C'est "une défaite pour la diplomatie occidentale et un clou supplémentaire dans le cercueil des accords de Dayton", déplore Tony Barber, éditorialiste au FT, elle montre que "les gouvernements occidentaux manquent de volonté politique pour défendre leurs valeurs et affirmer leur autorité dans une partie troublée du continent européen où les États-Unis, l'UE et l'OTAN disposaient globalement d'une suprématie depuis le milieu des années 1990". "Si cette humiliation suscite peu d'écho à Bruxelles et dans les États membres, ce n'est certainement pas le cas dans les Balkans, à Moscou et à Pékin, où elle sera perçue, à juste titre, comme signe du déclin de l'Occident et de son incapacité à faire preuve de détermination pour défendre sa position, même quand il dispose d'instruments puissants", relève Kurt Bassuener. Dès lors que les Occidentaux ne jugent plus nécessaire de mentionner le Haut représentant dans une résolution importante du conseil de sécurité, son autorité politique se trouve affaiblie, observe Tony Barber, les dirigeants serbes de Bosnie sont à l'affût de tout ce qui pourrait détruire les accords de Dayton et cherchent, avec l'aide de la Russie, à abolir le poste de Haut représentant.
La menace de sécession est à nouveau brandie par le leader des Serbes de Bosnie
Ce vote controversé aux Nations Unies intervient dans un contexte de montée des forces centrifuges, dont la cause immédiate a été la décision du prédécesseur de Christian Schmidt, l'Autrichien Valentin Inzko, d'imposer l'été dernier une loi sur la pénalisation de la négation des génocides, qui vise en fait celui de Srebrenica. Le Haut représentant a en effet été doté par le "conseil de mise en œuvre de la paix" ("peace implementation council" - PIC), créé en décembre 1995 à Londres, de larges prérogatives, étoffées en 1997 (les "pouvoirs de Bonn"). "Ma conscience me dicte d'avoir recours aux pouvoirs de Bonn pour imposer cette loi", a-t-il confié au FT. "Inzko avait été mis en garde par la communauté diplomatique de Sarajevo s'agissant d'une mesure qui n'apporterait rien de concret et ne ferait qu'envenimer la situation", écrit Michael Martens, mais "avec le courage des derniers jours [il a quitté son poste peu après - ndr], il s'est décidé en faveur de cette législation, dont la Bosnie gère depuis les conséquences". Bien que Christian Schmidt ait marqué que la loi sur le génocide "ne visait pas à stigmatiser les Serbes de Bosnie en tant que peuple, mais des individus", note le FT, les responsables serbes, qui contestent la réalité du génocide de Srebrenica, dénoncent une atteinte à la liberté d'expression.
Milorad Dodik, le Président de la republika srpska (RS), qui ne reconnaît pas l'élection de Christian Schmidt, a décidé de boycotter les institutions communes et projette le vote par le parlement serbe de Banja Luka d'une loi autorisant la RS à se doter de sa propre armée, "décision potentiellement explosive", souligne le Spiegel. Plus de 120 décisions du Haut représentant pourraient devenir caduques et mettre en cause l'intégrité territoriale de la Bosnie-Herzégovine, s'inquiète Marion Kraske, encline à penser que le dirigeant de la RS pourrait, cette fois, mettre à exécution sa menace d’organisation d’un référendum sur l'indépendance. L'objectif premier de Milorad Dodik est de retirer le filet de protection internationale avant de démanteler les institutions bosniennes, explique le new Statesman.
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