Les États membres sont, dans l’ensemble, devenus davantage conscients des implications de certains investissements étrangers en matière de sécurité, en particulier pour ce qui est des transferts de technologies ou de la perte de contrôle d’infrastructures critiques. Le nouveau processus décisionnel avant l’approbation des investissements permettra un examen précis de l’offre par différents acteurs - y compris un suivi par les médias. Si la décision finale reste du ressort des États membres, il existe donc désormais un processus européen sur lequel la Commission et les autres États membres peuvent exercer une influence formelle. Par conséquent, nul doute que les investissements chinois en Europe feront l'objet d'une attention plus élevée. Il est probable que les transactions qui, dans le passé, ont abouti à des transferts de technologie sensible ou à la perte du contrôle d'actifs stratégiques, puissent désormais être traitées différemment.
Une approche similaire visant à promouvoir la convergence européenne est également en mouvement dans le domaine de la 5G. Plusieurs États membres ne disposent pas encore de la capacité institutionnelle nécessaire à l’appréhension et à la gestion des implications sécuritaires de la construction et de l'exploitation d'un réseau 5G ; pour qu’ils l’acquièrent, le processus européen joue un rôle important. À Bruxelles et dans de nombreuses capitales européennes, le moment décisif approche. L'UE a déjà fait la synthèse des évaluations de tous les États membres dans le cadre d’un rapport sur l'évaluation coordonnée des risques liés à la sécurité des réseaux 5G, rendu public en octobre dernier. Ce rapport met l'accent sur la notion de "trusted vendors" (fournisseurs de confiance), principalement définie en termes techniques. Dans le cadre d’une deuxième phase, en ce mois de décembre, l'UE doit annoncer le contenu de sa boîte à outils au service de la sécurité européenne. Il s'agira d'un assemblage de mesures à la fois techniques pour protéger les réseaux de télécommunications contre l'intrusion et le sabotage, d’audits, de certifications... La question est de savoir dans quelle mesure la logique de "trusted vendor" y sera définie de manière purement technique ou davantage politico-stratégique - c’est l’aspect décisif qui limitera plus ou moins les parts de marché de Huawei sur les réseaux en Europe.
Il est possible que l’UE adopte une posture défensive dans un troisième domaine, celui des marchés publics. Estimé à 3 400 milliards d'euros, le secteur de la commande publique de l’UE est aujourd’hui complètement ouvert à tous les prestataires. L'asymétrie qu’il y a là avec le marché chinois, dominé par les entreprises d'État, ne saurait être plus saisissante.La Commission européenne sera-t-elle en mesure de relancer les négociations intra-européennes pour la définition d’un instrument international sur les marchés publics ?
Ajouter un commentaire