Ce réveil de "l'Amérique des valeurs" se produit précisément au moment où la Chine est le moins prête à l'accepter. Tel le prince de Metternich dans la pièce L'Aiglon, d'Edmond Rostand, Xi Jinping a tendance à vouloir dire à la face du monde : "Mais je suis tout, mais je peux tout. Je ne tolère pas que vous me fassiez la leçon sur les droits de l'homme ou pire encore que vous traitiez une "province de la Chine", Taïwan, comme s'il s'agissait d'un État indépendant. Le vent d'est l'emporte désormais sur le vent d'ouest. Ne croyiez pas que dans votre sensiblerie démocratique à l'occidentale vous soyez majoritaires. Comment le monde peut-il continuer à croire aux valeurs que vous portez, s'il ne respecte plus ce que vous êtes devenu ?".
Dans sa légitime résistance aux provocations chinoises, le monde occidental doit résister à la tentation de l'escalade verbale. Ce n'est pas celui qui parle le plus fort qui l'emporte. C'est celui dont les résultats et les progrès sont les plus convaincants. La meilleure façon pour l'Europe et les États-Unis de contrer les défis chinois et russes est de faire preuve d'unité face à eux : et de confiance en nous-mêmes.
Intégrer les leçons de l'Histoire
Mais le monde occidental doit aussi intégrer les leçons de l'Histoire. Il n'est peut-être pas opportun de dire aux Chinois que "ni l'Europe ni la France ne peuvent être utilisées comme des paillassons". Ne nous sommes-nous pas, nous Occidentaux, métaphoriquement, sinon réellement, essuyés les pieds sur des tapis chinois (que nous dérobions aussi) quand nous nous comportions comme les maîtres absolus de la Chine à partir de la deuxième moitié du XIXe siècle ? Les Chinois nous traitent comme nous les avons traités, trop heureux de consolider la confiance de leurs citoyens en soulignant leur force, à partir de nos faiblesses.
Dans la phase de "mondialisation malheureuse" sinon de début de démondialisation que nous traversons, les nationalismes explosent. Dans un tel contexte, "l'autre" est le bouc émissaire idéal. Au risque, en s'insultant constamment, de favoriser la montée des réflexes anti-asiatiques et anti-blancs…
Avec l'aimable autorisation des Echos (mise en ligne le 28/03/2021)
Copyright : JIM WATSON / AF
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