Pensez-vous possible le fait que l'Allemagne devienne un membre permanent du Conseil de sécurité des Nations-Unies ? La France agira-t-elle vraiment en ce sens ?
Nous n'avons pas seuls la clé du changement et, pour le moment, la situation a été bloquée par plusieurs pays concurrents. Mais cela fait de nombreuses années que la France soutient avec vigueur une réforme des Nations Unies pour les adapter à un monde profondément différent de ce qu'il était en 1945 et par conséquent un élargissement du Conseil de sécurité à plusieurs pays dont l'Allemagne. Le système multilatéral, si attaqué aujourd'hui, sera d'autant plus fort qu'il sera légitime et reflétera le monde du XXIème siècle. Le traité réaffirme cette volonté. En attendant, on ne souligne pas assez la coopération extrêmement étroite et quasi-unique entre les délégations française et allemande à l'ONU qui les amène à prendre des positions le plus souvent identiques même s'il arrive dans de rares cas que les votes différent.
En matière diplomatique et stratégique ainsi que s'agissant des sujets européens, la France et Allemagne parviendront-elles à rapprocher leurs positions ?
Le traité intervient à un moment où nous vivons une révolution stratégique avec l'imprévisibilité radicale des Etats-Unis, la posture systématiquement agressive des Russes, l'ambition farouche de la Chine et le comportement bien peu "multilatéral" de nombreux acteurs, ceci alors que le Brexit est un défi pour l'Europe mais surtout où le monde bascule vers l'Asie au détriment des classe moyennes occidentales. Cette nouvelle donne met en évidence les intérêts propres des Européens et rend illusoire tout "cavalier seul" ou "Alleingang" de l'un d'entre eux, quel que soit sa taille. Autrefois, on savait qu'il ne fallait jamais demander aux Allemands de choisir entre l'Europe et les Etats-Unis. Aujourd'hui, il y a une conscience très forte qu'il faut combiner une véritable autonomie européenne avec l'alliance américaine. Bien sûr, le danger en pousse certains à rester exclusivement sous l'aile américaine, même si c'est pour y recevoir de méchants coups de bec, mais les choses changent.
Cette évolution ouvre de vraies perspectives pour définir des positions communes et en particulier pour doter l'Europe de capacités de défense. S'y ajoute la nécessité. C'est le cas du développement de l'Afrique. Jusqu'ici, nous agissions trop peu en commun. Le défi migratoire et les risques de crise nous y contraignent.
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