L'Essentiel

Analyse d’Henri de Castries

Analyse de l’Institut Montaigne

Depuis un an, Emmanuel Macron et son gouvernement ont engagé des réformes d’ampleur : vie publique, marché du travail, fiscalité, éducation, formation professionnelle… De nombreux fronts sont ouverts pour les mois qui viennent, parmi lesquels l’assurance chômage, la justice, la SNCF, les retraites…

Sur le plan international, une quinzaine de déplacements ont été effectués dès 2017, notamment au Maroc, au Mali, à Abu Dhabi, en Afrique subsaharienne (Burkina Faso, Côte d’Ivoire, Ghana), en Algérie, au Qatar ou au Niger. En 2018 ensuite : la Chine, la Tunisie, le Sénégal puis l’Inde. Et c’est sans compter les nombreux déplacements européens, à Bruxelles, dans les pays d’Europe centrale et orientale, à Berlin bien sûr où, inlassablement, le président a rappelé son ambition pour l’Union. La ligne européenne du président, si claire pendant la campagne – réforme du travail détaché, de la zone euro, résolution sur le Brexit – s’est heurtée à la très forte instabilité politique qui, partout, règne en Europe. Et la bonne volonté française, même alliée à la constitution d’un gouvernement en Allemagne, ne pourra résoudre à elle seule les problèmes politiques qui agitent le vieux continent.

Pour redonner sa crédibilité et sa voix à la France, en Europe et au-delà, le président a compris qu’il devait réussir là où il est le plus attendu : les réformes structurelles du pays, la compétitivité et le recul du chômage de masse et de longue durée. Le nouvel exécutif n’a pas ménagé ses efforts : ordonnances, lois ordinaires, décrets, programmations pluriannuelles. La mécanique normative a été utilisée à plein. Autant de mesures issues des nombreuses consultations, assises, concertations entamées depuis le mois de mai 2017.

Mais faire, et faire vite, n’a, en politique, jamais été gage de succès ni de qualité. Encore faut-il faire juste, transformer profondément et obtenir des résultats dans la durée – tout en gagnant l’approbation d’une majorité de Français. Le premier des grands chantiers ouverts, celui de la réforme du marché du travail, semble répondre à ce cahier des charges. Réputé irréformable, notre droit du travail a considérablement évolué grâce aux ordonnances qui ont été adoptées à l’été 2017. Après le volet “flexibilité”, le gouvernement s’est attaché à sécuriser les parcours des actifs, par la réforme de la formation professionnelle. Marquée par des négociations difficiles avec les partenaires sociaux, la réforme est sans conteste la plus ambitieuse depuis la loi de 1971.

Plus techniques, les réformes menées de front de l’assurance chômage, de l’apprentissage et de la formation professionnelle sont particulièrement importantes. Elles conditionnent pour une très large part la compétitivité de notre économie pour les décennies à venir. Réussies, elles permettraient à la France de renouer avec le peloton de tête des économies qui réussissent dans la globalisation. Manquées, elles signifieraient la persistance d’un chômage de masse important dans notre pays, soumettant à rude épreuve l’ensemble de nos systèmes sociaux.

D’autres fronts sont ouverts, comme la réforme de la SNCF, qui paraît complètement nécessaire compte tenu de la situation difficile dans laquelle se trouve cette entreprise publique. La grève initiée par les cheminots ce mois d’avril rejoint dans l’imaginaire d’une partie de l’extrême gauche l’agitation qui règne sur quelques campus universitaires. Certains aimeraient que ce mois d’avril ressemble à celui de mai 1968, à quelques semaines du 50e anniversaire de ce fameux mois de mai. Le contexte n’est pas le même, loin de là. Le président Macron n’est pas au pouvoir depuis dix ans. La France ne traverse pas une crise de croissance. Pas plus qu’elle ne digère une guerre de décolonisation traumatisante. La société n’est pas corsetée comme elle pouvait avoir le sentiment de l’être il y a un demi-siècle.

A l’issue de cette première année, la France continue de jouir d’une très bonne perception à l’étranger. Il y a de vraies réussites, en même temps qu’un certain nombre d’interrogations. Le marché du travail est réformé, en même temps que le paritarisme n’a pas abdiqué ses prérogatives, à défaut d’avoir fait preuve de son efficacité. La réforme du système éducatif prend enfin forme, en même temps que celle de l’université est plus incertaine. Le déficit budgétaire de l’Etat est repassé sous la barre des 3 %, en même temps qu’aucune réforme structurelle n’est encore engagée. Prévention et utilisation de la data devraient enfin devenir des leviers de transformation de notre système de santé, en même temps que les grandes transformations de la médecine ambulatoire et du système hospitalier se font attendre.

Sur l’ensemble de ces domaines, l’Institut Montaigne reprend dans le détail les avancées réalisées, les occasions manquées et les initiatives à poursuivre. Si des lignes commencent à se dessiner, il est bien trop tôt pour parler de “bilan”. Un tel exercice incite à poursuivre l’observation et la vigilance, pour quatre années encore. L’Institut Montaigne s’y engage.