Il y a d’abord eu un phénoménal effet inédit de "retour à la maison", à la fois au sein des États – pensons à l’Inde, en particulier – mais aussi d’un pays à l’autre – les Ukrainiens travaillant en Pologne, par exemple – voire d’une région du monde à l’autre – les travailleurs d’Asie du sud dans les États du Golfe, notamment. Des mouvements dont l’ampleur dépasse de loin ceux de l’éloignement des familles aisées qui quittent provisoirement les villes, là aussi un phénomène que l’on connaît depuis l’Antiquité. On peut aussi parler des travailleurs frontaliers qui trouvent désormais porte close… Quant aux demandeurs d’asile, ils sont moins nombreux, et l’examen de leurs dossiers est aujourd’hui bien souvent bloqué.
Ces phénomènes sont-ils totalement réversibles ? Tout dépendra de la durée et de l’intensité de la pandémie. Si elle était maîtrisée au cours de l’été, il est très probable que des flux inverses se manifesteraient rapidement. Pour des raisons de survie d’abord, mais aussi pour d’autres raisons : on a déjà vu l’Allemagne faire venir des travailleurs roumains par charters, pour la récolte des asperges, fort prisées outre-Rhin…
Il est très probable en revanche que la pandémie rende, en Europe, les pays destinataires d’immigration encore plus méfiants vis-à-vis de celle-ci. Le récit qui se développera sera le suivant : "les migrants étaient déjà un risque économique et un risque terroriste, ils sont désormais un risque sanitaire". Ce ne sera pas la première fois dans l’histoire qu’on accusera les étrangers d’apporter la peste… On voit d’ailleurs déjà que le Président Trump a suspendu toute immigration. Avec certainement des arrières-pensées électorales. Les Africains qui cherchent à émigrer le continent seront sûrement encore plus indésirables aux yeux d’une partie de la population européenne. Même si, pour l’heure, ce sont plutôt les Européens qui ne sont pas les bienvenus sur le continent africain : on me dit en effet que dans certains pays, on dit que ce sont les Européens qui sont soupçonnés d’apporter la "Peste blanche". Ironique retournement de l’histoire.
Copyright : Lillian SUWANRUMPHA / AFP
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