Lui, représentait la sagesse et l'expérience ; elle devait insuffler des idées nouvelles avec l'énergie nécessaire pour les mettre en œuvre. Mais cette répartition des rôles, séduisante sur le papier, peine à se mettre en forme dans la réalité de l'exercice du pouvoir.
À mi-mandat, Kamala Harris n'a pas réussi à laisser son empreinte sur les dossiers dont elle a été chargée - disparates, il est vrai (crise de l'immigration mexicaine et relations avec les pays du Triangle Nord - le Guatemala, le Honduras et le Salvador - réforme du droit de vote, la sécurité mondiale de l’eau). À qui la faute ? Les conseillers des deux dirigeants renvoient la responsabilité à l'autre camp. Quoi qu'il en soit, le silence de Kamala Harris sur la scène politique est aussi assourdissant que le très grand enthousiasme généré par sa nomination. Sera-t-elle finalement capable de surmonter cette absence pour se lancer dans la course de 2024 si l'opportunité se présente ?
Trump-Pence, Biden-Harris : en route vers la présidentielle de 2024 ?
Si Donald Trump semble certain de se présenter à l'investiture républicaine de 2024 et convaincu de sa victoire, Mike Pence, de son côté, pose discrètement des jalons pour entrer dans la course.Il a commencé à faire campagne en vue des élections primaires locales, notamment en faveur d'un des candidats fustigés par Trump, et vante son rôle dans les réussites politiques de la précédente administration. De la sorte, Pence prend ses distances avec son ancien boss, faisant le pari que les électeurs républicains finiront par se lasser des turpitudes de Trump au profit d’un candidat capable de tenir ses promesses.
Et Biden ? Il a annoncé à plusieurs reprises qu’il entendait briguer un nouveau mandat dans deux ans, mais de nombreux élus et personnalités démocrates en doutent. Biden est peut-être sincère lorsqu'il affirme être le seul à pouvoir battre Trump en 2024. Ou peut-être veut-il gagner du temps et éviter que les républicains ne resserrent les rangs en vue des élections de mi-mandat de novembre − espérant ainsi empêcher une vague conservatrice tout en étant dans la position d’un "lame duck" (terme utilisé pour qualifier un président qui ne se représentera pas). Les démocrates et électeurs progressistes sont de plus en plus mécontents d'un Biden qu'ils estiment impuissant et immobile, incapable de tenir un discours musclé pour lutter contre un Parti républicain toujours plus extrémiste. De son côté, Kamala Harris, à qui on avait pensé il y a tout juste deux ans pour reprendre le flambeau, fait face à une bataille difficile. Sous le feu des critiques qui la considèrent comme une VP peu marquante, voire insignifiante, lui reprochant d’être dans le même immobilisme que le président, elle ne fait plus figure d'héritière naturelle. Si Biden ne se représente pas en 2024, elle aura probablement à affronter plusieurs challengers aux primaires : du jeune ministre des Transports Pete Buttigieg à la sénatrice progressiste Elizabeth Warren, le champ des possibles semble aujourd’hui plus ouvert que jamais dans le camp démocrate.
Les clés d'un duo efficace
Un duo présidentiel, aussi harmonieux soit-il, ne sera jamais à l'abri de tensions et de rivalités. Certains ingrédients peuvent néanmoins renforcer son efficacité, à commencer par la complémentarité. Origine ou genre, expérience ou tendance politique, chacun de ces facteurs peut permettre à un VP de compléter le profil d'un président et contribuer à en faire un dirigeant plus performant. Essentiel également, le soutien indéfectible (qui peut aller jusqu'au sacrifice) du VP au président car il permet d'ajouter un autre ingrédient indispensable à un bon partenariat : la confiance. Le vice-président doit pour cela être capable de faire passer sa loyauté envers le "commandant en chef" avant ses intérêts personnels, de servir l'agenda présidentiel, quelles qu’en soient les conséquences pour ses ambitions futures, et de n'exprimer de critiques qu’en privé. En substance, il doit se comporter en "meilleur collaborateur" du président plutôt qu’en co-président.
L'expérience a montré que, bien que le président ne doive rien à son numéro deux, d'un point de vue constitutionnel, il peut capitaliser sur cette complémentarité en confiant à son VP des responsabilités importantes, et en faire un véritable partenaire. Certes, les atomes crochus qui existent entre eux à l'origine peuvent expliquer que le VP se voie confier davantage de pouvoir, mais la dynamique ne s'installe dans la durée que si ce dernier accepte les missions successives qui lui sont confiées - peu importe leur nature - et les gère avec compétence. Et s'ils ne seront jamais des partenaires égaux, leur partenariat peut s’avérer "gagnant-gagnant" : un président renforcé par son VP et un VP doté d'un bilan sur lequel il pourra s’appuyer… pour d’autres lendemains.
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