Quelles seront les répercussions économiques du coronavirus en RDC ?
Les répercussions économiques seront importantes. Même si le gouvernement fait de son mieux pour essayer d'en atténuer l'effet sur notre petit tissu de PME et PMI, il y aura probablement des faillites et des pertes d'emplois.
Le caractère extraverti de l'économie congolaise aura un impact sévère sur ses équilibres déjà précaires et la capacité du gouvernement à générer les recettes nécessaires à l'exécution de son budget. En effet, la RDC importe tout ce qu'elle consomme et exporte principalement des matières premières sans transformation locale. En outre, ses échanges sont particulièrement concentrés avec la Chine, dont le moteur de croissance a fortement ralenti, avec comme conséquence directe une réduction de sa demande pour les minerais que la RDC exporte. Le gouvernement congolais aura ainsi du mal à s'en sortir sans une intervention (même temporaire) du FMI et des autres bailleurs de fonds.
Ces effets seront probablement renforcés par les contraintes qu'impose la lutte contre l'épidémie aux entreprises locales (télétravail, faible demande, difficulté d'exécution des commandes), aux particuliers et aux ménages, surtout sur la partie informelle de notre économie, qui est de loin la plus large.
La leçon sera à l’échelle globale partout la même, certes à des degrés divers : réduire la dépendance à des chaînes d'approvisionnement ou des débouchés trop lointains en privilégiant la floraison d'une production locale, assurer l'extraction du maximum de valeur ajoutée locale par la transformation de nos matières premières avant exportation, ainsi que l'émergence d'un marché régional basé sur des circuits courts. Sans doute est-il vraiment temps de pousser l'agenda de l'Union africaine sur la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECA), afin d'être collectivement moins vulnérables à l'avenir.
Quelles sont vos recommandations à la population et aux instances décisionnaires congolaises ?
Ma seule recommandation possible à la population serait celle de respecter les gestes barrière et les mesures prises par le gouvernement. Nous ne pourrons limiter les dégâts causés par la pandémie que par un effort collectif. Aux instances décisionnaires congolaises, je souhaite beaucoup de courage dans ces moments difficiles et l'audace de décider malgré une information incomplète sur un virus que nous ne connaissons pas vraiment. Ma recommandation serait qu'elles s'attèlent dès maintenant à réfléchir de manière prospective sur l'après. Nous sortirons de cette crise, c'est inéluctable : il nous faut d’ores et déjà réfléchir à la feuille de route pour amorcer une relance rapide une fois son cap dépassé et entamer les réformes nécessaires pour ne plus jamais retomber à ce niveau de vulnérabilité sanitaire.
Copyright : ALEXIS HUGUET / AFP
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