Je soulignerai cependant que pour les services spécialisés, la difficulté principale est le chiffrement des échanges, qui constitue le principal défi - comme je l'ai précisé plus haut - et qui n'a toujours pas trouvé de solutions satisfaisantes.
L'autre problématique européenne en matière de lutte contre le terrorisme est la surveillance des frontières, en l'occurrence celles extérieures de l'espace Schengen. J'ai toujours pensé qu'on ne pourra améliorer la situation que par une utilisation maximale des moyens de signalisation des personnes entrant dans l'espace (empreintes digitales, empreintes génétiques), un passage systématique au fichier Schengen et à l'ensemble des fichiers des États membres, en temps réel et grâce à des interconnexions. Le renforcement des moyens humains ne suffira pas, indépendamment de son importance. À la décharge de l'Union européenne, le renseignement reste de la compétence souveraine des États - il n'est pas communautarisé - et la lutte contre le terrorisme passe avant tout par le recueil d'informations.
La Commission cherche néanmoins à étendre systématiquement son périmètre, notamment à travers Europol, qui reste cependant un organisme de coopération policière et non de renseignement. À titre personnel, je reste opposé à la création d'un service de renseignement et de sécurité européen en l'absence d'État fédéral, ces derniers étant chargés de missions souveraines qui doivent demeurer de la responsabilité exclusive des États membres (lutter contre l'espionnage en particulier). Il y a cependant une très forte et excellente coopération entre tous les services spécialisés européens, et plus généralement avec tous les grands services mondiaux, avec des échanges en temps réel de renseignements. L'action des services peut cependant être entravée par des réglementations européennes, comme le RGPD, ou encore des décisions de la Cour de Justice de l'UE, qui réduisent considérablement l'accès aux données de connexion, mais là encore se pose ce débat entre liberté et sécurité.
Je conclurai sur un point qui me paraît capital : l'Europe doit absolument investir de façon massive dans les nouvelles technologies de communication, de big data, d'intelligence artificielle, plus globalement dans le cyber, au risque d'affaiblir considérablement nos capacités ou de nous rendre totalement dépendants. Et cela ne concerne pas uniquement la lutte antiterroriste.
Copyright : Christophe ARCHAMBAULT / AFP
Ajouter un commentaire