Concrètement, Saïed souhaite dépasser le système des partis politiques qu’il juge clientélistes et coupés de la réalité sociale. Il propose à la place une forme d’organisation sociale beaucoup plus horizontale et participative. Il ne croit pas non plus au clivage identitaire "Bourguibiste contre islamiste" ou "progressiste contre conservateur" et parle à la place d’un "nouveau contrat social". Sur la place du religieux dans la politique, il a une conception originale, surtout dans le contexte tunisien : il considère que l’Etat est un être imaginaire et fictif qui ne peut avoir de religion. Pour lui, l’islam n’est pas la religion de l’Etat mais la religion de la société. À tous ces titres, Kaïs Saied peut être présenté, je crois, comme "post-bourguibien".
Sur le plan économique, il a dit très peu de choses, si ce n’est qu’il voulait que 460 hommes d’affaires impliqués dans les affres de l’ancien régime soient obligés d’investir dans les régions déshéritées, avec capacité à retirer leur argent uniquement lorsque le chômage y aura baissé.
Le duel qui se profile est inédit mais annonce aussi une restructuration radicale du paysage politique tunisien. Qu’est ce qui est en jeu dans ce scrutin ?
Si les partis issus du camp de Bourguiba n’arrivent pas à s’entendre pour les élections législatives, c’est à une totale recomposition du champ politique que nous allons assister, avec un bloc islamiste réduit en influence, un émiettement considérable du camp dit "moderniste", et l’arrivée de nouveaux partis sans identité idéologique, identifiés à une personne. On peut s’attendre par ailleurs à la percée d’un nouveau parti, "Ich Tounsi" d’Olfa Rambourg, qui a fait un travail considérable de mobilisation sur les réseaux sociaux et qui semble trouver de l’écho auprès, notamment, de la jeunesse éduquée et connectée.
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