C’est surtout un signal politique, et il n’est pas bon dans la perspective de la prochaine conférence quinquennale d’examen du Traité de non-prolifération, qui se tiendra en janvier 2022. Car l’UHE échappe aux contrôles internationaux dès lors qu’il est utilisé pour la seule propulsion - au nom du réalisme, car il est difficile d’imaginer des inspecteurs étrangers contrôlant la partie arrière de sous-marins nationaux. On peut donc retirer de l’UHE d’installations contrôlées pour, officiellement, faire de la propulsion nucléaire… C’est ce que pourrait par exemple faire l’Iran. Par ailleurs, certains autres États pourraient désormais vendre de tels réacteurs de propulsion à des pays non-nucléaires en arguant du précédent américain.
Aller de l’avant
Pour la France, il faut maintenant aller de l’avant : régler rapidement le contentieux commercial et surtout le séparer de la refonte inévitable de notre stratégie dans et pour l’Indopacifique. Car notre pays est et restera une puissance présente dans la région. L’Australie, de son côté, aura encore besoin de son "voisin du Pacifique". Et personne ne voudra que Pékin puisse exploiter les dissensions entre pays occidentaux. D’où l’intérêt, par exemple, de poursuivre les conversations non seulement officielles mais aussi en "Track 2"(experts) et "Track 1.5" (responsables et experts).
Des questions vont se poser dans les dix-huit mois de discussions qui sont prévues entre les trois pays concernés. Sera-t-il envisageable pour la France de se joindre, ponctuellement - pour certains projets ou opérations - au format AUKUS ? Sera-t-elle contrainte, à l’inverse, de se tourner bien davantage, dans sa stratégie Indopacifique, vers l’Allemagne (pour l’Europe) et le Japon (pour l’Asie) ? Ironie de l’histoire : ces deux pays étaient ses concurrents pour le contrat des sous-marins australiens…
Il y aura aussi, pour la France, un indispensable exercice d’introspection. Avons-nous fait preuve de trop de confiance, voire d’aveuglement dans cette affaire aux ramifications industrielles et stratégiques majeures ?
Enfin, il faudra se garder des conclusions politiques hâtives : non, l’administration Biden n’est pas l’administration Trump. Cette dernière se moquait de ses alliés. L’actuelle les soigne bien. Mais pas tous.
Copyright : Andrew Harnik / POOL / AFP
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