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19/10/2012

Dispositifs pour l'emploi des jeunes en ZUS : décryptage

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Dispositifs pour l'emploi des jeunes en ZUS : décryptage
 Hugo Micheron
Auteur
Maître de conférence sur le jihadisme à l'École des Affaires internationales de Sciences Po



Le Parlement a entériné, mardi 9 octobre, le projet de loi portant création des emplois d’avenir. Le dispositif prévoit la création de 150 000 emplois d’avenir d’ici à 2015 (100 000 en 2013, 50 000 en 2014), pour un coût estimé par le gouvernement à 500 millions d’euros en rythme de croisière. Le gouvernement s’engage par ailleurs à réserver 30 % des emplois d’avenir aux jeunes peu ou pas qualifiés des zones urbaines sensibles (ZUS) et prévoit de tester le dispositif des "emplois francs", destinés aux jeunes diplômés de quatre zones "sensibles".

En ZUS, plus de 40 % des 15-25 ans sont au chômage : ces territoires, dans lesquels vivent 4,5 millions de Français à la faible moyenne d’âge, concentrent pauvreté et sous-qualification.


Les emplois d’avenir
Un dispositif intéressant…
La mesure consiste dans le financement par l’Etat d’un CDI ou CDD d’un an minimum, à hauteur de 75 % du SMIC brut, sur une période de trois ans. En retour, l’employeur s’engage à offrir aux jeunes un emploi qualifiant, une formation professionnelle, ainsi qu’un suivi si le contrat n’est pas prolongé à son terme. L’alliance "emploi subventionné - formation professionnelle" rappelle l’expérience réussie du New Deal for Young People mise en place en Angleterre et qui prévoyait un dispositif similaire à l’égard des jeunes non-qualifiés. Les évaluations avaient démontré que les jeunes qui bénéficiaient de ce système passaient en moyenne 15 % du temps en moins au chômage que les autres dans les quatre ans consécutifs au programme (voir le rapport 15 propositions pour l’emploi des jeunes et des séniors, septembre 2010).

… qui doit associer le secteur marchand…
Le gouvernement prévoit que 90 % des emplois d’avenir soient créés dans le secteur non-marchand (collectivités locales, bailleurs sociaux, associations, entreprises d’insertion ou de l’économie sociale et solidaire) et 10 % pourvus par des employeurs privés ayant une utilité sociale avérée.
Créatrices d’emplois, les entreprises du secteur marchand devraient être associées plus largement à ce dispositif. En outre, cette mesure ne pourra pas résoudre à elle seule le problème du chômage des jeunes, devenu structurel et accentué par la crise. D’autres leviers doivent être actionnés, afin de lutter, dès l’école primaire, contre l’échec scolaire, qui concerne plus de 20 % des élèves chaque année.

… et être complété par d’autres mesures
Afin que la création des emplois d’avenir ne devienne pas un énième dispositif à destination des jeunes - le Conseil économique social et environnemental (CESE) en a recensé plus de 80, il faut lutter contre les barrières informelles et structurelles qui bloquent l’accès à l’emploi des jeunes en général et des jeunes de ZUS en particulier. La création d’un guichet unique dédié à l’emploi et destiné aux jeunes serait à ce titre bénéfique (voir note Choisir les bons leviers pour insérer les jeunes non-qualifiés, juillet 2012).


Les emplois francs
Un dispositif prometteur à l’essai…
En parallèle, le gouvernement expérimentera à partir de 2013 à Marseille, Amiens, Clichy-sous-Bois/Montfermeil et Grenoble, le dispositif des "emplois francs" consistant à exonérer d’une partie des charges patronales les entreprises embauchant des jeunes diplômés de ZUS. Dans Choisir les bons leviers pour insérer les jeunes non qualifiés, l’Institut Montaigne prônait déjà la mise en place de ce dispositif en proposant de développer des "zones franches mobiles" (ou "zones franches inversées") dans le secteur marchand : au lieu d’attacher l’exonération fiscale au lieu d’implantation de l’entreprise, cet avantage serait lié à la personne du salarié sur un critère de lieu de résidence.

… qui doit être rigoureusement évalué avant sa généralisation
Cette mesure sera intégrée au projet de loi sur l’emploi des jeunes qui devrait être adoptée au Parlement avant la fin de l’année. La phase d’expérimentation de ce dispositif renseignera sur sa capacité à élargir les perspectives d’emploi des jeunes diplômés des banlieues et à apporter une plus grande mixité sociale au sein de l’entreprise (Enquête Banlieue de la République, octobre 2011).

Le gouvernement n’a pas encore précisé la nature et l’ampleur de l’évaluation qu’il souhaitait mettre en œuvre. Mais il ne pourra en aucun cas s’en passer avant l’éventuelle généralisation des emplois francs au reste du territoire.

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