L'Essentiel

Le niveau du chômage en France diminue sensiblement : il est passé de 10,4 % en 2015 à 8,6 % fin 2017. Cette tendance favorable s’est accentuée au cours des derniers mois. Le taux d’emploi en France des 15-64 ans est remonté à 65,7 % fin 2017, son plus haut niveau depuis le début des années quatre-vingt (contre 64,7 % fin 2016).

Le marché du travail reste néanmoins tendu pour les jeunes (22,6 % de chômage en 2017) et les travailleurs les moins qualifiés (les actifs ayant un niveau d’étude strictement inférieur au baccalauréat constituaient plus de 61 % des chômeurs en 2015).

Le Grand plan d’investissement présenté en septembre 2017 prévoit de renforcer les compétences et l’accès à l’emploi pour deux millions de personnes (jeunes et demandeurs d’emploi adultes) qui en sont éloignées au cours des cinq prochaines années.

Dates clés

23 mai 2017

Lancement de la concertation sur la réforme du travail avec les partenaires sociaux

mai 2017

31 aout 2017

Présentation des ordonnances pour renforcer le dialogue social

aout 2017

5 septembre 2017

Présentation du plan en faveur des travailleurs indépendants

septembre 2017

22 septembre 2017

Présentation et adoption des ordonnances en Conseil des ministres

17 octobre 2017

Début des concertations sur la transformation de l'apprentissage, de la formation professionnelle et de l'assurance chômage

octobre 2017

8 novembre 2017

Fin des contrats aidés

novembre 2017

28 novembre 2017

Adoption du projet de loi de ratification des ordonnances

27 avril 2018

Présentation en Conseil des ministres du projet de loi sur l'assurance chômage, l'apprentissage et la formation professionnelle

avril 2018

Chiffres

Encadrer les indemnités prud’homales pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

Descriptif : Dans le cadre de l’ordonnance 2017-1387 du 22 septembre 2017, les indemnités prud’homales dues en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse sont désormais encadrées par un barème.
Coût neutre pour les finances publiques à l’exception des situations
où les pouvoirs publics pourraient être impliqués en qualité d’employeur
Répartition du coût :
Coût supporté par l’État : 0 €
Coût supporté par les collectivités locales : 0 €
Coût supporté par la sécurité sociale : 0 €

Analyse détaillée de la proposition

Commentaire synthétique

La mesure est une adaptation des dispositions réglementaires régissant les relations de travail du secteur privé. Cette mesure n’a donc pas d’impact direct sur les finances publiques à court terme. Dans une perspective de plus long terme il est attendu de la mesure qu’elle renforce la fluidité du marché du travail et ait ainsi un effet sur le niveau des cotisations sociales en recettes et des allocations de retour à l’emploi en dépenses.

Chiffrage détaillé

L’article 2 de l’ordonnance 2017-1387 introduit dans le Code du travail des montants minimum et maximum en cas de licenciement irrégulier ou sans cause réelle et sérieuse. Le montant de l’indemnité dépend de l’ancienneté du salarié au sein de l’entreprise. L’indemnité est ainsi comprise entre 3 et 20 mois de salaire brut pour un salarié ayant plus de 30 ans d’ancienneté au sein d’une même entreprise. Dans les entreprises de moins de 11 salariés les montants minima sont minorés pour un salarié avec une ancienneté inférieure à 10 ans.

Les exceptions à ce barème concernent les cas où le juge considère que le licenciement est nul dès lors qu’il intervient en violation d’une liberté fondamentale (liberté syndicale ou droit de grève), de harcèlement sexuel ou moral, de discrimination ou encore de violations de protections spécifiques liées à la maternité, aux accidents du travail ou maladies professionnelles.

Engagements de campagne

Dans une campagne marquée par les discours sur la fin du salariat et alors que François Hollande avait demandé à être jugé sur sa capacité à inverser la courbe du chômage en France, le candidat Macron était attendu sur la thématique du travail et de l’emploi.

