Ils ont choisi comme nouveau leader national le président de la Galice, Alberto Nuñez Feijóo, qui, fort de quatre majorités absolues (2009, 2013, 2016, 2020), apparaît comme une garantie de succès.
Ce passage de la présidence d’une grande région au leadership national, et peut-être à celui du gouvernement national, constitue une nouveauté absolue. Jusque-là, une répartition national-régional semblait organiser les carrières. Tant Felipe González que José María Aznar, José Luis Rodríguez Zapatero et Pedro Sánchez n’avaient jamais été ministres avant d’être présidents du conseil (Aznar avait présidé pendant deux ans la junte de Castille-Léon, mais à une époque où la communauté autonome ne disposait pas de toutes ses compétences). Leur force tenait au contrôle du parti et c’est en présidents qu’ils ont appris à gouverner. Seuls Leopoldo Calvo Sotelo et Mariano Rajoy avaient exercé des fonctions ministérielles avant de devenir chef du gouvernement. Chez les deux hommes d’ailleurs, trait frappant, on trouve un primat de l’administration sur le politique. Si d’aventure Nuñez Feijóo devenait chef du gouvernement, on aurait une première. Serait-ce le signe annonciateur de nouvelles circulations politiques, de nouvelles préparations au gouvernement du pays ?
Sécession ?
Les communautés autonomes sont de « petits pays ». Elles ont un président, un gouvernement, un parlement, un hymne, un drapeau. Des conférences de présidents réunissent les présidents régionaux avec le président du gouvernement. Aux grandes dates nationales, les présidents régionaux font partie des invités de l’État. Protocolairement, ils passent juste après le président du gouvernement (et devant les anciens chefs de gouvernement). Mais certains présidents sont plus présidents que d’autres… et on retrouve là les différences historiques des Espagne(s). Les présidents catalans et basques se sont toujours estimés supérieurs à leurs homologues. Ils boycottent depuis plus de vingt ans la fête nationale du 12 octobre et, depuis plus de quinze ans la conférence des présidents.
C’est naturellement avec la Catalogne que le conflit est allé jusqu’à son point extrême. Entre 2012 et 2017, en embrassant un projet indépendantiste à la fois ancien et complètement nouveau, Artur Mas d’abord, puis Carles Puigdemont ont voulu démontrer que la Catalogne n’était pas une communauté autonome comme une autre, question complexe que je détaille dans Le labyrinthe catalan (2019). Pour cela, ils ont utilisé la charge symbolique et historique qui entoure la fonction de président de la Généralité de Catalogne, y compris en mobilisant l’histoire, non sans excès. Carles Puigdemont, après avoir fui l’Espagne fin octobre 2017, se compare à Lluis Companys, président en exil de la Généralité, réfugié en France après la défaite républicaine, livré par la police de Vichy à Franco et exécuté le 15 octobre 1940 au fort de Montjuich. On peut mesurer ici la force des résonnances historiques, fussent-elles biaisées et instrumentalisées. Une incarnation peut renforcer une identité nationale.
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