La rhétorique des républicains, malgré les précautions oratoires de Bush, est celle d’une guerre de religion, une croisade contre l’islam radical ; toute autre expression devient suspecte de faiblesse. La violence politique augmente pendant toute la période, d’abord verbale, bientôt physique.
Cette évolution du système partisan est inséparable de l’évolution du paysage médiatique. Fox News, fondée en 1995 par Roger Ailes, homme de réseaux et d’influence du parti républicain, voit son influence décupler sur la période, jusqu’à prendre l’ascendant sur le comité national du parti, sur le plan des idées comme de la sélection des candidats. En 2016, deux politologues américaines, Theda Skocpol et Vanessa Williamson, dans un livre sur le Tea Party, analysent le pouvoir de Fox News comme une conséquence du vide intellectuel du parti et du mouvement conservateur après le rejet de Bush et des néoconservateurs : "sans leaders intellectuels forts au sein même du parti, les animateurs de Fox News sont devenus les seules voix d’autorité pour les électeurs républicains". Les animateurs phares de Fox, Bill O’Reilly, Rush Limbaugh, Glenn Beck, Tucker Carlson, s’abreuvent du complotisme, une constante américaine déjà renforcée par les attentats, et en nourrissent l’expansion, car le complotisme est bon pour l’audimat. La veille de l’inauguration d’Obama, Fox embauche Glenn Beck qui lance sa nouvelle émission sur la "trahison des Pères fondateurs" que représente à ses yeux l’élection d’Obama ; ses propos inspirent le mouvement Tea Party. Cette mainmise d’une entreprise commerciale sur un parti politique contribue aussi à rendre possible l’élection de Trump.
Société : de la polarisation à la violence politique
Les guerres déclenchées après les attentats ont enfin un impact profond sur la société et le climat social, les visions de l’identité américaine, le rapport au monde et à l’immigration en particulier. Elles alimentent également la transformation de la police, qui, à partir de la fin des années 2000, récupère les équipements et se militarise, avec des conséquences sur les violences policières dans un contexte racial qui se tend, d’abord à la suite des attentats, puis avec la victoire d’Obama, le mouvement Tea Party et l’élection de Trump. Enfin, elles ouvrent la voie à la violence politique, avec la naissance de nouvelles milices, dont le poids croissant mène droit à l’assaut du Capitole, le 6 janvier 2021. Une particularité des guerres de ces deux dernières décennies, les plus longues de l’histoire américaine, est aussi d’avoir peu touché la population dans son ensemble, alors que des millions de vétérans reviennent brisés et traumatisés.
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