Face au constat d’un marché du travail dual, opposant les travailleurs bien formés bénéficiant d’un emploi stable aux travailleurs peu qualifiés et alternant les contrats courts, Emmanuel Macron a défini plusieurs objectifs :

  • Rendre le travail plus rémunérateur pour le salarié et moins cher pour l’employeur : le candidat souhaitait améliorer le pouvoir d’achat des salariés via une réduction des cotisations sociales – financée par la hausse de la CSG – et la hausse de la prime d’activité. Ces deux mesures ont pour objectif de faire augmenter le SMIC de 100 € nets supplémentaires par mois. Enfin, par la réduction des charges au niveau du SMIC et la création d’emplois francs sur critère géographique, le candidat souhaite rendre l’embauche de salariés moins qualifiés moins onéreuse.
  • Rendre l’initiative moins risquée en France : éliminer les rigidités est l’un des credo du candidat, qui proposait de créer un Code du travail digital, de réduire les cotisations sociales pesant sur les indépendants ainsi que de rattacher le Régime Social des Indépendants (RSI) au régime général. Mesure amendée lors de l’examen de la loi El-Khomri, l’instauration d’un plafond et d’un plancher pour les indemnités prud’homales pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, était défendue par le candidat Emmanuel Macron.
  • Mettre en place de nouvelles sécurités professionnelles :
    • Par la création d’une assurance-chômage universelle. Le candidat En Marche souhaitait ouvrir des droits à l’assurance-chômage aux salariés démissionnaires en contrepartie d’un contrôle accru de la recherche d’emploi : après le refus de deux offres d’emplois décents, les allocations chômage seraient suspendues. Face à ces changements d’ampleur, l’État prendrait alors en charge le pilotage du système d’assurance-chômage.
    • Par le renforcement et la simplification de la formation professionnelle. Pour simplifier un système de formation éminemment complexe et difficilement lisible, le candidat proposait de convertir la majeure partie des contributions actuelles des entreprises pour la formation en droits individuels pour les actifs. Il propose également de rendre disponible une information complète sur les résultats de chaque formation et de chaque accompagnement (retour à l’emploi, impact sur la trajectoire salariale…). Enfin, le candidat s’engageait à investir massivement dans l’acquisition des compétences (formation d’un million de jeunes et d’un million de demandeurs d’emploi peu ou pas qualifiés).
    • Par l’apprentissage. Le programme désignait deux objectifs : rendre l’apprentissage plus attractif pour les entreprises comme pour les jeunes et faire de l’alternance le cœur de l’enseignement professionnel. Pour cela, Emmanuel Macron proposait notamment de rassembler les subventions existantes en une aide unique, de faire converger les deux contrats d’alternance, d’unifier la grille de rémunération des alternants ou encore d’associer les branches professionnelles dans la définition des programmes.

État des lieux

La situation de l’emploi en France s’améliore, ce dont témoigne la hausse du taux d’emploi des 15 à 64 ans de 64,7 % à 65,7 % entre 2016 et 2017 (Emmanuel Macron ayant pris ses fonctions en mai 2017), ou encore la baisse du taux de chômage entre 2015 et 2017, passant de 10,4 % à 8,6 %. Les projections anticipent une poursuite de cette baisse sous l’effet des récentes réformes. Pôle emploi, dans son enquête annuelle, révèle à son tour des intentions d’embauche en progression de 18,7 % par rapport à 2017. Le chômage des jeunes est, quant à lui, passé de 24,6 % en 2016 à 22,6 % en 2017, une évolution encourageante mais toujours au-dessus de la moyenne de l’Union européenne (16,8 %).

Dès les premières semaines du nouveau quinquennat, le gouvernement a présenté aux partenaires sociaux un agenda ambitieux, incluant une réforme (adoptée depuis) du droit du travail ainsi que le futur projet de loi sur les parcours professionnels, présenté le 25 avril 2018 en Conseil des ministres, et regroupant les réformes suivantes :

  • La réforme de l’assurance-chômage

Cette réforme poursuit trois objectifs conjoints : instaurer une indemnisation chômage pour certains démissionnaires et indépendants (à défaut d’universalité totale), renforcer le contrôle des chômeurs et, enfin, lutter contre l’abus des contrats de travail de courte durée (90 % des embauches en France se faisant en CDD ou en intérim). Le gouvernement entend également revoir la gouvernance de l’Unédic, abandonnant la piste d’une nationalisation un temps évoquée.

