L'Amérique a échoué face aux talibans en Afghanistan, elle n'a pas su s'imposer en Syrie, et son plan de paix israélo-palestinien n'a aucune chance d'aboutir. Reste l'Iran, où la ligne dure de Donald Trump peut l'aider à se faire réélire en 2020.
L'économie iranienne commence à s'effondrer sous le poids des sanctions américaines. Le "radicalisme" de Donald Trump nourrit un mécontentement populaire qui ne fait que grandir avec l'augmentation du coût de la vie. Mais avant qu'il ne parvienne, éventuellement, à son objectif - l'effondrement du régime sur lui-même -, le président américain, encouragé sur cette voie par son conseiller à la sécurité nationale, John Bolton, renforce l'"extrémisme" iranien, et en particulier l'influence du général Qasem Soleimani, le charismatique chef des brigades Al Qods, le corps d'élite des Gardiens de la révolution.
Toutes proportions gardées, cet encouragement aux "radicaux", direct cette fois-ci, on le retrouve dans le soutien sans faille apporté par l'administration Trump à la majorité au pouvoir en Israël qui vient de sortir victorieuse des dernières élections. Dans le "plan de paix" sur lequel travaille depuis des mois le gendre du président Trump, Jared Kushner, il ne serait même plus fait référence à la solution des deux Etats.
L'Amérique se retire du Moyen-Orient
Le paradoxe est que ce durcissement de Washington à l'égard de l'Iran, tout comme ce soutien inconditionnel à Netanyahu, a lieu dans un contexte global de retrait des Etats-Unis, du Moyen-Orient sinon du monde.
Pour comprendre cette apparente contradiction, il existe un parallèle intéressant, sinon une clef de lecture. À la fin des années 1960, l'Amérique souhaitait, plus que tout, s'extraire du bourbier vietnamien. Cela passait par l'ouverture à la Chine et l'élargissement temporaire du conflit au Cambodge. Une extension qui eut pour conséquence directe l'arrivée au pouvoir des Khmers rouges et un génocide dans lequel près du tiers de la population disparut. Mais il s'agissait, pour Richard Nixon et son conseiller pour la sécurité, Henry Kissinger, de "sortir par le haut".
L'Asie des années 1970 n'est pas le Moyen-Orient d'aujourd'hui. Mais on peut se demander si la politique américaine à l'égard de l'Iran, sinon d'Israël, ne traduit pas la même volonté de "s'extraire du Moyen-Orient" en masquant, derrière les apparences de "l'escalade de l'action", la réalité du retrait à venir.
Un alibi pour 2020
À Washington, où je me trouvais il y a quelques jours, mes interlocuteurs - proches des lieux du pouvoir - me parlaient sans détour. L'Amérique a échoué en Afghanistan, me disaient-ils. Les talibans sont en train de l'emporter. L'Amérique a échoué en Syrie, les Russes ont gagné la partie. Le plan de paix israélo-palestinien concocté par Jared Kushner, le gendre et conseiller du président Trump, n'a aucune chance de devenir réalité. Il est bien trop déséquilibré en faveur des Israéliens. Mais il constitue un parfait alibi, pour un président candidat à sa succession en 2020.
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