Poursuivant cette stratégie en cherchant à étendre le jihad à l'ensemble du Mali, le chef terroriste touareg, Iyad ag Ghali, est ainsi parvenu à recruter, financer et équiper plusieurs combattants peuls maliens de la région malienne du Macina dirigés par le prédicateur et poète, Hamadoun Kouffa, fondateur du Front de Libération du Macina, devenu katibat Ansar Eddine-Sud, puis katibat Macina.
L’embrasement généralisé du centre du Mali est largement dû à ce recrutement spécifique, ce qui est aussi vrai au Burkina Faso où le jihad a démarré par la création d'une autre organisation/faux-nez “local”, Ansarul Islam, dont les combattants sont en grande partie des membres de la communauté peule burkinabé. Ses liens avec la katibat Macina d’Al Qaïda ont rapidement été révélés et l’ensemble de ces groupes sont aujourd’hui intégrés dans la coalition jihadiste du JNIM créé en 2017.
Pour l'Etat Islamique, la dynamique a été similaire. A l'origine, ayant fait scission d’AQMI qu’ils jugeaient trop prudente et au seul bénéfice des chefs maghrébins, les jihadistes du Mouvement pour l'Unification et le Jihad en Afrique de l’Ouest (MUJAO), présents dans la ville de Gao en 2012, avait commencé à instrumentaliser le sentiment d’abandon, de discrimination et de revanche contre l’Etat de plusieurs centaines de jeunes peuls maliens ou nigériens. Ils se sont éparpillés à l’arrivée des forces militaires françaises en 2013, avant de se retrouver et de fonder la branche locale de l'Etat Islamique. Malgré un état-major longtemps constitué d’arabes originaires du Sahara Occidental ou d’Algérie, la grande majorité des troupes et des chefs de groupes intermédiaires de l’Etat Islamique au Sahel sont aujourd’hui peuls, notamment originaires des régions du Soum ou de l’Oudalan (Burkina Faso) ou situées au nord de Ouallam et Tillabéri (Niger).
Les Peuls du Macina et le jihad libérateur
Une triple remise en cause de l'ordre établi (instrumentalisation des inégalités économiques et sociales au sein des communautés peules ; allumage des violences entre les communautés ; dénonciation et rejet de l’Etat) est à l’origine de l’explosion du cadre socio-politique en vigueur, au profit d’une révolte armée et violente.
Lors de la création du Front de Libération du Macina, en 2015, ce groupe armé peul a initialement été perçu comme un nouveau groupe d’auto-défense communautaire (à l’image des chasseurs dozos bambaras, de la milice dogon Dan Na Ambassagou ou des anciens Ganda Izo/Ganda Koy songhaï-peul). Tout en générant une crainte auprès des autres communautés, ces groupes d’auto-défense restent perçus comme légitimes par les populations qui estiment nécessaire de devoir se protéger dans un vaste territoire peu contrôlé par l’armée et la police maliennes.
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