  • La réforme de la formation professionnelle présentée le 5 mars 2018 

L’objectif de cette réforme est de renforcer les droits à la formation des travailleurs via un compte personnel de formation (CPF) profondément réformé associé à un conseil en évolution professionnelle, la mise en place d’une plateforme en ligne pour bénéficier des formations, la réforme des circuits de financement de cette formation (et, plus généralement, le prélèvement par les URSSAF de toutes les contributions de formation professionnelle) ou encore la création au niveau national de France Compétences, une agence de régulation de la formation professionnelle et de l’alternance.

  • La réforme de l’apprentissage, présentée le 9 février 2018

Le gouvernement souhaite renforcer l’attractivité de ce système, par le biais d’une revalorisation de la rémunération des apprentis, d’incitations financières à l’embauche plus simples et ciblées sur les PME/TPE ou encore de mesures d’assouplissement du droit du travail des apprentis. Une contribution unique des entreprises, prélevée par les URSSAF, compensera la suppression de la taxe d’apprentissage, afin de financer à son tour les contrats d’apprentissage et de professionnalisation. Élément central de la réforme, le pilotage du système (notamment l’intégralité des ressources financières et la fixation des niveaux de prise en charge des contrats) devrait être retirée aux régions et assuré par les branches professionnelles à l’horizon 2020. Avec un taux de chômage particulièrement élevé (notamment chez les jeunes et les moins qualifiés), la segmentation du marché du travail ou encore un manque croissant de compétences numériques, l’impératif du gouvernement est bien de favoriser l’accès à l’emploi des moins qualifiés qui en sont exclus. C’est l’une des priorités du Grand plan d’investissement qui prévoit d’investir 15 Md€ sur le quinquennat dans le but de :

  • former et accompagner vers l’emploi 2 millions de personnes peu qualifiées” ;
  • financer des expérimentations dans l’éducation nationale et accompagner les transformations du premier cycle universitaire”.

Analyse

Ces réformes ont pu, jusqu’à présent, être conduites sans grandes difficultés.

Les réformes relatives au droit du travail ont pu être menées assez aisément, compte tenu de l’affaiblissement des organisations syndicales dans le secteur privé et de la relative précision des annonces qui avaient été faites durant la campagne présidentielle par le candidat Macron. Le gouvernement était clairement en position de force pour mettre en œuvre ces réformes en début de quinquennat.

La réforme du droit du travail transforme en profondeur les relations collectives du travail au niveau de l’entreprise (passage systématique à l’accord majoritaire pour qu’un accord soit valide, restructuration et simplification des institutions représentatives du personnel, procédures adaptées dans les TPE, possibilité de référendum). Ces mesures mettront cependant du temps à prendre effet et nécessiteront une modification de certaines postures syndicales (notamment du fait du verrou de l’accord majoritaire, problématique dans certaines entreprises) et patronales. En outre, elles nécessiteront un dynamisme de négociation inédit au niveau des branches, dans la mesure où de nouveaux champs de négociation leur sont ouverts. On peut craindre que, tant les divisions patronales et syndicales en leur sein, que leur faiblesse (trop nombreuses, de petite taille) ne leur permettent pas de se saisir des nouvelles opportunités que la réforme introduit.

La mesure à l’effet le plus immédiat est sans aucun doute le plafonnement des indemnités accordées par le juge au salarié en cas de défaut de cause légitime (“réelle et sérieuse”) d’un licenciement. Avec ce barème, le licenciement est rendu moins aléatoire pour l’employeur et les plaideurs sont incités à transiger avant d’aller au contentieux. Le coût maximum du licenciement devient ainsi moins élevé qu’en Espagne et en Italie, deux pays qui ont procédé récemment à des réformes similaires. Dans certains cas, il deviendra également moins coûteux qu’en Allemagne (où les procès sont rares mais peuvent s’avérer très coûteux pour l’employeur). De manière beaucoup moins massive, mais importante, au moins sur le plan symbolique, les assouplissements apportés aux procédures de licenciement collectifs (introduction de la rupture collective conventionnelle, appréciation des difficultés économiques de l’entreprise sur une base nationale, et non plus mondiale) pourraient redonner confiance aux investisseurs, notamment étrangers.

