Après une période de relative accalmie, le retour de l’inflation fait planer une menace sur l’économie mondiale. La hausse des prix ouvre une période d’incertitude qui pourrait avoir différents retentissements à travers le monde. Éric Chaney, conseiller économique de l'Institut Montaigne, envisage les scénarios de l’après.
La montée de l’inflation continue de déjouer les pronostics. Aux États-Unis où elle a atteint 7 % en décembre, elle est généralisée, au point que le président de la Réserve fédérale Jay Powell a déclaré à la sortie de la réunion du comité monétaire du 26 février : "nous avons une bonne marge de remontée des taux d’intérêt sans risque pour l’emploi". Dans la zone euro, ce sont les prix de l’énergie qui l’ont poussée à 5 %, mais les autres secteurs suivront du fait de l’augmentation des coûts et des salaires. L’inflation des prix immobiliers est déjà proche de 9 %.
Les facteurs inflationnistes sont conjoncturels et structurels
On ne peut plus soutenir qu’une fois les goulots d’étranglement de la reprise mondiale résorbés, tout reviendra dans le meilleur des mondes, car, au-delà des circonstances de la reprise, les facteurs d’inflation sont à la fois conjoncturels et structurels.
Tout d’abord, les politiques économiques restent fortement expansionnistes. L’effet des politiques de soutien au revenu durant la phase dure des politiques sanitaires va se prolonger à mesure que l’excès d’épargne accumulé par les ménages est dépensé. Côté monétaire, les taux d’intérêt réels sont toujours négatifs aux États-Unis et dans la zone euro, alors que les économies tournent à plein régime.
Des facteurs structurels sont également à l’œuvre : fin de la phase ascendante de la mondialisation, voire retour en arrière du fait de sérieuses tensions internationales, épuisement du réservoir de main d’œuvre à bon marché que fournissait la Chine, relocalisation d’activités industrielles pour se prémunir contre les risques de rupture d’approvisionnement et, enfin, hausse des prix de l’énergie liée aux efforts de décarbonation.
Deux régimes possibles pour l’inflation future
Il reste probable qu’après avoir atteint un pic, l’inflation reflue. Mais pour la suite, le débat est ouvert.
Je distinguerai deux scénarios polaires. Dans chacun, la trajectoire des prix (une courbe dont la pente est l’inflation) monte d’un cran, du fait des facteurs structurels dont je viens de parler.
Dans le scénario bénin, l’inflation accélère puis décélère lorsque le niveau des prix se stabilise autour de sa nouvelle trajectoire. Cela suppose que le rattrapage des salaires soit progressif et ne déclenche pas à son tour une nouvelle augmentation des prix.
S’il devait se produire, ce dernier enchaînement conduirait au second scénario, le mauvais, où le choc initial serait entretenu par la course entre prix et salaires comme dans les années 70.
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