Échec du populisme trumpiste ? Too soon to tell.
Qu’en est-il de la politique intérieure ? Les premiers sondages semblent indiquer un soutien d’une majorité de la population américaine (52 %) à la gestion du Président tandis que son taux de confiance général est à son niveau le plus élevé depuis le début de la présidence, à 47 % (il s’était déjà renforcé après le pétard mouillé de l’impeachment). Probable effet rally around the flag lié à la crise (avant qu’elle n’atteigne son pic), avec deux éléments à noter. D’abord, ces sondages indiquent un soutien qui transcende le seul clivage partisan, fait rarissime dans cette présidence. Ensuite, ils infirment, une fois de plus, les prédictions d’un effondrement de Trump (voire d’une démission) émise par nombre de commentateurs. Le candidat démocrate Joe Biden continue de dominer les sondages pour l’élection de novembre mais certains analystes politiques remarquent que son avance est plus faible que celle d’Hillary Clinton au même moment. Par ailleurs, l’attention médiatique accordée à la crise du coronavirus a totalement éclipsé la campagne démocrate et Joe Biden semble absent du débat, renforçant encore plus l’effet référendum autour de la personne de Trump.
Plus fondamentalement, au-delà des questions de personnalités, cette crise pourrait-elle marquer le retour en grâce des gestionnaires centristes et l’échec de la thèse populiste ? C’est la proposition du politologue de la Brookings Institution, Shadi Hamid, proche de la campagne de Bernie Sanders. Avant la crise, le débat au sein des démocrates opposait ceux qui espéraient un "retour à la normale" comme Biden, bercés par l’espoir que Trump ne représentait qu’une parenthèse aberrante, et les populistes de gauche comme Sanders ou Warren qui voulaient saisir l’opportunité d’ouvrir un débat plus large pour reconquérir les électeurs de Trump. Le Covid-19 restreint ce "champ des possibles" selon Hamid, qui le regrette, réhabilitant les solutions pragmatiques, les dirigeants mesurés offrant des solutions techniques plutôt que des rêves idéologiques. Qui veut rêver quand on a peur de mourir ?
La présidence Trump sera jugée à l’aune de sa capacité à répondre à l’urgence humanitaire de la pandémie et la crise économique qu’elle provoque. Mais il serait bien audacieux de tirer des conclusions hâtives. L’expert de relations internationales se prend à espérer un engouement populaire renouvelé pour la coopération globale et le renforcement des institutions chargées d’apporter des réponses aux pandémies, le règne des experts bienveillants. Mais les exemples historiques abondent de crises, épidémies ou chocs économiques, ayant l’effet inverse : renforçant les nationalismes, les phénomènes de fermeture, les théories du complot et la recherche de boucs émissaires.
Et si les États-Unis sortaient plus forts ?
Il est tentant de voir dans la réaction de l’administration Trump un accélérateur d’un déclin américain souvent annoncé. La crise économique brutale, qui vient de mettre plus de 3 millions d’Américains au chômage en une semaine, un chiffre record, met encore plus en exergue les failles du système de santé et de protection sociale du pays, comme le soulignent les économistes français Emmanuel Saez et Gabriel Zuckman dans le NY Times.
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