Plus généralement, cette réforme du droit du travail, facile à expliquer et visible de l’étranger, est également un atout en termes d’attractivité du territoire français. Elle compte sans doute fortement dans le sentiment général qu’ont les investisseurs étrangers dans l’appréciation de la situation française. D’autant plus que si ces réformes ont été prises rapidement et sans grandes difficultés, elles étaient jugées impraticables par de nombreux observateurs depuis les échecs répétés du quinquennat précédent dans ce domaine.

S’agissant de la réforme de la formation professionnelle continue, le gouvernement a dû faire face à l’opposition unanime des organisations syndicales et patronales concernant les circuits de financement et le renforcement du compte personnel formation (CPF), deux orientations qui tendent à affaiblir la position des branches, donc des appareils patronaux et syndicaux dans la régulation du système. Il en va de même pour le Plan d’investissement compétences (PIC) de 15 Md€ prévoyant d’ici 2022 la formation d’un million de chômeurs peu qualifiés et d’un million de jeunes éloignés de l’emploi supplémentaires. Toutefois, ces enjeux, d’apparence très technique, n’ont que peu d’échos dans l’opinion publique, ce qui a permis au gouvernement d’avancer sans encombre.

La réforme de la formation continue est sans doute la réforme la plus importante depuis la loi fondatrice de juillet 1971 instaurant une contribution obligatoire et un système de collecte et de financement devant soutenir l’effort des entreprises en la matière. En refondant totalement le compte personnel formation lancé en 2015 (des droits libellés en €, un choix beaucoup plus grand et non intermédié par les branches, un financement conforté…), un véritable pilier individuel de la formation est constitué. L’impact escompté est une plus grande autonomisation des actifs et une diminution du caractère “prescriptif” (par l’employeur, par Pôle emploi…) de l’entrée en formation.

Quant à la réforme du circuit de collecte (prélèvement par les URSSAF), complétée par le repositionnement et la diminution du nombre des opérateurs financiers de branche (les OPCA) sur un métier de conseil et de soutien aux TPE/PME, elle va dans le sens de la simplification et de la maîtrise des frais de gestion du système. Les conditions de réussite de cette réforme ne sont pourtant pas acquises. D’une part, il reste à vérifier que les financements dédiés au nouveau CPF (0,3 / 0,4 % de la masse salariale) seront suffisants. D’autre part, le nouveau conseil en évolution professionnelle (CEP) doit être suffisamment puissant et financé pour offrir un service de qualité et facilement accessible aux salariés les plus en risque vis-à-vis de leur employabilité.

S’agissant de l’apprentissage, relevons ici le caractère consensuel de la majorité des mesures (simplification des aides, quelques assouplissements du droit du travail des apprentis…). Aucune opposition syndicale n’est apparue, le gouvernement n’ayant pas abordé la question des lycées professionnels, élément pourtant central pour la formation professionnelle initiale en France. Le seul aspect polémique était le transfert de l’essentiel des compétences de financement et de gouvernance des régions aux branches professionnelles, compétences des régions depuis les premières lois de décentralisation de 1983. Le gouvernement est passé outre aux protestations des régions, qui ont par ailleurs réagi en ordre dispersé.

