L’ombre de la rivalité entre la Chine et l’Ouest
L’approche des élections présidentielles iraniennes constitue sans doute un facteur de complication. Le Président Rouhani vient d’ailleurs d’accuser ses opposants de jeter de l’huile sur le feu pour renforcer leur main dans le combat électoral. La marge de manœuvre du Président Biden, par ailleurs, est limitée par l’attitude négative du Congrès sur le dialogue avec l’Iran.
Ne faut-il pas cependant s’interroger au-delà des aspects tactiques du dossier ? N’y a-t-il pas à Washington, en profondeur, y compris dans les rangs de l’administration, un doute sur l’intérêt de faire revivre un accord perçu comme comportant d’importants défauts ? En particulier alors qu’atteindre ce but demandera des efforts considérables, peut-être disproportionnés ? Symétriquement, à Téhéran, les sacrifices à consentir pour renouer avec les Occidentaux ne sont-ils pas perçus comme trop élevés pour une levée des sanctions dont l’expérience a prouvé qu’elle risquait d’être aléatoire ? En particulier alors que ce ne sont pas les "durs", désormais aux commandes à Téhéran, qui souffrent pour de bon du maintien des "pressions maximales" ?
C’est de ces sujets de fond qu’il faudrait pouvoir discuter, dans des circuits non-officiels tels que les think tanks pour commencer. Nous suggèrerions que de telles réflexions soient menées, comme tant de choses désormais, à la lumière de la rivalité entre la Chine et l’Ouest : une prolongation de la crise iranienne ne risque-t-elle pas d’engluer les États-Unis dans les turbulences du Proche-Orient, contrairement à son souhait de se concentrer sur l’Indopacifique ? Washington ne doit-il pas considérer que d’une certaine manière, l’Indopacifique commence en Iran ? Inversement, en cas de non-normalisation durable de ses relations avec les États-Unis, la République islamique ne sera-t-elle pas obligée de renoncer à sa vocation de "ni Est ni Ouest", pour dépendre profondément de la Chine et (pour certains aspects) de la Russie ? Au risque de constituer un pion dans une compétition globale peu favorable à sa souveraineté ?
Copyright : JOE KLAMAR / AFP
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