Combien de temps pourra-t-il contrôler son peuple ?
Naïf dans son cynisme absolu, Poutine a complètement négligé l'impact émotionnel du processus destructeur qu'il mettait en œuvre. En 1813, l'Europe d'Ancien Régime avait compris qu'aucun compromis n'était possible avec "l'usurpateur". Il fallait qu'il parte. Aujourd'hui une évidence se fait de plus en plus jour : elle peut se résumer en une phrase : "Poutine est trop dangereux pour la sécurité du monde". Même ses soutiens les plus complaisants, ceux qui affirmaient hier avec assurance que "jamais il n'envahirait l'Ukraine", prennent leurs distances avec lui, insistant sur son irrationalité ou sa paranoïa.
De fait, ce qui menace Poutine, ce n'est pas seulement l'Occident et ses sanctions, ou la vaillante résistance du peuple ukrainien, mais le peuple russe d'un côté, et la Chine de l'autre. Aujourd'hui tous ceux qui osent manifester contre l'invasion d'une nation souveraine sont systématiquement mis en prison. Et leur nombre est réduit.
Mais combien de temps Poutine pourra-t-il contrôler son peuple, sinon son entourage ? Combien de temps, avant que "la guerre de défense de la Russie" n'apparaisse clairement pour ce qu'elle est : la guerre d'agression de Poutine, sinon la dérive d'un tsar devenu fou ? La tristesse des familles russes qui auront perdu un des leurs dans une guerre de choix ; le ressentiment de ceux - bien plus nombreux - qui verront, du fait de l'isolement de leur pays, leur situation économique se dégrader sérieusement ; sans oublier les frustrations des oligarques, et les remords des plus libéraux des Russes : tout cela finira-t-il par conduire à une immense vague de rejet du régime ?
La menace existentielle de l'arme nucléaire
L'aventure afghane avait contribué à la chute de l'URSS, l'aventure ukrainienne entraînera-t-elle à terme, celle de Poutine ? Cela suppose que les Russes comprennent que le monde n'est pas en guerre contre leur pays, mais que leur président est en guerre contre le monde. Et qu'il mène son peuple, et au-delà, l'Europe tout entière, à la catastrophe.
En 2022, la priorité n'est plus de "sauver le soldat Ryan" mais de "contenir le soldat Poutine", devenu un principe de désordre et de destruction.
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