La réforme envisagée de l’apprentissage soulève malgré tout certains enjeux problématiques. Le transfert de compétence des régions aux branches professionnelles, supposé débureaucratiser le système actuel des décisions d’ouverture et de fermeture de sections par les régions, n’a été précédé d’aucune étude d’impact ou de rapport d’experts ou d’inspection générale. Cette réforme pose plusieurs questions délicates : comment les branches vont-elles pouvoir mener des politiques territorialisées en matière d’apprentissage ? Comment vont-elles utiliser le levier du niveau de prise en charge financière des contrats dont elles vont disposer, alors même qu’elles ne sont pratiquement jamais structurées au niveau territorial et que leur éclatement et extrême diversité (particulièrement en termes de collecte des fonds dédiés à l’apprentissage) va nécessiter un très fort niveau de péréquation financière, jusque-là assurée par les régions ? Comment les branches vont-elles gérer, avec un niveau de prise en charge uniforme au niveau national, l’extrême diversité des coûts de formation d’un CFA à un autre (diversité souvent justifiée par des localisations géographiques différentes ou des qualités de formation différentes) ? Comment pourrait s’effectuer le rapprochement, pourtant indispensable, entre les CFA et les lycées professionnels, avec la disparition de la notion même de carte de formation (aujourd’hui pilotée par les régions afin d’assurer un minimum de cohérence entre les deux univers) ? Plus généralement, en ne traitant que la question de l’apprentissage et non l’ensemble de la formation professionnelle initiale (donc en excluant de la réflexion les lycées professionnels, qui représentent environ 75 % des élèves du secondaire orientés vers la formation professionnelle initiale), la réforme rate une grande partie du sujet.

La réforme de l’assurance chômage n’a pas rencontré de difficultés notables dans la mesure où le gouvernement n’avait que des “bonnes nouvelles” à annoncer : élargissement de l’assurance chômage (certes, très encadré pour des raisons financières) aux indépendants et certains démissionnaires sans augmentation des cotisations pesant sur les salaires. Quant à l’évolution de la gouvernance (encadrement des négociations au préalable par un document d’orientation du gouvernement), elle ne fait que traduire dans la loi la pratique habituelle et les partenaires sociaux ont été plutôt rassurés de voir s’éloigner le spectre de l’étatisation de l’Unédic qu’ils avaient craint durant la campagne présidentielle.

Quant au second volet de la réforme de l’assurance chômage – le renforcement du contrôle de la recherche d’emploi -, il n’a pas soulevé de difficultés dans la mesure où il était déjà prévu dans la campagne, qu’il s’inscrit totalement dans la continuité des réformes précédentes déjà bien acceptées (sanction du refus de deux offres raisonnables d’emploi) et que ce thème est extrêmement populaire. La seule amélioration notable est le transfert de la compétence des sanctions (suppression ou réduction de l’allocation chômage) des préfets de région (qui n’avaient les services pour effectuer cette mission) à Pôle emploi. On peut dès lors s’attendre à ce que les sanctions soient effectives.

Cette réforme, même si elle est dans la ligne des promesses de campagne, manque d’ambition. L’intensification des contrôles de la recherche d’emploi ne saurait se substituer à une réflexion sur le rôle de certains paramètres de l’assurance chômage dans la succession et l’abus de contrats courts ainsi que l’enfermement dans la précarité de très nombreux chômeurs. Le renvoi de ces sujets (la question de l’abus des contrats courts et du cumul emploi / chômage) à une négociation entre les partenaires sociaux qui doit aboutir d’ici la fin de l’année devra être surveillé de près.

Sur tous ces sujets, le gouvernement a agi conformément aux engagements de campagne. Il n’a jamais véritablement dévié de sa trajectoire (en renonçant à des mesures importantes qu’il aurait annoncées). Seul le volet assurance chômage semble sensiblement en-dessous des promesses en raison d’un élargissement restrictif du système par rapport à l’objectif d’une assurance chômage universelle.

De toute évidence, ces réformes sont ambitieuses, elles rejoignent d’ailleurs très souvent des préconisations faites par l’Institut Montaigne au cours des dernières années. Elles le sont toutefois à des degrés variables. Surtout, leur impact prendra certainement du temps pour se matérialiser.

Et maintenant ?

Malgré des ambitions incontestables, ces réformes ne marquent pas un aboutissement. Dans certains cas, des correctifs devraient même être apportés.

La réforme du droit du travail, qui met au centre le dialogue social, ne sera une pleine réussite que si le gouvernement parvient à réduire le nombre de branches en utilisant les moyens juridiques que lui donnent les lois El Khomri et la réforme actuelle. Il pourra aussi compter sur les avis d’une commission d’experts récemment constituée pour ne pas étendre des accords de branche dont certaines stipulations seraient un obstacle au développement économique et à l’emploi, notamment parce qu’ils biaiseraient les conditions de la concurrence entre les entreprises existantes et les nouveaux entrants.

