Le gouvernement a présenté début juin un plan de soutien qui comprend notamment un fonds spécifique, doté dans un premier temps d’environ 600 millions d’euros, pour recapitaliser et consolider les sous-traitants les plus fragiles, ainsi qu’une enveloppe de 1,5 milliard d’euros sur trois ans pour soutenir les dépenses de R&D dans l’industrie avec l’ambition d’accélérer la décarbonation du transport aérien par des innovations technologiques. Début juillet, la Région Occitanie a également dévoilé un plan complémentaire de 100 millions d’euros pour la filière, dont 35 millions alloués à la formation et à la préservation des compétences et 43 millions d’euros pour accompagner la diversification de la sous-traitance et le développement des technologies vertes.
Airbus a depuis assumé le leadership en matière de décarbonation de l’industrie aéronautique en divulguant fin septembre trois concepts d’avions "zéro émission" (baptisés ZEROe) reposant sur l’hydrogène comme source d’énergie primaire. L’ambition affichée est de commercialiser d’ici 2035 au moins un appareil "zéro émission" capable de réaliser des vols de 3500 km, soit une distance comprise typiquement entre celle d’un trajet régional et d’un moyen-courrier. Un démonstrateur verrait a priori le jour entre 2026 et 2028. Cette dynamique offre en tout cas de belles perspectives aux prochaines générations d’ingénieurs et à la filière en général.
Mais il n’en demeure pas moins que même dans un scénario optimiste de retour à la normale sur le plan sanitaire en 2021 ou 2022, la taille du marché de l’aviation commerciale pourrait être durablement réduite par rapport au niveau d’avant-crise si les usages induits par la pandémie comme le recours à la vidéoconférence dans les relations de travail à distance persistaient ne serait-ce que partiellement. Lors d’une récente intervention à l’occasion du "DealBook Online Summit" organisé par le New York Times, Bill Gates a par exemple conjecturé que plus de la moitié des voyages d’affaires effectués avant-crise pourraient ne plus l’être dans le monde post-Covid. Zoom serait-il dès lors en train de devenir un concurrent plus sérieux pour Airbus que son rival historique Boeing ?
Notons enfin que la hausse de la tarification du CO2 (et d’autres gaz à effet de serre comme le monoxyde d’azote) émis par les compagnies aériennes pendant les vols pourraient avoir des conséquences sur l’industrie. En Europe pour l’instant, seuls les vols intra-européens sont aujourd’hui intégrés dans le système d’échange de quotas d’émission de l’UE (SEQE-UE). Dans le cadre de la lutte contre le changement climatique, diverses mesures comme un abaissement du plafond d’émissions autorisées, une diminution de la part des permis alloués gratuitement aux compagnies aériennes ou une extension du mécanisme aux vols extra-européens pourraient être mises en place. D’autres pays ou coalition de pays pourraient par ailleurs instaurer des dispositions similaires dans un futur proche.
Une opportunité de développer des technologies et des secteurs porteurs
Pour Toulouse, assurer le maintien et le développement des savoir-faire aéronautiques sur le territoire est donc un enjeu de taille dans le contexte actuel. Mais la bonne organisation de la filière et les moyens mobilisés par les pouvoirs publics (État et collectivités locales) permettent d’être "prudemment optimistes" à l’heure actuelle en dépit des difficultés qui ont été soulignées précédemment.
À court terme, des suppressions d’emplois seront inévitables et un certain nombre de jeunes qualifiés risquent d’avoir du mal à franchir les portes de l’industrie aéronautique. Il est donc impératif d’envisager localement des relais de croissance complémentaires afin de surmonter la crise. C’est le sens des propositions qui ont été récemment formulées par une commission indépendante présidée par Marion Guillou et parrainée par Jean Tirole dans un rapport remis le 29 septembre à Toulouse Métropole et à la Région Occitanie.
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