Le réchauffement climatique, en démontrant l'inefficacité de l'action des gouvernements, augmente aussi les risques de conflits violents. Au Moyen-Orient, les cas de la Tunisie, de l'Égypte et de la Syrie en sont de parfaits exemples. De 2006 à 2011, le Nord syrien a connu une sécheresse extrême, aggravée dans ses conséquences par la gestion calamiteuse des autorités. Le "printemps syrien" a de nombreuses causes : avant tout l'extrême brutalité de la répression face aux protestations initiales. Mais la sécheresse a joué un rôle : le soulèvement populaire s'est manifesté dans les villes les plus affectées par la disette et l'afflux de centaines de milliers de Syriens, réfugiés climatiques dans leur propre pays. Toujours au Moyen-Orient, le changement climatique exacerbe les tensions entre des pays comme l'Égypte, le Soudan et l'Éthiopie à partir de la poursuite par ce dernier du projet de grand barrage sur le Nil.
Monde postcarbone
En Asie centrale, le réchauffement de la planète aggrave également les tensions autour de l'accès à l'eau, entre le Kazakhstan, le Kirghizistan, le Tadjikistan et l'Ouzbékistan. Sur le Mékong, la construction en amont d'un barrage par la Chine, combinée avec la sécheresse déjà existante, conduit à une détérioration des relations déjà difficiles entre Beijing et les pays en aval du fleuve. En Amérique centrale, le changement climatique associé à l'insécurité et à la stagnation économique, renforcées toutes deux par le poison de la corruption, a poussé des centaines de milliers de personnes sur les routes.
On pourrait multiplier ainsi le nombre des situations illustrant les conséquences géopolitiques du changement climatique et le lien entre l'augmentation de la température et la multiplication des conflits. Pour avoir une vision plus complète, il convient aussi de considérer l'impact des mesures prises pour lutter contre le réchauffement climatique sur l'équilibre géopolitique du monde. Des pays comme le Chili, qui dispose en grande quantité de lithium, indispensable aux batteries électriques, ou comme la République démocratique du Congo (RDC), qui contient 80 % des ingrédients nécessaires à la fabrication des téléphones portables, sans oublier bien sûr la Chine avec son quasi-monopole sur les terres rares, sont ou seront dans la catégorie des bénéficiaires du changement.
D'une manière ou d'une autre, l'objectif d'un monde postcarbone transforme les équilibres géopolitiques existants au détriment des pays producteurs des industries fossiles. En particulier ceux qui - comme la Russie - ne créent pas de richesses et se contentent, pour l'essentiel, de vivre de leur exploitation des hydrocarbures.
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