Dans les semaines qui viennent, de multiples obstacles vont se dresser sur le chemin du Président français au Liban. L’un de ceux-ci réside dans les prétextes que va trouver la classe politique libanaise pour proroger le statu quo malgré l’exaspération de la population : faut-il un "gouvernement d’union nationale", une équipe de technocrates, des élections anticipées, des réformes avant les élections ou des élections pour provoquer des réformes etc. ? Une autre difficulté viendra de la propension des responsables libanais à reporter toute action en attendant un hypothétique "deal" entre puissances extérieures : en l’occurrence, le Hezbollah et d’autres invoqueront la nécessité d’attendre un éventuel arrangement global entre les États-Unis et l’Iran, à la suite de l’élection possible d’un Démocrate à la Maison-Blanche.
Le rôle de la France – noblesse oblige - sera de maintenir la pression pour que les choses ne s’enlisent pas à Beyrouth. Il incombe pour cela au Président Macron – ainsi le veut la realpolitik – de réunir des appuis extérieurs, dans les donateurs habituels (pays du Golfe, Europe, États-Unis, Égypte, Turquie), mais sans doute au-delà (Iran). À peine de retour à Brégançon, Emmanuel Macron a provoqué une vidéo-conférence des bailleurs de fonds, sous les auspices des Nations-Unies, pour disposer d’une "offre" consolidée vis-à-vis des responsables libanais. Il a appelé le Président Trump, qu’il semble vouloir convaincre que la politique de sanctions américaines vis-à-vis du Hezbollah est contre-productive. Il s’est entretenu aussi au téléphone avec le président Rouhani. Il revient à Beyrouth le 1er septembre, justement à l’occasion de l’anniversaire de la proclamation du Grand Liban.
Les chances de succès sont limitées, diront les sceptiques. D’autres estimeront que M. Macron se montre trop pressé, ou trop insistant. L’expérience prouve en fait que pour faire au moins bouger les lignes, dans ce type de situation, il faut agir dans un créneau de temps limité et en frappant fort. Si le Président français nous paraît avoir raison de tenter sa chance, c’est parce que cela est conforme aux attentes de la majeure partie des Libanais, sans doute à celles de l’opinion française, mais aussi d’une partie importante de l’opinion dans le monde arabe. De même qu’il y a une place spéciale pour le Liban dans le cœur des Français, le pays du Cèdre détient une place spéciale dans l’imaginaire des opinions arabes. Dans des pays de dictatures le plus souvent religieuses (ou anti religieuses), le modèle libanais fascine : même dégradé par la fossilisation du clanisme, il préserve encore une liberté d’opinions et une diversité des mœurs que l’on ne trouve plus ailleurs dans la région.
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