Rechercher un rapport, une publication, un expert...
L'Institut Montaigne propose une plateforme d'Expressions consacrée au débat et à l’actualité. Il offre un espace de décryptages et de dialogues pour valoriser le débat contradictoire et l'émergence de voix nouvelles.
29/09/2017

Enfin une bonne raison de cumuler ?

Imprimer
PARTAGER
Enfin une bonne raison de cumuler ?
 Institut Montaigne
Auteur
Institut Montaigne

 


La grogne monte parmi les retraités, qui subiront de plein fouet la hausse de la Contribution sociale généralisée (CSG) à partir du 1er janvier prochain, une mesure de redistribution de pouvoir d'achat en faveur des actifs voulue par le gouvernement. Si l'exécutif a annoncé simultanément la revalorisation des retraites de 0,8 % au 1er octobre ainsi qu'une hausse conséquente du minimum vieillesse à l'horizon 2022, le mécontentement ne faiblit pas. La crainte, dominante et partagée, est celle d'une inéluctable baisse du pouvoir d'achat des retraités. Une pratique, mal connue mais de plus en plus fréquente, permet de répondre à ces enjeux : le cumul emploi-retraite. De quoi s'agit-il ? Comment le développer ? Décryptage.

 

 

Qu’est-ce que le cumul emploi-retraite ?

Le cumul emploi-retraite est un statut permettant à un retraité de travailler et de percevoir dans le même temps des revenus professionnels et des pensions de retraite. En 2016, 478 000 personnes travaillaient tout en percevant une pension de retraite, un nombre en constante évolution (+18 000 personnes en moyenne par an, exceptée une baisse en 2016).

Quelles sont les raisons encourageant certains retraités à poursuivre une activité professionnelle ?

Dans le rapport Faire du bien-vieillir un projet de société, rendu public en juillet 2015, l’Institut Montaigne démontre les avantages d’un maintien de l’activité chez les seniors (plus de 50 ans) non retraités. En effet, cette situation répond à une question de bien-être : les seniors en activité se sentent en moyenne plus intégrés à la société et sont en meilleure santé que ceux qui, au même âge, sont partis à la retraite ou sont au chômage. De surcroît, les retraités cumulants, c’est-à-dire qui  mènent une activité professionnelle pendant leur retraite, se déclarent eux aussi en meilleure santé que les non-cumulants. Ce constat est aujourd’hui partagé et objectivé par les conclusions de la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (DREES) du Ministère des Solidarités et de la Santé dans une récente étude sur ce thème.

Le profil de ces retraités cumulant emploi et retraite se différencie tout aussi bien des actifs que des seniors n’ayant pas encore atteint l’âge de la retraite :

  • 50 % des retraités cumulants sont en CDI, contre 75 % des seniors en emploi non-retraités ;
  • un cumulant sur trois est non-salarié, contre un actif en emploi sur six.

En outre, les retraités cumulants sont bien plus maîtres de leur situation professionnelle. S’ils sont 67 % à travailler en temps partiel contre 14 % des actifs, seuls 9 % d’entre eux déclarent “subir” cette situation, contre 43 % des actifs. Quoiqu’elle demeure minoritaire et ne concerne que 3,4 % de l’ensemble des retraités, la pratique du cumul leur permet d’obtenir un complément de revenu conséquent.  Avec des revenus supplémentaires généralement de l’ordre de 1 000 euros par mois, le cumul emploi-retraite entraîne une hausse de 30 % des revenus pour les cumulants.

Le cumul emploi-retraite apparaît alors comme une double opportunité : il permet une meilleure intégration des populations retraitées, d’une part, et représente un complément de revenus non négligeable pour une population souvent frappée par la précarisation, d’autre part.

Quel impact pour la société  ?

Face à la montée d’un chômage de masse dans les années 1970, l’une des réponses a été le partage du travail entre les générations, conduisant à une pré-retraite massive qui n’est pas parvenue à favoriser l’emploi des jeunes. L’activité des seniors, en plus d’avoir des conséquences positives pour cette génération, se répercute positivement sur la société dans son ensemble, constat que nous défendons dans le rapport :

  • pour les entreprises, ce sont les garanties de savoir-faire maintenus, et d’expériences affectant directement leur croissance ;
  • pour l’État, ce sont des opportunités de croissance supplémentaire ainsi qu’un déficit amoindri des régimes de retraite ;
  • pour les retraités qui cumulent, s’ils s’acquittent de cotisations dans le cadre de cette activité professionnelle, ils participent financièrement au système de retraite mais sans pension supplémentaire en contrepartie. Les cotisations récoltées participent positivement à la santé financière du régime. Cette contribution est importante au regard de l’évolution démographique, combinée à un faible taux d’activité des seniors en France métropolitaine (50,7 % en 2016 contre 59,9 % en 2015 dans les pays de l’OCDE). La dégradation du ratio actifs / retraités est une menace importante pour le système de retraite : il n’y aurait en effet plus que 1,5 actif pour un retraité en 2060 contre 2,1 en 2010.

Quoique salvateur, notamment à travers la hausse de cotisations qu’il entraîne, le cumul emploi-retraite ne saurait à lui seul résoudre les défis démographiques et financiers du système de retraite. Avec 300 milliards d’euros de prestations de retraite chaque année - soit 14 % du PIB -, un ratio actifs / retraités en baisse et une dette cumulée des régimes qui pourrait représenter 25 % du PIB à l’horizon 2040, une réforme semble inéluctable.

Écrit par Timothée Houzel.

 

Recevez chaque semaine l’actualité de l’Institut Montaigne
Je m'abonne