Les vulnérables (Nord) : pour ces départements, la population est en moyenne socio économiquement défavorisée (dans le Pas-de-Calais, le revenu annuel médian est de 19 200 euros pour une moyenne nationale de 21 889 euros). Par ailleurs, les besoins de santé apparaissent très importants avec une forte prévalence des maladies chroniques et une part du tabagisme qui pèse sur l’état de santé des habitants : la part des décès imputables à la cigarette y est 18 % plus élevée que dans le reste de la France.
Cet exercice de cartographie met en lumière les inégalités territoriales en termes de besoins de santé et la nécessité de développer des politiques de santé ciblées selon les populations qu’elles desservent. Il met également en avant l’inadéquation entre les besoins de santé et les dépenses de santé allouées : à besoins de santé similaires, les dépenses de santé peuvent varier de manière significative entre les départements. Ainsi, l’Ille-et-Vilaine a une dépense de santé par habitant de 1770 euros, alors que l’Isère, qui présente un profil comparable en termes de besoins, à une dépense de santé par habitant de 2150 euros.
Organiser les données et permettre l’interopérabilité des systèmes d’information
Ce travail démontre la nécessité de mobiliser les données de santé publique afin de développer des offres de santé et des politiques de prévention ciblées adaptées aux besoins de santé locaux. Néanmoins, des difficultés, rencontrées lors de notre travail de cartographie, demeurent pour un usage systématique de la donnée dans les politiques publiques de santé.
Tout d’abord, la multiplicité des bases de données de santé publique qui fragmente les informations relatives à notre système de santé. La France dispose d’une quantité très riche de bases de données qui renseignent sur notre système de santé : en 2021, le département Etalab recensait 172 bases de données existantes dans le domaine de la santé gérées par 79 gestionnaires différents. Ces données peuvent être de plusieurs ordres et contiennent des informations distinctes notamment :
- Des données de santé publique et épidémiologiques (ex : le CépiDC, gérée par l’Inserm, qui rassemble les causes médicales des décès, ou encore les effectifs par pathologie publiés par l’Assurance maladie)
- Des données médico-administratives qui renseignent sur la consommation des soins et les dépenses de santé : le programme de médicalisation des systèmes d’information (PMSI), géré par l’ATIH regroupe les données relatives à l’activité des établissements de santé (nombre de séjours, durée moyenne de séjour etc.) ou le système national interrégimes de l’Assurance maladie (Sniiram) rassemble l'ensemble des données relatives aux remboursements effectués par l’Assurance maladie (tous régimes confondus).
Par ailleurs, un manque d’interopérabilité entre les bases de données : des initiatives nationales tendent à faciliter l’accès et l’usage de ces bases de données. La base principale, offre désormais la possibilité de chaîner les données du Sniiram, du PMSI, du CépiDC ainsi que des données relatives au handicap de la CNSA issues des Maisons départementales des personnes handicapées (MDPH). Par ailleurs, le Health Data Hub, créé en 2019 a pour mission de faciliter l’accès aux données de santé pour les porteurs de projet tout en garantissant le niveau de sécurité nécessaire.
Enfin, une absence de données et d’indicateurs relatifs à des enjeux de santé publique : en France, il n’existe pas de données sur la prévalence de l’obésité ni sur la consommation moyenne d’alcool, de cigarettes ou de drogues par département (pour notre exercice de cartographie, des proxy ont été nécessaires pour mesurer cette consommation tels que les décès imputables à l’alcool ou le tabac).
Dans son rapport, Santé : faire le pari des territoires, l’Institut Montaigne incite à un pilotage de notre système de santé par la donnée. À ce titre, les collectivités territoriales ont un rôle clé à jouer dans la récolte, la traçabilité et l’exploitation des données. Au contact direct des populations produisant les données, elles pourraient mobiliser les données dans la définition de politiques de santé adaptées aux besoins de leur territoire.
Copyright : Kenzo TRIBOUILLARD / AFP
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