Depuis sa prise de pouvoir en 2014, Narendra Modi n'avait jamais du faire face à une opposition d'une telle ampleur, à la fois par sa taille et par sa durée. Les partis d’opposition, à l'instar du Parti du congrès, s’en sont d'ailleurs saisis. L'annonce de l'abrogation s’est faite quant à elle juste avant l'anniversaire du vote de la réforme, à l'occasion duquel d'importantes manifestations étaient anticipées. Quelles sont les implications politiques de cette abrogation inédite pour le régime de Modi en Inde ?
Les partis d’opposition sont plutôt restés en retrait au cours de cette année de mobilisation paysanne qui a surtout vu renaître de ses cendres un syndicalisme agricole qui n’arrivait plus à fédérer ses troupes et à faire entendre sa voix depuis les années 1980. Pour les partis d’opposition, trois questions se posent aujourd’hui : le mouvement qui vient de remporter une victoire en effet historique a-t-il donné naissance à un "vote paysan" susceptible de s’exprimer contre le BJP au profit de formations comme le Congrès au Punjab (où ce parti est encore au pouvoir, mais divisé) ou le Parti Socialiste en Uttar Pradesh ? Les élections de 2022 apporteront un important élément de réponse à cette question. Dans un second temps, et au-delà de la question paysanne, il s’agira de voir pour l’opposition, si elle est en mesure de remettre à l’honneur un programme politique reposant sur des enjeux socio-économiques. Le BJP a imposé au cours des sept dernières années un répertoire identitaire exploitant les clivages religieux et capitalisant sur le nationalisme hindou. Si les électeurs ré-évaluent leurs priorités et s’intéressent davantage à des questions comme les inégalités - qui se sont beaucoup accrues depuis 7 ans -, la fin du deuxième mandat de Narendra Modi risque d’être d’une teneur différente et le mouvement des fermiers apparaîtra alors, rétrospectivement, comme un tournant.
Pourtant, Narendra Modi ne manque pas de ressources. Il va sans doute utiliser la session parlementaire qui s’ouvre pour reprendre la main en proposant une autre réforme de l'agriculture en concertation avec les mouvements paysans. Ce que cet épisode révèle d’ailleurs, c’est la capacité de Modi à faire de la politique et à faire marche arrière quand il le faut. Ceci dit, il a campé sur ses positions pendant très longtemps dans cette affaire, et renouer le dialogue avec les fermiers risque d’être difficile...
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