Certes, Salvini et ses alliés ne sont au pouvoir que depuis quelques mois, une période trop courte pour que l'érosion inévitable de leur soutien ait déjà produit ses effets. Pourtant, la popularité des "populistes" est bien réelle. Les démocrates libéraux doivent en prendre pleinement conscience à exactement sept mois des élections européennes de mai 2019.
Cette réalité, cette prégnance du populisme, je l'ai en quelque sorte, il y a quelques jours, touchée du doigt. Je me trouvais faire une conférence dans le sud de l'Italie, dans la région des Pouilles. Depuis quatorze ans, la petite ville de Conversano, à une trentaine de kilomètres de Bari, organise un festival culturel, qui se concluait cette année par l'intervention de l'archevêque Bruno Forte, un philosophe et théologien de renom. Ses propos emplis d'humanité dénonçaient "la scandaleuse désunion de l'Union européenne" face à la question des migrants. Il en appelait au devoir moral des chrétiens face au sort des plus démunis. Il évoquait aussi l'histoire et la démographie. En accueillant par millions les réfugiés italiens, les Etats-Unis n'avaient-ils pas, il y a un peu plus d'un siècle, contribué au renforcement de leur encore jeune puissance ?
Des frustrations profondes
Aujourd'hui l'Italie est un pays vieillissant qui, plus que beaucoup d'autres pays européens, a besoin de l'apport d'énergies nouvelles. Les migrants sont là pour les fournir. Les mots de l'archevêque reprenant les appels réitérés du pape François étaient prononcés avec force et conviction. Ils sonnaient juste. Mais ils me semblaient tomber dans le vide. Au fil des minutes, la place de Conversano où se déroulait la conférence se vidait lentement. Les Italiens présents votaient avec leurs pieds. Ils se retiraient les uns après les autres et, à la fin, ce sont des applaudissements polis mais très réservés qui saluèrent les propos "promigrants et proeuropéens" de l'archevêque. Il n'avait pas convaincu ses auditeurs.
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