Vue de Pékin, la contestation par la rue de l'ordre chinois est une humiliation inacceptable, insupportable même. Si la Chine ne punissait pas avec sévérité les territoires indisciplinés, ses ennemis verraient dans sa retenue de la faiblesse, et non, une sage modération. Tant pis si une intervention musclée affaiblit, de manière temporaire, le soft power de la Chine et son pouvoir de convaincre. Son pouvoir de contraindre est plus important à ses yeux.
Tant pis si la violation de la formule "un Etat, deux systèmes" renforce Taïwan dans sa volonté d'indépendance, et les citoyens de Hong Kong dans un esprit de résistance qui ne peut que grandir avec le temps. Les plus nostalgiques de la liberté partiront vers le Canada ou l'Australie, s'ils veulent rester en Asie-Pacifique. Les autres s'adapteront et se draperont derrière le nationalisme et la fierté patriotique des continentaux. En ce qui concerne Taïwan, 2049 est encore loin, il sera bien temps de faire revenir l'île démocratique au sein de la Chine pour le 100e anniversaire du régime. C'est tout simplement une question de taille : le plus gros finit par absorber le plus petit.
La situation à laquelle autorités et citoyens de Hong Kong se trouvent désormais confrontés est-elle simplement le produit de l'incompétence des premiers et de la fuite en avant des seconds ? Et quel est le rôle de Pékin dans cette affaire ? "Ces événements nous dépassent, feignons d'en être les organisateurs", écrivait Jean Cocteau dans Les Mariés de la tour Eiffel. Xi Jinping est-il un disciple de Cocteau ou a-t-il dès le début conçu le plan d'une remise en cause de la spécificité de Hong Kong ? Sans verser dans la théorie du complot, l'incompétence, apparente ou réelle, de Carrie Lam ne sert-elle pas son dessein révisionniste et unificateur ?
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