On dit qu’il vient d’effectuer un voyage secret à Moscou ; cela n’est pas sûr mais il est certain en revanche que les Russes ont entretenu avec lui ces dernières années un dialogue soutenu. Dans l’autre camp, sans surprise, on trouve comme ailleurs, la Turquie et le Qatar.
Et puis, il y les Européens. À Misrata, en ce moment, des manifestants défilent dans la rue en dénonçant l’aide de la France au Maréchal putschiste. Chacun sait en effet que le gouvernement français a appuyé l’ANL il y a quelques années par l’envoi de forces spéciales, voire des frappes aériennes, lorsque les troupes du Maréchal Haftar ont liquidé des poches de djihadistes qui s’étaient installées au sud et à l’est du pays. Un des atouts dont dispose le Maréchal vis-à-vis des Européens est sa capacité à faire barrage au retour des Libyens partis en Syrie dans les rangs de Daesh, ainsi qu’à empêcher le départ des migrants vers l’Europe. Bien qu’ayant souvent paru en concurrence, les Italiens et le Français, par leurs médiations, ont contribué à conférer une honorabilité au personnage. Seuls les Allemands – qui s’étaient abstenus sur la résolution 1973 autorisant l’intervention de 2011 – tiennent ferme dans leur réprobation du Maréchal Haftar. Les Britanniques s’efforcent de développer une action internationale en faveur d’un cessez-le-feu.
En apparence cependant, la communauté internationale reste unie dans son appel à la désescalade et son soutien à la médiation onusienne. On est encore loin de ce point de vue d’une "globalisation du conflit", auquel d’ailleurs Washington s’intéresse peu. Des "signaux faibles" montrent cependant les limites de l’unité des puissances concernées : l’Egypte ne s’est jointe à aucun appel commun ; la Russie n’a pas voulu que l’ANL soit mentionnée dans un texte du Conseil de Sécurité à New York ; chez les Européens, de forts soupçons pèsent sur le rôle jugé ambigu joué par la France. Très engagé sur le dossier, M. Le Drian se trouvait encore en Libye, où il a de nouveau rencontré M. Sarraj mais aussi le Maréchal, quelques jours avant l’offensive sur Tripoli. En termes d’image, la diplomatie française joue gros dans cette affaire : elle a donné l’impression au cours des dernières années de se compromettre avec un apprenti dictateur ; cette attitude risquée peut trouver une justification si cela lui donne les moyens aujourd’hui de faire passer des messages convaincants d’arrêt des combats au Maréchal Haftar. Cela serait d’autant plus important qu’au moment où ce dernier cherche à se réapproprier le rôle d’"homme fort" galonné, suscitant l’indulgence des puissances étrangères pour son hostilité aux islamistes, les Algériens et les Soudanais montrent que l’aspiration à se débarrasser des régimes autoritaires reste vivace dans la région.
Copyright : Mahmud TURKIA / AFP
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