Présidente de la Commission de la défense du Bundestag, Marie-Agnès Strack-Zimmermann considère que les Occidentaux ne devraient pas négocier sous la menace, elle juge impraticable, dans les circonstances présentes, l’exploitation de Nord Stream 2 et invite à réfléchir à la livraison d’armes défensives à l’Ukraine, prise de position contestée, y compris dans son parti. La ministre de la Défense social-démocrate a également tenu des propos fermes à l'égard de la Russie. Pour son premier déplacement officiel à l'étranger, Christine Lambrecht s'est rendue en Lituanie, où elle a admis "comprendre très bien les inquiétudes des Ukrainiens" et déclaré sans ambiguïté que "la Russie est l'agresseur". "Aujourd'hui, nous devons cibler Poutine et son entourage. Les responsables d'une agression doivent en subir personnellement les conséquences, par exemple ne plus pouvoir voyager pour faire leur shopping à Paris sur les Champs-Elysées".
Longtemps, le chancelier Scholz s'en est tenu à des propos généraux. Lors d'un premier contact, téléphonique, avec le Président russe, le 21 décembre 2021, il a "fait part de ses préoccupations" sur le renforcement de la présence militaire russe à proximité de l'Ukraine, a évoqué la "nécessité urgente d'une désescalade" et de progrès dans les négociations en format "Normandie" (des consultations ont réuni, début janvier, à Moscou son conseiller diplomatique, Jens Plötner, et ses homologues, français, russe et ukrainien). Dans son allocution du Nouvel an, Olaf Scholz a mentionné tout le prix qu'il attache au principe de l'inviolabilité des frontières. Compte tenu de son histoire, la nouvelle Ostpolitik de l’Allemagne ne pouvait qu'être européenne. Au Bundestag, le 12 janvier, Olaf Scholz n'a pas confirmé les affirmations du tabloïd Bild qui lui prêtait l'intention de rencontrer rapidement Vladimir Poutine pour donner un "nouveau départ" à la relation Berlin-Moscou. Il a aussi répété à plusieurs reprises que Nord Stream 2 est "un projet économique" dont le sort devait être décidé "de manière totalement apolitique par une agence en Allemagne". Recevant le 18 janvier le secrétaire général de l’OTAN, Olaf Scholz a durci son discours. Admettant qu’en cas de nouvelle agression russe contre Kiev, toutes les options seraient sur la table, il s’est référé lui aussi à la déclaration germano-américaine du 21 juillet 2021, par laquelle le gouvernement de grande coalition (auquel il appartenait) s’engageait à prendre des mesures, y compris des sanctions, si la Russie utilisait l’énergie comme arme contre Kiev.
Un SPD qui apparaît divisé, à la différence de ses deux partenaires de coalition
Dans le débat, récurrent en Allemagne, qui oppose Russlandversteher et Russlandkritiker, Olaf Scholz ne démontre pas de sympathie particulière envers le Kremlin. Tout en ayant plaidé pendant la campagne électorale en faveur d'une "nouvelle Ostpolitik" et du maintien du dialogue avec "des gouvernements très différents du nôtre", il apparaît, sur cette question également, proche d'Angela Merkel. L’Ostpolitik, inscrite dans l'ADN du SPD, est associée à deux personnalités tutélaires, Willy Brandt et Helmut Schmidt. Mais la figure du premier chancelier social-démocrate de l’histoire de la RFA, incarnation du dialogue avec Moscou, est dominante au sein du SPD, par rapport à celle d’un Helmut Schmidt qui s’était montré ferme lors de la crise des euromissiles, même si, tardivement, il avait manifesté une certaine compréhension à l’égard de la Russie de Poutine.
Aujourd’hui, les sociaux-démocrates apparaissent divisés. Ceux qui, comme Michael Roth, le nouveau président de la Commission des affaires étrangères du Bundestag, entendent contrer les menaces et les manœuvres de déstabilisation russes s’opposent à ceux qui continuent de croire aux vertus du "Wandel durch Handel" et qui, à l'instar du Président Steinmeier, estiment que "les liens énergétiques sont presque le dernier pont entre la Russie et l'Europe". Ainsi, le secrétaire général du SPD appelle les Verts à ne pas remettre en cause l'avenir de Nord Stream 2 : "Notre palette d'instruments diplomatiques offre heureusement plus de possibilités que la simple fermeture d'un gazoduc".
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