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07/11/2016

Fait religieux en entreprise : trois questions à Hakim El Karoui

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Fait religieux en entreprise : trois questions à Hakim El Karoui
 Institut Montaigne
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Hakim El Karoui, fondateur du club du XXIème siècle et auteur de notre rapport "Un islam français est possible", revient sur la publication par le gouvernement d'un guide pour aider les entreprises à gérer le fait religieux.


Lorsqu'on parle de la gestion du fait religieux au sein de l'entreprise en général, on pense bien souvent au cas particulier de l'islam. Comment les musulmans le perçoivent-ils eux-mêmes ? 

Il faut prendre garde à ne pas se faire le porte-parole des musulmans. Ce que l’on peut toutefois dire grâce à l’enquête menée pour l’Institut Montaigne par l’Ifop, c’est qu’il y a une double conscience du phénomène chez les musulmans.

Ils sont 40 % à penser que l’employeur doit s’adapter aux obligations religieuses de leurs salariés et 48 % à penser que "l’on devrait pouvoir affirmer son identité religieuse au travail". Les musulmans sont donc conscients que la question du fait religieux se pose à l’entreprise sur un fond de revendication.

Mais, dans le même temps, ils se plaignent de la place qu’occupe l’islam dans le débat public, place qu’ils jugent disproportionnée par rapport à d’autres enjeux…  Cette incompréhension est partagée avec l’ensemble des Français, alors que le chômage et la sécurité sont de loin placés en tête des préoccupations dans toutes les enquêtes.


Quelles sont les bonnes pratiques que les entreprises devraient mettre en place ?

Cette question est complexe car la réponse dépend du type d’entreprises, de la taille, de son activité, de ses clients, etc. Ainsi, la question ne se pose pas dans les mêmes termes selon que l’entreprise est directement en contact avec les consommateurs finaux ou qu’elle vend ses produits ou ses services à d’autres entreprises. Dans tous les cas, la meilleure pratique pour l’entreprise, c’est celle qui permet de préserver ses intérêts, dans le respect de la loi. La loi aujourd’hui est claire : pas d’interdiction de signes religieux sur le lieu de travail, sauf en cas de problèmes sanitaires, de santé, de sécurité ou de préjudice commercial. Le Code du Travail autorise donc des restrictions aux libertés des salariés si elles sont justifiées par la nature de la mission à accomplir et proportionnées au but recherché.

En la matière, comme sur d’autres sujets, l’entreprise a toujours intérêt à chercher le dialogue et la concertation. Sauf si les managers sont victimes d’intimidations, ce qui existe aussi. Et dans ce cas, la loi doit être la plus claire possible.


Comment les pouvoirs publics peuvent-ils aider à renforcer la cohésion sociale sur la question du fait religieux en entreprise ? Quel rôle l'État doit-il jouer pour encadrer les pratiques dans le secteur privé et dans le secteur public ?

Un débat sur la question existe, comme l’ont montré les derniers Entretiens de la cohésion sociale, consacrés à la question du fait religieux en entreprise en septembre dernier. Certains proposent que la loi précise mieux le contour de ce qui est permis et de ce qui est interdit en matière de signes religieux dans l’entreprise. D’autres jugent au contraire que les dispositifs juridiques actuels sont suffisants pour répondre aux questions concrètes posées aux entreprises et à leurs managers. Ce qui est sûr, c’est que la jurisprudence doit être stabilisée car, aujourd’hui, elle ne fixe pas de cap clair pour guider l’action des entreprises.

Le guide de la laïcité en entreprise qui vient de paraître est une bonne initiative car il permet d’avoir un état des lieux précis de la loi. Reste maintenant à savoir si cela sera suffisant, sachant que le nombre de cas de gestion difficile du fait religieux en entreprise augmente chaque année.


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