Les biais préexistent aux algorithmes, et ces derniers peuvent aider à les réduire. Néanmoins les biais algorithmiques méritent une attention particulière du législateur, et notamment de la Commission européenne, qui rédige en ce moment son Digital Services Act.
Car les algorithmes ne font pas que répliquer des biais historiques, ils font office de caisse de résonance. S’ils incorporent des biais, ils menacent de les diffuser à grande échelle. Un algorithme de police entraîné sur les données historiques d’une équipe de police raciste pourra répercuter ces biais sur les comportements d’autres polices qui utilisent le logiciel. Par ailleurs, les algorithmes risquent de camoufler la responsabilité de chacun, et de rendre plus difficile la contestation de décisions biaisées.
Mais combattre les biais algorithmiques peut s’avérer difficile
Ces biais posent cependant de multiples difficultés. La définition d’un résultat biaisé dépend du contexte. Un traitement équitable peut prendre la forme d’une équité entre individus (chacun est traité de la même manière) ou entre groupe (chaque groupe, homme/femme, catholique/musulman,…, est traité en moyenne de la même manière). Les deux approches ne sont pas toujours compatibles, et il est fort à parier que les conceptions d’équités varient autour du globe, par exemple entre l’Europe et les États-Unis.
Ensuite, modifier un algorithme pour qu’il soit pleinement équitable implique nécessairement d’en réduire la performance technique. Si cela peut être acceptable dans la grande majorité des cas, la dégradation de performance pour des algorithmes sensibles peut être difficile à accepter, par exemple dans le domaine médical. Doit-on privilégier l’équité d’un algorithme de détection de cancers à partir de radiographie, au détriment de sa performance pour certains types de patients ?
Enfin, réguler strictement les entreprises afin de s’assurer de l’absence de biais peut conduire à renforcer la position dominante des GAFA, qui ont les ressources à leur disposition pour se plier à toute régulation. L’écosystème numérique européen reste encore à la peine, et il faut préserver la capacité d’innovation des entreprises et des start-ups.
Pour autant, contrôler les biais des algorithmes et maîtriser leurs conséquences est plus que jamais essentiel si l’on veut maintenir la confiance des usagers dans les plateformes et services numériques.
Quel est le cadre légal actuel ?
L’année 2020 marque peut être l’année où la tech devient réellement une industrie régulée, comme tant d’autres avant elles, de la banque aux télécommunications. Néanmoins le mouvement s’est amorcé il y a déjà plusieurs années, et les intermédiaires numériques doivent d’ores et déjà suivre un certain nombre de réglementations.
En Europe, elles respectent un ensemble de lois qui s’appliquent au monde du physique comme du numérique : protection du consommateur, fiscalité, fake news… En complément, certains textes spécifiques sont venus durcir leur cadre d’activité dans plusieurs domaines comme la protection des données personnelles avec le RGPD, ou la concurrence dans le commerce en ligne avec la directive e-commerce.
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