Au delà du cadeau à Benyamin Netanyahou, il faut replacer cette déclaration dans le contexte de la politique américaine au Moyen-Orient et particulièrement en Syrie. L’idée est de trouver une forme de réponse à ce qui constitue un échec pour l’Amérique et ses alliés européens: le maintien d’Assad au pouvoir grâce au soutien de l’Iran et à la Russie. De plus la Russie a désormais des relations privilégiées avec Israël, un pays qui est devenu de plus en plus "russe". En effet, de 1988 à 1998, plus d’un million de Russes sont arrivés en Israël, et la population d’origine russe constitue aujourd'hui près de 20 % de celle du pays. Il existe aussi une relation privilégiée trilatérale, entre Netanyahou et Trump et entre Netanyahou et Poutine : ils sont autoritaires, ont le même langage, la même culture politique, et sont porteurs d’un modèle de démocratie illibérale. Israël a également, dans le même registre, des relations privilégiées avec l’Inde de Narendra Modi et la Chine de Xi Jinping. Israël est donc sorti de son isolement diplomatique certains diraient de la mauvaise manière, l’évolution du monde étant à l’avantage du respect de la force avant tout.
Israël et l’Iran sont des ennemis jurés, mais en même temps personne ne souhaite vraiment une guerre. Israël est conscient du fait qu’il est difficile de détruire l’arsenal nucléaire iranien, et les Iraniens dont le régime est affaibli par l’isolement sont également conscients de la supériorité de l’état Hébreu.
Trump veut donc montrer qu’il existe encore au Moyen-Orient puisqu’il peut jouer sur les élections israéliennes. Par ailleurs existe aussi l’idée que pour l’Iran, le Hamas et le Hezbollah, le meilleur ennemi est le meilleur allié de Donald Trump, à savoir Bibi Benjamin Netanyahu.
Comment le retour de cette question impacte-t-il le conflit syrien et la position de Bachar el-Assad sur les scènes domestique et internationale ?
MICHEL DUCLOS
La reconnaissance de l’annexion du Golan par Israël renforce l’argumentation de l'"axe de la résistance" (Iran-Syrie-Hezbollah-Hamas). Elle constitue un déni de droit si flagrant qu’elle ne peut qu’aviver, dans la sensibilité des opinions arabes (et a fortiori de l’opinion syrienne), l’hostilité à l’égard d’Israël et de la politique américaine dans la région. C’est donc un cadeau fait principalement à l’Iran et donc, sous réserve d’un aspect sur lequel je reviens dans un instant, à Bachar el-Assad. C’est d’ailleurs d’autant plus le cas que le communiqué du Département d’Etat invoque la menace iranienne sur le Golan comme justification de la décision du Président Trump : cela ne peut que renforcer la légitimité de la République islamique comme chef de file de la défense des droits des Arabes.
Comme cela avait été le cas lors du transfert de l’ambassade américaine à Jérusalem, la reconnaissance de l’annexion du Golan par Israël va constituer un obstacle au mouvement que l’on observait – et qui fait pourtant partie du dessein de Trump pour le Proche-Orient – d’un rapprochement entre les Etats du Golfe et Israël.
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