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19/07/2019

[En chiffres] Sommet du G7 sur les inégalités : dépassionnons le débat !

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[En chiffres] Sommet du G7 sur les inégalités : dépassionnons le débat !
 Julien Damon
Auteur
Professeur associé à Sciences Po

Sur une idée originale de Marc-Antoine Jamet, maire de Val-de-Rueil.

Alors que le sommet du G7, qui se tiendra à Biarritz du 24 au 26 août prochains, aura pour thème les inégalités, celles-ci sont un enjeu de préoccupation mondiale - et française - constante. Dans un monde irrigué de fausses informations, où l’émotion l’emporte souvent sur la raison, il convient de dépassionner le débat public sur ce sujet, en particulier en France où les perceptions sont souvent éloignées de la réalité, dans un pays particulièrement passionné par l’égalité. C’est dans cette perspective que Julien Damon, sociologue et professeur associé à Sciences Po, nous livre son analyse de l’état de la pauvreté, des classes moyennes et des inégalités en France et dans le monde. 

 

Prosaïquement, cette série de décryptages sur la pauvreté, les classes moyennes et les inégalités a soutenu une thèse simple et relativement optimiste : comparativement, pauvreté et inégalités demeurent limitées en France, dans un contexte global de baisse de la pauvreté extrême, de réduction des inégalités internationales, et de croissance des inégalités nationales. Les mutations qui sont à l’œuvre concernent, comme nous l’avons vu, la répartition des conditions de vie et les mutations des classes moyennes, en extension dans le monde en développement, en crise dans le monde développé.

Dès lors, quels enseignements en tirer ?

La pauvreté relative augmente, tandis que la pauvreté absolue baisse dans le monde. Particulièrement, l’extrême pauvreté baisse et se concentre en Afrique subsaharienne. Pourtant, les perceptions sont trompeuses, puisque la majorité des habitants de la planète pensent que la pauvreté extrême a augmenté dans le monde depuis 20 ans, les Français en tête. La France, justement, reste en très bonne place dans le concert des nations en termes de PIB par habitant. Si la pauvreté en France est stable, elle s’est néanmoins transformée : elle touche aujourd’hui en particulier les jeunes urbains, les familles monoparentales et les travailleurs étrangers.

Les classes moyennes ne suivent pas toutes la même évolution selon les économies. Nous assistons en effet à l’aube des classes moyennes des pays émergents, tandis que celles des pays occidentaux sont en déclin. À horizon 2030, nous serons pleinement dans un monde de classes moyennes, dont la proportion sera deux fois plus large que celle des personnes pauvres. En France, le "U" du système socio-fiscal fait que les classes moyennes ne sont pas assez défavorisées pour bénéficier des aides sociales, ni assez favorisées pour bénéficier des réductions d’impôts. Cela entraîne une polarisation où les classes moyennes, "ni-ni", se sentent oubliées.

Les inégalités, enfin, sont, en France en particulier, objet de fantasmes. Plusieurs éléments peuvent être analysés, comme l’accès à internet ou le logement, montrant que la France se positionne, à l’échelle globale, en pays relativement peu inégalitaire, avec un indice de Gini de 0,29. Cela est notamment dû à l’une des dépenses sociales les plus fortes du monde, à plus du tiers du PIB. Pourtant, les perceptions sont toutes autres, et il y a une réelle crainte française des inégalités. Le pessimisme fait que la solidarité est valorisée. Dans les faits, les inégalités de revenu ont baissé jusqu’aux années 1990, avant de se stabiliser. Si les inégalités de patrimoine ont également baissé drastiquement sur le temps long, certains signaux laissent craindre leur potentiel retour. Les territoires, enfin, sont inégaux, à la fois entre eux et en leur sein.

À l’approche du G7 qui se tiendra à Biarritz du 24 au 26 août et sera l’occasion pour les grands de ce monde d’évoquer les inégalités, il convient de dépassionner le débat public.

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