 1958, à raison d’un trimestre toutes les trois générations pour atteindre 43 ans (172 trimestres) pour la génération 1973. Cette mesure s’inscrit dans la continuité de la réforme de 2003 avec un partage des gains d’espérance de vie par allongement de la durée cotisée.

L’étude d’impact du dossier législatif de la loi n° 2014-40 du 20 janvier 2014 estimait l’économie de la mesure d’allongement de la durée d’assurance à 10,4 Md€ / an en 2040.

À cela s’ajoutent également les accords AGIRC-ARRCO-AGFF relatifs aux retraites complémentaires (2011, 2013, 2015).

Benchmark

Selon le dernier panorama des systèmes de retraite en France et à l’étranger (20), l’âge moyen de départ à la retraite s’est rapprochée de 64 ans pour atteindre 63,5 ans en 2017 – et devrait s’accroitre à 64 ans en 2020 et 65 ans en 2035. En effet, parmi les pays de l’Union européenne, 16 pays appliquent un âge légal de départ à la retraite supérieur ou égal à 64 ans (Allemagne, Autriche, Belgique, Chypre, Danemark, Espagne, Finlande, Grèce, Hongrie, Irlande, Italie, Luxembourg, Pays-Bas, Pologne, Portugal, Roumanie). Le Royaume-Uni a également repoussé son âge de départ à 66 ans comme âge d’ouverture des droits.

Les réformes récentes dans les autres pays, avec le relèvement des âges légaux de départ à la retraite, s’étendent – à l’exception de la réforme en Belgique avec une augmentation de l’âge légal à 66 ans en 2025 et 67 ans en 2030 – sur plusieurs générations avec des progressivités divergentes. Ainsi l’Allemagne a un âge de taux plein fixé à 66 ans et 9 mois et qui sera porté à 67 ans à partir de 2030 (pour la génération 1964). L’Italie a quant à elle fixé l’âge de départ à la retraite fixé aujourd’hui à 67 ans et qui devra atteindre 70 ans en 2050 – avec la fin de l’expérimentation lancée entre 2018 et 2021 d’une retraite à 62 ans sous conditions d’années de cotisations.

Mise en œuvre

La mise en œuvre de la proposition suppose l’adoption d’une loi car les grandes règles relatives aux retraites (âge de départ à la retraite, durée de cotisations) relèvent de dispositions législatives codifiées dans le Code de la sécurité sociale. Conformément à l’article L. 1 du Code du travail, la loi est précédée d’une saisine obligatoire des partenaires sociaux. La loi votée devra ensuite être déclinée et précisée par des textes réglementaires élaborés par le Gouvernement.

Par symétrie avec la réforme de 2010, la mesure concerne tous les salariés du privé, comme du public et des régimes spéciaux.

(2) INSEE, Vingt ans de réformes des retraites : quelle contribution des règles d’indexation ?, avril 2014

(3) Projet de loi instituant un système universel de retraite – Étude d’impact, 2019, p. 29

(4) Anne-Gisèle Privat, L’avenir des retraites en France : évaluation de l’impact des réformes de 1993 à 2003 à l’aide du modèle de microsimulation ARTEMIS, 2006.

(5) Pour rappel, la réforme de 1993 a permis de passer de 150 à 160 trimestres, celle de 2003 de 160 à 166 trimestres, celle de 2014 de 166 à 172 trimestres.

(6) COR, Rapport annuel du COR 8e édition – Évolutions et perspectives des retraites en France, juin 2021

(7) DREES, Les réformes des retraites menées entre 2010 et 2015 : effets sur la situation des assurés, les dépenses des régimes et l’équité., décembre 2016

(8) Le minimum contributif est le minimum de pension servi par le régime général (concernant les salariés et travailleurs indépendants) et celui des salariés la Mutualité Sociale Agricole (MSA)

(9) Accord national interprofessionnel

(10) INSEE, Emploi, chômage, revenus du travail, éd. 2020

(11) INSEE, Emploi, chômage, revenus du travail, éd. 2020

(12) On prend ici les salaires en EQTP pour s’extraire du fait qu’une partie des personnes de plus de 55 ans partent à la retraite et sont donc considérées comme inactive – et font donc baisser le salaire moyen en personnes physiques

(13) Conseil d’orientation des retraites, Rapport annuel du COR 8e édition – Évolutions et perspectives des retraites en France, juin 2021

(14) DREES, DistriPension

(15) DREES, Les retraités et les retraites, édition 2021, p. 49 (tableau n°1)

(16) INSEE, Vingt ans de réformes des retraites : quelle contribution des règles d’indexation ?, avril 2014

(17) DREES, Les réformes des retraites menées entre 2010 et 2015 : effets sur la situation des assurés, les dépenses des régimes et l’équité, décembre 2016

(18) DREES, Les retraités et les retraites, édition 2021, p. 169.

(19) DREES, Invalidité et minima sociaux  : quels effets du passage de la retraite de 60 à 62 ans ?, octobre 2016

(20) Conseil d’orientation des retraites, Panorama des systèmes de retraite en France et à l’étranger, décembre 2020

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