En outre, il faudra sans doute revenir sur certains points du droit du travail aujourd’hui non traités (ou laissés à la libre appréciation des branches), notamment en matière de contrat de travail : la législation, très rigide en France, sur le recours au CDD et à l’intérim ; les contrats de travail de projet, ou encore l’intégration dans le contrat de travail de clauses de rupture prédéfinies.

Aux marges du droit du travail, la question du statut des “travailleurs indépendants économiquement dépendants” (en particulier les travailleurs sur les plateformes électroniques) devra être traitée. L’extension de l’assurance chômage à quelques milliers d’entre eux n’est clairement pas au niveau des enjeux. Une nouvelle réforme devra préciser, sécuriser et clarifier les droits et devoirs de cette catégorie de travailleurs, certes très minoritaire mais en forte croissance, tant en matière de protection sociale que de protection de l’emploi et de formation professionnelle.

En matière d’assurance chômage, et au-delà du renforcement du contrôle de la recherche d’emploi – mesure qui n’affectera qu’une petite minorité de chômeurs de longue durée -, il faut surtout prendre à bras le corps la question de son rôle dans la montée de la précarité et de l’instabilité de l’emploi. C’est dans ce sens qu’elle devrait être remaniée, par modification d’un certain nombre de paramètres de calculs (après examen attentif de l’impact des conditions d’éligibilité actuelle, parmi les plus “généreuses” de l’OCDE). Quant à l’introduction d’un dispositif de type bonus – malus en fonction du nombre de ruptures ou de fins de contrats de travail que connaît l’entreprise, il est sans doute pertinent économiquement dès lors qu’il pourrait être mis en place de manière relativement simple. De ce point de vue, un assouplissement des conditions de recours aux CDD et à l’intérim assorti de l’instauration d’un bonus-malus sur les contributions employeur à l’Unédic pourrait être une formule gagnante.

S’agissant de la réforme de la formation continue, il est probable que les ressources financières dédiées au nouveau CPF ne permettront pas de le financer intégralement si sa montée en charge est réussie. D’autres ressources, versées par les entreprises et/ou les salariés au moment des fins ou ruptures de contrat de travail (une fraction des indemnités de rupture) pourraient venir l’alimenter, comme il est proposé dans Un capital emploi formation pour tous (Institut Montaigne, 2017).

De même, il faudra prévoir à terme des financements supplémentaires pour le CEP (au-delà de l’enveloppe de 250 M€ prévus dans la réforme), que les salariés pourraient également mobiliser en recourant à leur CPF, ce qui n’est pas prévu aujourd’hui (dans la réforme, le CPF permet toujours de ne financer que des actions de formation).

Enfin, on peut regretter que l’adhésion aux OPCA reste obligatoire pour les entreprises. On pourrait imaginer une adhésion sur la base du volontariat, un mécanisme de “retour sur investissement” favorable pour les TPE/PME (1 € cotisé leur permettrait de bénéficier de soutiens financiers supérieurs à 1 € de la part de leur OPCA) encourageant ces dernières à adhérer (consulter à ce sujet les propositions du rapport Réforme de la formation professionnelle : allons jusqu’au bout !2018 ).

Concernant l’apprentissage, il n’y a sans doute pas de solution viable sans une coopération structurée et organisée entre les régions et les principales branches professionnelles. La réforme devrait donc être corrigée pour instaurer une véritable coopération (voire un mécanisme de codécision) entre ceux acteurs essentiels en matière d’ouverture, de fermeture de sections et en matière de pilotage des CFA par la performance. Le transfert de la compétence pleine et entière sur les lycées professionnels aux régions, l’élaboration d’une carte des formations professionnelles initiales et l’organisation de la coopération entre ces deux voies de formation, sous l’autorité des régions, sont également des mesures indispensables pour en finir avec la concurrence entre CFA et lycées professionnels.