À l'égard des Européens, les concessions envisagées semblent très limitées. On note bien la perspective d'une plus grande ouverture du marché, mais elle serait "contrôlée" et progressive, "strate après strate". Un expert suggère l’idée d’une coopération dans les pays tiers et davantage d'investissements greenfield (c’est-à-dire dans des capacités de production nouvelles) en Europe.
Plus généralement, si l'OMC est si précieuse pour la Chine, quel type de réforme cette dernière peut-elle proposer ou accepter pour sauver le système commercial multilatéral ? Dans un document daté de décembre 2018, qui synthétise la position de Pékin sur la réforme de l'OMC, la Chine apparaît sur la défensive et met à nouveau l'accent sur l'importance du statut de pays en développement. Les sources sur lesquelles nous nous appuyons sont sans équivoque sur ce que la Chine ne veut pas, mais restent énigmatiques quant à ce qu’elle pourrait accepter. Logiquement, dans une phase de négociations avec l'administration Trump, ces sources accordent peu de crédit aux menaces brandies par les Etats-Unis sur la possibilité d’une sortie américaine de l'OMC : ces menaces sont perçues comme une rhétorique vide de sens. Cela n’est pas sans faire écho aux fanfaronnades chinoises du printemps dernier, lorsque la Chine clamait que l'économie américaine pâtirait plus qu’elle-même des effets d’une guerre commerciale. Dans cette défense du statu quo à l'OMC, Pékin va même jusqu'à souligner les inconvénients d'un accord commercial bilatéral entre les États-Unis et la Chine : en effet, si la Chine faisait de grandes promesses d'importations et de réduction du déficit commercial vis-à-vis des Etats-Unis, cela violerait les règles de l'OMC et nuirait aux autres partenaires commerciaux, et parmi eux à l’Europe.
Bref, la Chine ne participera aux négociations sur la réforme de l'OMC qu’en partant d’une posture très conservatrice. Indirectement, cela n’est pas sans nous rappeler que les déclarations que la Chine émet à propos du multilatéralisme ne sont souvent qu’un mince vernis, sous lequel ce sont l'intérêt national et l'évaluation du rapport de force qui l’emportent. Cela ne doit pas étonner, mais en dit long sur la dureté des affrontements à venir sur le commerce mondial dans les années à venir.
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