Actuellement, neuf pays possèdent des bases navales à l'étranger : par ordre décroissant du nombre de ces bases, on compte ainsi les États-Unis, le Royaume-Uni, la France, l'Inde, l'Italie, la Russie, l'Allemagne et le Japon. L'histoire a appris à la Chine que "l'insuffisance de la capacité de projection des forces militaires" (军事投送能力不足)[4] entraîne une incapacité à protéger les citoyens et les intérêts du pays à l’étranger. Cela explique, de l'avis des auteurs, pourquoi la puissance militaire est importante pour protéger les intérêts chinois le long des routes commerciales maritimes vers le golfe Persique et le golfe d'Aden. Depuis la réforme de 2016, la Commission militaire centrale a mis en place un "bureau pour les opérations à l'étranger" (海外行动处) qui assure orientation et coordination et joue un rôle important dans le développement des bases navales à l’étranger.
Les auteurs soutiennent que la stratégie portuaire et navale de la Chine doit évoluer en se fondant sur la "cultivation du militaire par le civil" (以民养军). Sur le plan stratégique, la Chine ne doit jamais s'écarter de la priorité politique qui légitime le développement de bases navales : ce n’est pas ici la domination militaire mais bien la protection des intérêts commerciaux.
Pendant la phase d'expansion, la Chine doit "éviter de heurter les sensibilités" (減少敏感度) par ses actions, et "s'arrêter avant d'aller trop loin" (适可而止) pour éviter la "tragédie des grandes puissances" (大国悲剧). En d'autres termes, la construction des bases doit être liée à l'exercice des responsabilités internationales. Mais au-delà de ces opérations, la Chine n'a pas le choix puisqu'elle est confrontée à des pressions internationales qui limitent son essor ("les bases navales sont une nécessité") et développer la capacité d'exercer un "contrôle maritime" (制海权) dans le Pacifique occidental, dans le sens militaire de sea control, est essentiel à la croissance des intérêts du pays.
En conclusion, il semble que la communauté stratégique chinoise réfléchit déjà en termes tactiques aux futures bases navales, avec une attention accordée à la protection des intérêts du pays à l'étranger. Djibouti en est un bon exemple : les futures bases navales devront être justifiées en fonction des responsabilités internationales qu'elles aident la Chine à assumer. Aucun auteur ne préconise la construction de bases pour concurrencer militairement les États-Unis et l’un des auteurs étudiés met même ses lecteurs en garde contre le risque d’un déploiement excessif qui affaiblirait le pays. Dans le même temps, la rivalité stratégique avec les États-Unis est l'élément central de la pensée militaire de la Chine... Pour résumer, on peut s’attendre à ce que la Chine, lorsqu’elle arbitrera au sujet de l’implantation de ses futures bases navales, redouble d’efforts pour éviter que ses actions ne renvoient l’image d’une confrontation avec les États-Unis.
[1] Xue Guifang, Zheng Hao,"Risk management and realistic needs for China’s construction of overseas bases in the 21st Century" (中国21世纪海外基地建设的现实需求与风险应对), Guoji Zhanwang, no. 4, 2017, pp. 104-121.
[2] Wang Tianze, Qi Wenzhe, Hai Jun, "An Exploration Into Logistical Support of Transportation and Projection for Military Bases Abroad" (海外军事基地运输投送保障探讨), Guofang Jiaotong Gongcheng yu Jishu (Defense Transportation Engineering and Techniques), no. 1, 2018, pp. 32-36.
[3] Liu Dalei, Hu Yongmin, Zhang Hao, "Equipment Support in Overseas Military Actions" (我军海外军事行动装备保障问题研究), Junshi Jiaotong Xueyuan Xuebao – Journal of Military Transportation Academy, vol. 19, no. 9, September 2017.
[4] Li Qingsi, Chen Chunyu, "Analysis of Chinese Overseas Port String Bases Strategy" (试析中国的海外港链基地战略), Quyu yu Quanqiu Fazhan – Regional and Global Development, no. 2, 2019, pp. 123-137.
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