Plus largement, le CEPS doit veiller à ce que les dépenses remboursées du médicament soient compatibles avec l'Objectif national des dépenses de l’Assurance maladie (ONDAM) voté annuellement par le Parlement. Pour y arriver, il peut s’appuyer à la fois sur les négociations de prix des nouveaux médicaments mais également sur une révision régulière des prix des médicaments déjà sur le marché.
Un système de régulation remis en question par les innovations
Si la seconde partie du XXème siècle a été dominée par la découverte de médicaments chimiques (on décrit cette période comme l’ère des médicaments "blockbusters", des médicaments susceptibles de traiter une large population), la fin du XXème et le début du XXIème siècle ont initié le virage des médicaments biologiques et des thérapies géniques. Ces médicaments sont distribués majoritairement à l’hôpital et s’adressent à des populations de plus en plus réduites. Leur proposition de valeur s’exprime davantage en termes de guérison voire d’éradication de certaines pathologies, là où les médicaments "blockbusters" ont permis le plus souvent de chroniciser certaines maladies, c’est-à-dire vivre plus longtemps et en meilleure santé avec une maladie chronique (diabète, cholestérol, insuffisance cardiaque). Face à ce nouveau paradigme, notre système de régulation est-il toujours adapté ?
Des délais de traitements des dossiers supérieurs à la moyenne européenne
Les lettres d’orientation ministérielles font référence à la "Directive Transparence" qui demande aux États membres de l’Union européenne de veiller à ce que le délai de fixation des prix "n'excède pas 180 jours". Le dernier rapport d’activité publié par le CEPS fait état d’une amélioration relative des délais d’accès en France avec en moyenne, tous dossiers confondus (ayant abouti ou non à un accord, génériques et non génériques), des délais de 142 jours en 2017. Mais si on met de côté les médicaments génériques et les dossiers qui n’ont pas abouti à un accord, ces délais moyens atteignent 213 jours, soit 33 jours de plus que l’objectif fixé par la directive européenne. Cela suppose donc qu’il existe un certain nombre de molécules qui ont du mal à trouver le chemin de l’accès dans le cadre de la procédure classique d’enregistrement.
L’accès précoce et dérogatoire par le système d’ATU avant l’autorisation de mise sur le marché et "post-ATU" après l’autorisation de mise sur le marché (ce système permet d’assurer une prise en charge du médicament s’il n’est pas encore inscrit sur la liste des médicaments remboursés à la date où l’ATU expire) compense en partie ces délais. Mais ce dispositif dérogatoire n’a pas été pensé pour devenir la voie d’accès principale des innovations thérapeutiques, ce qui a conduit le régulateur à le réformer en poursuivant deux objectifs d’apparence contradictoires : ouvrir plus largement l’ATU aux "extensions d’indications", c’est-à-dire aux médicaments ayant déjà obtenu une AMM, et renforcer les contraintes budgétaires de ce dispositif en mettant en place des systèmes de plafonnement aux indemnités des médicaments sous ATU.
Dans notre rapport Médicaments innovants : prévenir pour mieux guérir, nous défendons la mise en place d’une procédure d’évaluation prioritaire pour les traitements innovants, sur le modèle du label américain "breakthrough therapy", afin de rendre possible la priorisation des dossiers concernant des médicaments supposés innovants au sein des autorités chargées de l’évaluation et de la négociation du prix (la Haute Autorité de Santé et le CEPS).
Une France de moins en moins attractive au niveau mondial
Le marché du médicament se caractérise par son organisation particulièrement mondialisée. De grands groupes pharmaceutiques multinationaux concentrent une proportion importante de la commercialisation de médicaments. Dans ce contexte, une forme de compétition entre pays existe afin d’attirer les centres de recherche et développement (R&D) et les essais cliniques. Accueillir la R&D crée une dynamique favorable à travers la création d’emplois, les recettes fiscales, mais aussi l’accès aux soins.
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