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21/04/2017

Décryptage des enjeux de la campagne présidentielle

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Décryptage des enjeux de la campagne présidentielle
 Laurent Bigorgne
Auteur
Ancien directeur

 

À la veille du premier tour de l'élection présidentielle, Laurent Bigorgne, directeur de l'Institut Montaigne décrypte les enjeux et fait un bilan de la campagne présidentielle.

La campagne présidentielle a donné lieu à de vifs débats dont on peut tirer certains premiers enseignements.

Sur l’Europe, tout d’abord, une ligne de fracture claire - et apparemment irréductible - s’est affirmée entre les différents candidats. Elle existe depuis longtemps, mais n’avait jamais été aussi clairement exprimée. D’un côté, ceux qui veulent la réformer et discuter avec l’Allemagne pour permettre à la France de retrouver, par le truchement du projet européen, des éléments de souveraineté. De l’autre, ceux qui se tiennent hors du “cercle de la raison”, nous expliquent que nous pouvons sortir des Traités, abandonner la monnaie unique, prendre le risque d’une guerre commerciale ou économique avec ceux qui sont nos partenaires depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. C’est pourquoi il est impératif que ceux qui défendent l’Europe, qui souhaitent qu’elle soit une arme de souveraineté pour notre pays, fassent preuve de pédagogie, de sincérité et d’audace. Seule une explication claire et sincère de leurs objectifs et de leurs engagements pourra donner corps à un projet que beaucoup voudraient déjà enterrer.

Sur l’économie, ensuite, on observe un recul très net de la prise en compte de la contrainte budgétaire. Nombreux sont ceux qui, à l’instar du candidat socialiste par exemple, s’en sont affranchis. Lors de la campagne présidentielle de 2012, les candidats rappelaient sans cesse qu’il fallait respecter des objectifs budgétaires précis. Aujourd’hui, nous sommes dans une situation où, à l’exception des programmes de François Fillon et d’Emmanuel Macron - avec des degrés d’intensité différents -, la contrainte budgétaire est complètement niée et rejetée, y compris par un parti de gouvernement comme le Parti socialiste.

Ce mouvement de rejet se révèle, dans une dimension plus manifeste encore, dans les dépenses nouvelles proposées par Jean-Luc Mélenchon et Marine Le Pen, ainsi que dans leur refus de la nécessité de procéder à des économies. Sur les 60 milliards d’économies prétendument présents dans le programme du Front national, seul 1,5 milliard est suffisamment détaillé pour être réalisé effectivement. Autant dire, rien du tout. Comme si la fin de l’euro, pouvait, par miracle, faire grimper la croissance à plus de deux points d’ici la fin du quinquennat. Or, nous savons pertinemment qu’il en irait tout autrement. La sortie de la zone euro ruinerait les entreprises françaises, quelle que soit leur taille. Elles ne pourraient en effet se financer ou devraient se financer à des taux absolument prohibitifs sur les marchés. Le mirage frontiste nous maintient dans l’illusion que les Français pourraient, seuls, dévaluer leur monnaie, alors que ni les Italiens ni les Espagnols ne seraient tentés de le faire, ce qui est un mensonge.

Enfin, ce sont les enjeux sécuritaires qui, plus que tout autre, ont marqué cette campagne. Les candidats ont unanimement plaidé pour une augmentation des moyens dédiés à la défense et pour un renforcement de nos effectifs de sécurité. Même François Fillon, qui propose pourtant la suppression de 500 000 emplois publics, affirme qu’un effort sera fait sur les effectifs de police et de gendarmerie, un champ également sacralisé par Emmanuel Macron.

L’enjeu sécuritaire, comme celui de l’Europe, sont inscrits dans le marbre des programmes. Reste désormais à attendre l’issue du scrutin pour en apprécier la traduction - ou non - en faits et en actes.

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