De même, en Normandie, et dans la Région Sud, la forte conscience écologique (avec un sentiment plus fort que la moyenne que notre modèle économique n’est pas compatible avec la protection de l’environnement) ne se traduit pas par un vote plus élevé que la moyenne pour Jean-Luc Mélenchon. Celui-ci va même jusqu’à régresser en Normandie.
À l’inverse, en Île-de-France, la conscience écologique, un peu moins développée que la moyenne nationale, n’empêche pas Jean-Luc Mélenchon de réaliser son meilleur score régional.
Enfin, les Pays-de-la-Loire sont l’une des deux régions avec la Normandie où le sentiment de bonheur est le plus fort (81 % des habitants ont le sentiment d’être heureux) et où, paradoxalement, Marine Le Pen enregistre l’une des plus nette progression, passant de 16,6 % des voix en 2017 à 20,8 % en 2022, soit une hausse de 4,16 points. La progression de Marine Le Pen est également un peu plus marquée en Normandie que dans les autres régions du baromètre, de 3,2 points.
Rappel de la typologie des Français du Baromètre du Territoires
L’enquête menée dans le cadre du baromètre des territoires a permis de saisir deux grandes dimensions qui structurent les opinions des Français, à savoir leur situation financière et le rapport à leur territoire de vie. Ces deux grandes tendances font émerger quatre catégories de Français, les affranchis, les enracinés, les assignés, et les sur le fil.
Affranchis
Les affranchis représentaient 21 % de la population en 2018, et 20 % en 2021. Les cadres sont surreprésentés dans cette catégorie de la population. Ils sont nombreux à avoir moins de 35 ans et à être citadins, en particulier dans des agglomérations de plus de 100 000 habitants. Ils sont plutôt caractérisés par leur sentiment d’avoir choisi leur vie (80 %, contre 59 % au niveau national), par le fait qu’ils ont des métiers télétravaillables (c’est le cas de 55 % d’entre eux, contre 40 % au niveau national), par le fait qu’ils bouclent leurs fins de mois sans se restreindre (79 % contre 64 % en moyenne).
Le capital culturel et économique élevé de cette partie de la population leur permet de s’adapter facilement aux changements et de rester maîtres de leur destin. Leur ancrage territorial est plus faible que celui des autres catégories de la population et ils sont surreprésentés en Île-de-France.
Enracinés
Les enracinés voient leur part bondir de 22 à 31 % de la population entre fin 2018 et fin 2021. Les retraités sont surreprésentés. 47 % d’entre eux vivent dans une commune rurale ou dans une ville de moins de 20 000 habitants, contre 40 % pour l’ensemble de la population française. Ils sont plus nombreux à avoir estimé qu’ils ont choisi leur vie (73 %), et sont plus souvent propriétaires, pour 74 % d’entre eux. 78 % d’entre eux bouclent leurs fins de mois sans se restreindre.
Cette catégorie de la population mène une vie qui lui convient, et apprécie son lieu de vie qu’elle ne souhaite pas quitter. Contrairement aux assignés, leur enracinement est choisi plutôt que contraint.
La forte progression de cette catégorie s’explique par la crise sanitaire liée à l’épidémie de Covid-19. Les restrictions pesant sur les déplacements ont en effet provoqué un mouvement d’enracinement de la population française dans son ensemble.
Assignés
Les assignés représentent 24 % de la population fin 2021, contre 25 % fin 2018. Ils sont nettement moins nombreux à se sentir heureux dans leur vie (56 %, contre 78 % en moyenne), et beaucoup moins nombreux à avoir le sentiment d’avoir choisi leur vie - 33 % en ont le sentiment, contre 59 % en moyenne. Les ouvriers et les 35-64 ans y sont légèrement surreprésentés. Ils sont présents sur l’ensemble du territoire, quelle que soit la taille de l’agglomération dans laquelle ils vivent.
Cette catégorie de la population se caractérise aussi par ses difficultés financières (56 % bouclent leurs fins de mois en se restreignant). Leurs territoires de vie sont marqués par les difficultés. Leur manque de capital socio-culturel les empêche de changer de cadre de vie alors qu’ils y aspirent.
Sur le fil
Les sur le fil représentent 25 % de la population fin 2021, contre 32 % fin 2018. Ils sont plutôt moins nombreux à avoir le sentiment d’avoir choisi leur vie (51 %). Les femmes et les moins de 50 ans y sont surreprésentés. 48 % bouclent leurs fins de mois en se restreignant (36 % en moyenne). Comme les assignés, leur vie est marquée par un grand nombre de difficultés. Mais cette population est plus jeune, plus mobile et a un capital socio-économique plus élevé. En revanche, contrairement aux affranchis, leur mobilité est subie plutôt que choisie.
La forte régression de cette catégorie de la population s’explique par le recul des inquiétudes du quotidien par rapport à la crise des gilets jaunes de la fin 2018.
Billet rédigé avec l’aide d’Alexandre Goddard et Félicité Schaeffer, assistants chargés d’études.
Copyright : Emil Helms / Ritzau Scanpix / AFP
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