Ceux-ci viendraient rapidement heurter le statut militaire, créant des failles préjudiciables dans l’unicité du statut et in fine dans la cohésion des forces armées dans leur ensemble, à laquelle la gendarmerie appartient. Concernant le cas précis de la gendarmerie française, sur le territoire national, les crises récentes qui se multiplient et se conjuguent (crise sanitaire et contestation sociale, diffusion de la contestation de la Guadeloupe à la Martinique et aujourd’hui Saint-Martin), ont de plus démontré tout l’intérêt de disposer d’un outil réversible, capable d’une montée en puissance quasi immédiate.
Parce qu’il est configuré au sacrifice ultime dans le cadre de son service ou pour l’exécution des missions fixées par les autorités politiques, le militaire, dans la gendarmerie comme dans les Armées, embrasse volontairement une condition singulière qui ne saurait être restreinte à l’exercice d’un métier durant des horaires définis ou selon le type de missions exercées.
L’application de la DETT aux militaires de la gendarmerie aurait un impact opérationnel irréversible et impliquerait une révision en profondeur du modèle, tant pour la gendarmerie départementale que pour la gendarmerie mobile. Pour la première, par une forte contraction du maillage territorial et la mise en place de cycles horaires pour remplacer les astreintes devenues incompatibles avec la DETT. Pour la gendarmerie mobile, en rendant la tension d’emploi intenable au regard de la densité d’activité, notamment outre-mer. La situation actuelle aux Antilles en constitue une illustration évidente. La projection sans délai d’hommes et de moyens par avions militaires comme l’emploi dense en volume et en intensité d’escadrons mobiles immédiatement à leur arrivée dans ces départements ultra-marins ne sont qu’une déclinaison naturelle du statut militaire des personnels engagés.
Afin de conserver la disponibilité et le maillage propre au modèle de la Gendarmerie Nationale, une compensation en effectifs serait nécessaire dans une proportion particulièrement importante, tant pour assurer une continuité de service de la gendarmerie départementale (effectifs en service et astreinte indispensable, même réduite) que pour assurer les missions de la gendarmerie mobile. Pour cette dernière, la compensation pourrait dépasser la moitié du volume de force actuelle, sans préjudice de la perte de la capacité avérée à répondre sans délai à toute crise inopinée (les "traques" de forcenés dans les Cévennes et les Alpes Maritimes à l’été 2021 en démontrent l’intérêt et la pertinence).
Les forces armées de la République sont au service de la nation. La mission des Armées est de préparer et d'assurer par la force des armes la défense de la patrie et des intérêts supérieurs de la nation. La Gendarmerie Nationale est une force armée instituée pour veiller à l'exécution des lois.
Art. L3211-2 et-3 du code de la Défense
La contagion inévitable aux autres armées affaiblirait considérablement les capacités de notre défense
Comme nous l’évoquions dans notre rapport Repenser la défense face aux crises du 21ème siècle, la France et l’Europe sont désormais confrontées à des menaces hybrides, de la part d’acteurs qui utilisent tout le spectre de la conflictualité. C’est le cas par exemple de la Russie, qui cherche à nous déstabiliser sur plusieurs fronts - que ce soit à la frontière ukrainienne où plus de 100 000 hommes sont aujourd’hui massés, faisant ainsi planer la menace d’une invasion prochaine, ou au Sahel où Moscou se livre à une lutte informationnelle visant à discréditer les forces françaises présentes dans le cadre de l’opération Barkhane.
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