L'Europe souveraine en matière de défense n'est pas pour demain. Plus que jamais, face à la menace russe et au défi chinois, les Européens ont besoin de l'Alliance Atlantique.
Les anniversaires se suivent et ne se ressemblent pas. Il y a juste un mois on commémorait avec nostalgie le trentième anniversaire de la chute du mur de Berlin. La proclamation de la fin de l'Histoire n'avait-elle pas cédé la place aux avertissements sur la fin de la démocratie ?
Il y a quelques jours à Londres, on célébrait dans l'acrimonie et la division, le soixante-dixième anniversaire de la création d'une institution, l'Otan, qui demeurait pourtant aux yeux de ses membres comme un modèle de réussite. Il y a un lien étroit entre ces deux commémorations.
Au lendemain de la chute du mur de Berlin et de la dissolution de l'URSS, l'Organisation du traité de l'Atlantique nord, orpheline de sa raison d'être, à savoir la menace soviétique, se demandait si elle avait encore un avenir. Sa mission était accomplie : elle avait contribué à contenir "l'empire du mal" pour reprendre les termes utilisés par Ronald Reagan pour qualifier l'URSS. N'était-il pas sage, tout simplement, de la dissoudre, pour passer à autre chose ?
Le sens retrouvé de l'Alliance
Trente ans plus tard, on peut dénoncer les contradictions et les divisions au sein de l'Otan - Emmanuel Macron ne manque pas de le faire, de manière légitime sur le fond, malheureuse sur la forme - mais l'Alliance a indéniablement retrouvé du sens. On peut même dire que sa raison d'être s'est démultipliée. Tous ceux qui proclament qu'il n'existe pas de menace russe, souffrent soit de problème oculaire aigu, soit poursuivent un agenda qui n'a rien à voir avec l'analyse objective de la réalité.
La militarisation de la diplomatie russe, accompagnée de l'usage systématique de pratiques agressives - y compris des assassinats ciblés comme récemment en Grande-Bretagne ou en Allemagne - et de la volonté de Moscou de déstabiliser nos systèmes démocratiques, sont des réalités incontournables. De fait tout se passe comme si la Russie de Poutine s'était fixée comme objectif principal de rendre sa raison d'être à l'Otan. De la même manière et au même moment, l'Amérique de Donald Trump semble elle aussi s'attacher à démontrer - en creux cette fois - à quel point l'Alliance est plus indispensable que jamais.
De manière provocatrice, absurde, erratique, prévisiblement imprévisible, Donald Trump fait la démonstration du caractère toujours indispensable de la protection américaine. Indispensable mais insuffisante, car non garantie à terme. "Le Vatican combien de divisions", proclamait Staline avec un mélange d'ironie et de mépris. En 2019, on sent bien que Poutine serait tout prêt à reprendre à son compte, la formule de Staline : "L'Union européenne combien de divisions". L'Histoire lui donnera sans doute tort à lui aussi, mais pas tout de suite, pas maintenant.
Diversification des menaces
De fait, face à la multiplication et à la diversification des menaces et des défis, de la Russie à la Chine, l'Europe démocratique a plus que jamais besoin de l'Otan. En dénoncer les dysfonctionnements est une chose, contribuer par ses critiques à l'affaiblir plutôt qu'à la renforcer en est une autre. Les États-Unis et la Turquie en effet ne se résument pas à Trump et Erdogan. Il y a de la vie et de l'espoir au-delà de ces deux dirigeants toujours plus critiqués sinon isolés à l'intérieur de leurs pays respectifs.
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