Le troisième candidat déclaré est au contraire un fidèle héritier de la chancelière : Armin Laschet, chef de l’exécutif de Rhénanie du Nord-Westphalie, le Land le plus peuplé d’Allemagne (la région de la Ruhr et de Cologne). Restent deux outsiders : le ministre de la Santé, Jens Spahn, et le ministre-président de Bavière, Markus Söder. Au total, ils sont cinq à se positionner ; le futur candidat chancelier de la droite aux élections fédérales de septembre 2021 sera l’un d’eux. Angela Merkel, 66 ans, a exclu de briguer un cinquième mandat, bien que la Loi fondamentale allemande (Constitution) ne lui pose aucune limite. Avec 16 ans de chancellerie, elle égalera l’an prochain le record détenu par Helmut Kohl, le chancelier de la réunification. Elle entend quitter la politique, avec le sentiment du devoir accompli.
La succession marquera une rupture. Les cinq impétrants se distinguent de Merkel non seulement par leur genre, mais aussi parce qu’ils sont originaires de l’Ouest du pays. Les Allemands de l’ex-RDA, sous-représentés dans la vie politique nationale, avaient la satisfaction d’avoir l’une des leurs à la chancellerie. Ce ne sera plus le cas. Les prétendants de 2020 ont le profil type du politicien ouest-allemand, qui fut celui d’un Helmut Kohl ou d’un Gerhard Schröder à leur arrivée au pouvoir : un homme politique provincial, pur produit du système fédéral, attaché à ses racines locales, sans guère d’expérience internationale. Tous sont des atlantistes de raison et des pro-européens de cœur ; aucun n’est souverainiste. Tous sont convaincus que la France est le principal partenaire de l’Allemagne au sein de l’Union européenne et que l’intégration européenne doit être poursuivie. Tous partagent la doctrine allemande traditionnelle sur la nécessaire rigueur dans la gestion des finances publiques.
Seul Norbert Röttgen, 55 ans, a une expérience des relations internationales. Il préside depuis 2014 la commission parlementaire des Affaires étrangères. Ce juriste est le vice-président d’Atlantik-Brücke, une association berlinoise qui promeut les liens de l’Allemagne avec les États-Unis. Au Bundestag, il s’est élevé contre les menées du Président russe Vladimir Poutine en Europe et s’est opposé aux visées de l’électronicien chinois Huawei sur les réseaux 5G en Allemagne. Mais par manque de soutien dans l’appareil du parti, il a le moins de chances d’être élu. Le vrai match se joue entre les quatre autres.
Pour ceux-là, le Covid-19 a bouleversé la donne. En début d’année, les observateurs donnaient Armin Laschet gagnant. Ce catholique de 59 ans, incarnant la ligne centriste de Merkel, aurait pu être élu dans un fauteuil à la présidence de la CDU. Ensuite, ce n’aurait été qu’un jeu d’enfant de se faire désigner candidat de la droite, puis de s’installer à la chancellerie fédérale en 2021. Las ! Sa gestion hasardeuse de la crise sanitaire dans son Land de Rhénanie du Nord-Westphalie a plombé sa candidature. Lui se défend en disant qu’il a joué de malchance, sa région ayant été affectée plus que d’autres en Allemagne. C’est oublier qu’il a aussi multiplié les faux-pas. Il a tardé à confiner la population. Contraint par les autres Länder de s’aligner, il a derechef joué à contretemps lors du déconfinement en pressant d’accélérer le retour à la normale alors que les inquiétudes restaient vives.
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